Faut-il haïr les riches ?

Une question qui n’a rien d’incongru, le jour de la première manifestation contre la très macronienne réforme des retraites.

L’argent va à l’argent, et lorsque l’économie se crashe c’est le peuple qui règle l’addition. Foto: www.ebprese.de / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – A Mulhouse-Bourtzwiller, 124 emplois seront prochainement supprimés suite à la fermeture d’un hypermarché du Groupe Auchan appartenant à la famille Mulliez. Une goutte d’eau dans l’océan du chômage de masse que connaît la France ; la goutte qui fera déborder le vase du désespoir de salarié(e)s, alors que d’ici septembre prochain, devrait entrer en vigueur une nième et odieuse réforme des retraites voulue par les liquidateurs de l‘héritage du Conseil National de la Résistance. Combien d’autres situations similaires, pour ne pas dire identiques va-t-on connaître encore, dans un pays au Produit National Brut (PNB) et Produit Intérieur Brut (PIB) supérieurs à ceux du Canada ?

Une minorité de nantis en pleine expansion se goberge, dans une société de plus en plus financiarisée qui, pour gaver d‘insatiables actionnaires, détruit les outils de travail, les salarié(e)s et le sens même du travail. Avec 157 milliards d’euros d’aides publiques versées annuellement en France aux entreprises, le capitalisme est sous perfusion et la question de son euthanasie se pose, avant qu’il nous tue tous. D’autant plus que cette somme pharaonique se ventilant en 65 milliards d’exonérations de cotisations salariales employeur, 61 milliards d’exonérations d’impôts et 32 milliards de subventions diverses, il ne faut pas manquer d’air pour affirmer la bouche en cœur, que notre système de retraite par répartition est menacé.

Menacé par qui ? Par les riches, certes oui, car la prédation de certains sur les biens communs pour augmenter leur fortune est inadmissible. Mais si ces gens ont perdu tout sens moral, au point de traiter leurs frères humains comme des untermenschen, c’est bien que le système le permet. Le mot, quoi que fort, reste néanmoins réaliste, car lorsqu’il est question dans une entreprise de dégraisser, peut-on encore parler d’humanité et de dignité ? Or, la plupart des techniques managériales actuelles reposant, comme l’a démontré le chercheur Johann Chapoutot, sur des concepts nazis, la boucle n’est-elle pas bouclée ?

Faut-il alors haïr les riches, et pire encore comme on l’entend parfois, leur faire rendre gorge ou comme le disait un ex-président aussi grossier que Richard Nixon, les accrocher à des crocs de bouchers et nettoyer tout ça au Kärcher ? Tant que le système leur permet de s’enrichir aussi odieusement perdurera, aucune de ces options n’aura d’effets. Par ailleurs, c’est la barbarie qui se construit avec la haine, pas la civilisation. En fait, le royaume de la liberté commence seulement là où l’on cesse de travailler par nécessité et opportunité imposée de l’extérieur, affirmait Marx en 1867 dans Das Kapital (livre III, chapitre 48). Or, nous prenons depuis quelques décennies à grand pas, le chemin du retour au XIXe siècle.

Préserver le climat n’est plus une option, entend-on fort heureusement depuis peu, mais cela n’a de sens que si l’on éradique la source du mal rongeant la planète et l’humanité. Ce mal nommé capitalisme, que de nombreux politiques favorisent tout en jurant main sur le cœur servir leurs concitoyens, est haïssable au plus haut point. Un mal dont les origines sont antérieures à l’ère de l’industrialisation et dont les chantres ont décrété la fin de l’histoire juste avant le choc des civilisations. Autant de fumeuses théories, destinées d’abord à bercer nos contemporains d’illusions, puis à masquer les vraies responsables des catastrophes, tant actuelles qu’à venir.

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