Festival de Cannes, 76e édition (6)
Esther Heboyan a vu pour vous “Killers of the Flower Moon” de Martin Scorsese – du pur et grand Scorsese !
(Cannes, Esther Heboyan) – Avec Killers of the Flower Moon, présenté hors compétition, Martin Scorsese arrive en grande forme sur la Croisette. Co-écrite avec Eric Roth, son adaptation du best-seller de David Grann raconte l’histoire des Amérindiens de la tribu Osage qui, dans les années 1920 en Oklahoma, s’enrichirent grâce au pétrole jaillissant de leurs terres. Une série d’images montre un groupe d’hommes exécutant une chorégraphie euphorique sur fond de musique rock. Le ton est donné et c’est du pur Scorsese – une accumulation d’effets visuels et sonores jusqu’au paroxysme, ensuite la détérioration de la situation énoncée. Les photographies en noir et blanc, comme extraites de films d’actualités ou bien d’albums personnels, attestant de la glorieuse ascension du peuple Osage, augurent d’un désenchantement inévitable. Scorsese nous a livré des récits d’une dureté inouïe. Killers of the Flower Moon ne dérogera pas à la vison de l’auteur de After Hours, Taxi Driver, Gangs of New York, The Irishman.
L’action dramatique démarre avec l’arrivée d’un train à Fairfax dans l’Oklahoma. À son bord, des ouvriers venus profiter de l’essor économique de la région ainsi qu’Ernest Burkhart (Leonardo DiCaprio), un vétéran de guerre d’allure farouche qui va essayer de se faire une place dans la demeure de son oncle William Hale (Robert De Niro), un exploitant de bétail qui, en réalité, terrorise la ville. De manipulation en manipulation, le naïf Ernest est amené à épouser et à profiter des richesses de Mollie Kyle (Lily Gladstone), une Osage qui sera de tous les combats jusqu’à l obtention d’une enquête qu’assurera l’agent FBI joué par Jesse Plemons.
Scorsese dit aimer les westerns et donne ici un western âpre qui rappelle les écrits de Jack London sur l’époque de la ruée vers l’or mais qui insiste sur l’inversion des rôles. Les Blancs, motivés par l’or noir de l’Oklahoma, assassinent les Indiens. Classés sans suite ou classés comme suicides, les meurtres sont enfin reconnus comme tels. Scorsese a engagé des acteurs Osages de l’Oklahoma, a donné à Tantoo Cardinal le rôle de la matriarche Lizzie qui regrette que ses filles épousent des Blancs, a immortalisé le visage noble et serein de Lily Gladstone, loin des stéréotypes du western classique. On finit même par croire à l’histoire d’amour avec son mari criminel.
Killers of the Flower Moon nous conte un épisode oublié de l’histoire nord-américaine et nous restitue toute la tristesse du peuple Osage en écho à la tristesse du peuple Noir dont la musique blues émaille le film.
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