Fast-fashion victimes

Tandis que les magasins de vêtements vont rouvrir leurs portes le 19 mai, il convient de se pencher sur une tendance controversée.

Des ouvriers et ouvrières pakistanais gagnent moins de 100€ par mois, pour travailler dans des conditions dangereuses et éprouvantes. Foto: USAID Pakistan / Wikimedia Commons / CC0 1.0

(Anouchka Braig) – Le 19 mai prochain, c’est la réouverture en France des commerces dits non-essentiels. Si ce terme, appliqué à certains commerces, peut être considéré comme injuste, d’autres sont basés sur un modèle dont on se passerait volontiers…

Certaines enseignes du monde de la confection, comme Primark récemment ouvert à Strasbourg, Zara ou H&M, vivent grâce à la « fast-fashion ». Qu’est-ce ? Il s’agit de la mode express, proposant des collections quasiment éphémères, plusieurs fois par saison, pour permettre aux acheteurs d’être toujours tendance.

Pour pousser davantage à la consommation, ces vêtements, produits à bas coûts et donc de mauvaise qualité, sont vendus à prix discount. Fabriqués à base de matériaux non-renouvelables, bourrés de produits chimique, ils sont jetables après cinq ou six lavages. Pourtant, les consommateurs se les arrachent. Le 8 septembre dernier à Strasbourg, ce ne sont pas moins de 800 personnes qui ont franchi en une demi-heure, les portes de Primark, lors de son ouverture.

Mais la tendance du vêtement jetable n’est pas sans conséquences. Si certains consommateurs ont la volonté de recycler les vêtements qu’ils ne portent plus, dans 90% des cas ils ne sont plus en assez bon état pour une seconde vie. Ce sont donc annuellement, 80% des vêtements fabriqués qui finissent jetés ou incinérés, car non recyclables. Cela représente 4 millions de tonnes en Europe.

Outre ce gaspillage, l’industrie textile, dont la production annuelle est de plus de 100 milliards de pièces, monte sur la deuxième place du podium des industries les plus polluantes du monde, juste derrière celle du pétrole.

L’eau est l’une des ressources naturelles les plus consommées, dans la fabrication des vêtements. Chaque année, 93 milliards de mètres cubes d’eau sont utilisés, chiffre qu’on parvient difficilement à se représenter. Voici un exemple plus parlant : pour la fabrication d’un jean, 7.500 litres d’eau sont nécessaires. Par ailleurs, plus d’un tiers des microplastiques qui polluent les océans, proviennent du lavage de vêtements en polyester (dérivé du pétrole, énergie fossile non renouvelable).

La production de cuir, de laine, de coton et de matières synthétiques composant nos vêtements, est à l’origine de plus d’un milliard de tonnes de CO2 par an. A ceci s’ajoute également le CO2 produit par l’élevage des animaux, source de matières premières, ainsi que par le transport des vêtements par avion depuis l’Asie, principalement.

Qu’en est-il du coût humain ? Réduire le prix de vente implique une réduction du coût de production, et donc des salaires des personnes qui fabriquent ces vêtements, majoritairement au Pakistan ou au Bangladesh. Salaires misérables, conditions de travail déplorables et dangereuses, voire mortelles, liées à la manipulation de produits chimiques et à des usines délabrées, travail des enfants, sont autant d’éléments qui entrent en ligne de compte dans la production d’un t-shirt vendu ici 5€.

Le tableau de la fast-fashion est bien noir, et il convient d’en prendre conscience. Pour sortir de cette consommation morbide de vêtements, à la fois égoïste, aveugle, et fortement plébiscitée par les grandes marques grâce aux réseaux sociaux et autres influenceurs, des alternatives existent.

Les vêtements de seconde main, vendus en friperie ou sur des sites en lignes, gagnent heureusement toujours plus d’adeptes. Certaines marques proposent aussi des vêtements issus du commerce équitable. Ils entrent dans ce qu’on appelle la « slow-fashion », privilégiant la qualité à la quantité, et produisant d’une manière éco-responsable.

Certes un t-shirt produit de manière responsable, nous coûtera plus cher à l’achat, mais moins cher dans le temps, car il s’abîmera beaucoup moins vite. Aussi demandons-nous si nous avons vraiment besoin de notre achat, ou s’il restera au placard, comme les deux tiers des vêtements des français.

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