France – Russie et cyberattaques

La louche et la loupe

Nikolai Patrouchev, le patron du CSN (Centre de Sécurité Nationale) russe Foto: Secretary of Defense/CC-BY-SA PD

(Marc Chaudeur) – Délicate, la frontière entre relation détendue et coopération… Le gouvernement et le président actuels sont-ils en train de la franchir, à l’occasion du traitement du problèmes des cyberattaques russes ?

Au plus haut niveau, tout le monde n’est pas d’accord avec Emmanuel Macron. Il semble fort que diplomates et services, dont ceux responsables de la sécurité du Président, ne soient pas du même avis au sujet des relations avec Moscou. Il semble.

Emmanuel Macron paraît manifester une grande attirance envers Vladimir Poutine. Invité par lui, le Premier ministre russe, Dimitri Medvedev, se trouvera sur le sol français les 24 et 25 juin prochains. Pas tout à fait d’accord avec ces solennités, estiment un certain nombre de voix au Quai d’Orsay ! Car c’est là une manière d’accueillir bras ouverts à Paris Vladimir Poutine, le dictateur russe, par sous-chef interposé…

A l’Elysée, de quoi vont parler Medvedev et Macron ? En tout cas, pour ce qui est du volet diplomatique, le Président français voudra faciliter la présence de Poutine au Sommet du G7, qui doit avoir lieu au mois d’août prochain à Biarritz. Par ailleurs, le poste d’Ambassadeur de France à Moscou est curieusement attirant (comprenne qui pourra…) : Sylvie Bermann y sera remplacée cet hiver. Par l’un des 3 postulants : Laurent Bili, responsable de la mondialisation au Quai d’Orsay, André Parant, secrétaire général adjoint du Ministère des Affaires étrangères, ou Pierre Levy, ambassadeur… à Varsovie depuis 3 ans. Varsovie qui convole ces jours-ci avec ses nouveaux F-35A américains.Varsovie qui voit d’un très mauvais œil l’apparent rapprochement entre France et Russie, tout comme les gouvernements des pays baltes, qui ont de bonnes raisons de s’en inquiéter…

Mais si les milieux diplomatiques s’agitent quelque peu (point trop n’en faut, pensent-ils !), du côté des services, il n’en est pas de même : on y manie la loupe et on y aperçoit bien la nécessité d’une réelle détente entre Paris et Moscou. A l’extérieur comme à l’intérieur. A l’extérieur, certaines sources de tension doivent être taries, et Paris cherche manifestement à s’attirer la bienveillance de Moscou pour traiter certains graves problèmes, notamment au Proche Orient. A l’intérieur, les problèmes que posent certains réseaux mafieux issus de pays limitrophes de la Russie pourraient être traités plus efficacement si les services coopéraient mieux.

Mais la question la plus chaude du moment est sans aucun doute celle des cyberattaques… Depuis le début de l’été 2018, le CSN russe que dirige Nikolai Patrouchev négocie avec le Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN) pour construire et maintenir une discussion permanente sur les questions de cybersécurité. L’ANSSI (Agence nationale de sécurité des systèmes d’information), autorité compétente en la matière, qui existe depuis 2009 et qui dépend du SGDSN, demeure réservée et prudente : à quoi servent ces discussions, cela reste encore bien peu évident, même si elles suscitent la bénédiction de Serguei Narychine, le dirigeant du SVR, le service extérieur russe.

Et malgré l’ire de Washington, qui s’irrite beaucoup actuellement de ce rapprochement franco-russe en forme d’entremets ou d’intromission, on ne sait encore très bien.

Après les ravages qu’ont causé ces dernières années les virus WannaCry, NotPetya et d’autres, le Quai d’Orsay, qui à l’extérieur, pousse des cris d’orfraie, a pourtant accouché fin 2018 d’ un Groupe de travail mixte sur la cybersécurité, que dirigent Patrouchev et Claire Landais, directrice du SGDSN. Compromis ou compromission ? Il s’agit en tout cas de désamorcer toute source de conflits. Mais pour n’être pas en position de faiblesse, les services français doivent aussi impérativement remonter aux sources mêmes des cyberattaques russes. Ce qui est très difficile.

Un feuilleton passionnant qu’il faudra suivre, en espérant que les initiatives françaises, épaulées autant que faire se peut (!) par l’ activités des services américains, pourront être couronnées de succès.

 

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