Féminicides : Silence, Messieurs !

Non seulement la plupart des contributions masculines n'apportent que peu au débat concernant les violences faites aux femmes, mais en plus, de nombreuses contributions ne font qu'illustrer le problème sans esquisser aucune solution. Bien au contraire.

Dans le débat concernant les violences faites aux femmes, le mieux que les hommes puissent faire, c'est de se taire. Foto: Benjamin Balasz / Wikimedia Commons / CC0 1.0

(KL) – Plus de 100 féminicides en France cette année, des femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, et un cri d’indignation traverse la France. Mais ce cri semble souvent hypocrite et détourne l’attention du fond de ce problème. Il est facile de s’indigner contre le crime le plus barbare qui puisse exister : celui d’ôter la vie à autrui ; et il est facile de s’indigner lorsque personne, de toute manière, ne penserait à s’exprimer en faveur de ces crimes odieux… Nous autres hommes ferions sans doute mieux de nous taire dans ce débat, le temps que les femmes puissent développer des propositions.

Actuellement, on entend beaucoup d’hommes se comporter en « dos argenté », en « protecteur des femmes ». « Oh p…, les hommes qui battent des femmes, ce sont de vraies lavettes », peut-on entendre. « Si j’en attrape un, je lui casserai la figure », disent ces hommes ; et il est difficile d’imaginer que ces hommes ne fassent pas partie eux-mêmes du vrai problème qui est celui des violences conjugales, dont les féminicides sont l’expression la plus abjecte et la plus odieuse.

En Allemagne, où le phénomène se situe à peu près au même niveau qu’en France, les autorités enregistrent tous les ans environ 140 000 violences conjugales. Mais considérant le rapport de l’OSCE de 2016 qui indique que seulement 11% des cas sont portés à la connaissance des autorités, on doit partir du principe que le vrai chiffre se situe plutôt vers 1,5 millions de cas de violences conjugales. Commises par des hommes au potentiel agressif, donc souvent ceux qui aujourd’hui promettent les pires des punitions physiques aux assassins. Mais se comporter en « Robin des Bois du canapé », comme protecteur des femmes, ne fait que montrer que ces hommes font partie d’un système de violences qui peuvent autant se tourner contre d’autres hommes, les femmes et les enfants.

Le rôle de l’homme dans la société n’est pas celui de « protecteur des femmes » – déjà, cette perception des choses traduit un sentiment de supériorité. Le rôle de l’homme dans une relation devrait être celui d’un partenaire qui ne songerait même pas à utiliser la violence physique comme moyen d’expression. Depuis le début de l’actuel débat autour des violences contre les femmes, les meilleures propositions viennent naturellement des femmes. Normal, puisque les victimes sont les mieux placées pour savoir par quelles mesures ce fléau pourrait être combattu.

Entendre des hommes au potentiel agressif parler de leurs fantasmes violents visant des meurtriers, cela n’a rien de rassurant, au contraire. Ceux qui ont des fantasmes violents sont aussi ceux qui peuvent devenir violents à la maison, souvent lorsqu’ils ont trop bu. Et on ne connaît que peu de cas où des hommes auraient exercé la violence contre leur voisin lorsqu’ils entendent celui-ci battre sa femme.

Pour les experts, l’endroit le plus dangereux pour une femme, c’est son propre foyer. Plusieurs propositions faites par des femmes dans le cadre de ce débat visent à rendre ce foyer plus sûr, par exemple en interdisant à l’agresseur de rester au domicile et en évitant ainsi aux victimes de violences de devoir quitter la maison, souvent avec des enfants, pour plonger dans une insécurité matérielle en cas de départ du foyer commun. Ce sont des propositions comme celles-ci qui engendreront un changement, tout comme celle d’intervenir le plus tôt possible dans l’éducation. Le vengeur qui veut faire la peau aux assassins n’exprime autre chose qu’un état d’esprit violent qu’il transmet également dans sa famille. C’est là qu’il faut briser la spirale de la violence.

Donc, Messieurs, au lieu de se comporter comme de bons hommes prêts à violenter leur environnement, ne serait-ce que pour « protéger » les femmes, taisez-vous et laissez les femmes nous dire comment améliorer la situation. Vos interventions, même si au départ, elles viennent d’un bon sentiment, ne font qu’aggraver les choses. Avec environ 1,5 millions de cas de violences conjugales, tout homme violent fait partie du problème, alors, arrêtez de faire semblant de pouvoir apporter une solution avec vos poings. Silence, Messieurs !

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