François Hollande aura besoin de John P. Kotter

Pour mettre en oeuvre la réforme territoriale, le gouvernement français devrait se faire aider par le spécialiste américain du «Change Management».

Change Management à l'Italienne. Où sommes nous ? Où voulons nous arriver ? Comment y arriver ? Foto: Alphamu57 / Wiki Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – En vue des discussions animées autour de la réforme territoriale en France, il serait peut-en France, il serait peut-être une bonne idée de regarder le modèle de l’économiste américain John P. Kotter sur le management des changements. Kotter, qui avait étudié au célèbre MIT à Boston, est professeur à la Harvard Business School. Son modèle du processus du changement comporte 8 étapes que l’on peut parfaitement adapter à la situation en France.

Etape 1 : Faire comprendre l’urgence du changement. Dans cette première phase, il s’agit de réveiller la conscience du public concerné. Le gouvernement a assez bien négocié cette première phase, communiquant sur la nécessité de rendre l’administration française plus efficace et moins onéreuse.

Etape 2 : Créer une coalition dirigeante. Là, les problèmes commencent. Créer un groupe de dirigeants qui porteraient ensemble le changement, cela est quasiment impossible en France. La question de la réforme territoriale est trop étroitement liée aux ambitions personnelles de très nombreux élus locaux, régionaux et nationaux. Chacun tente actuellement de défendre son intérêt personnel – ce qui rend cette 2e étape presque impossible.

Etape 3 : Développer une vision et une stratégie. Puisque l’étape 2 était déjà difficile, la phase 3 l’est encore davantage. Actuellement, la réforme territoriale ne suit pas une vision et encore moins une stratégie, mais elle est «bricolée», selon les possibilités de négociations avec les potentats régionaux dans différentes régions. Là, il ne s’agit plus d’un projet commun des régions en France, mais chacun tente de négocier le maximum pour sa région. Comme en Bretagne ou en Nord-Pas de Calais où la résistance contre la réforme était tellement virulente que ces deux régions resteront exemptes de la réforme. A partir de ce point, il ne s’agit plus d’une vision commune permettant de développer une stratégie de mise en oeuvre.

Etape 4 : Communiquer la vision. Encore faut-il en avoir une… En l’absence d’une vraie vision commune, la communication devient difficile. Actuellement, les 22 régions françaises ne travaillent pas POUR cette réforme, mais elles réfléchissent comment échapper à cette vision. Dans ce processus, la France s’éloigne de plus en plus du résultat escompté.

Etape 5 : Surmonter les obstacles. Puisque le projet de réforme n’est pas porté par les régions, ce ne seront pas les obstacles qui manqueront. Cette phase sera marquée par d’interminables négociations – chaque région tentera, sous l’impulsion d’élus locaux et régionaux qui craignent pour leur poste, d’obtenir plus que les autres, ce qui mine la solidarité nécessaire entre les régions. Ce sera dans cette phase que la réforme sera diluée. C’est aussi pendant cette phase que l’on saura si la réforme sera réalisable.

Etape 6 : Communiquer sur les réussites à court terme. Dans un processus de changement dans une entreprise privée, cette phase est plus facile à réaliser qu’au niveau d’un pays. Car le début de la réforme territoriale ne sera pas marquée par des succès à court terme, mais par des frustrations, des résistances et des compromis qui retarderont d’éventuelles réussites. Toutefois, si le gouvernement ne sera pas en mesure de communiquer des réussites de cette réforme, il risque de perdre l’adhésion de la population dans cette phase.

Etape 7 : Poursuivre les changements, ne pas relâcher les efforts. Cette étape nécessite un gouvernement fort, en l’absence d’une vraie «coalition dirigeante» qui n’a pas pu être créée pendant l’étape 2. Pendant cette étape, le gouvernement doit s’imposer, terminer les dernières résistances et approfondir les mesures qui mènent à l’objectif. Théoriquement, avec une majorité à l’Assemblée Nationale, au Sénat et dans les régions, le gouvernement devrait être en mesure de s’imposer. Théoriquement.

Etape 8 : Ancrer les changements dans la culture. Après les 7 premières étapes, il s’agit de la phase où tout doit être rendu étanche. Là, le problème sera le calendrier. Pour être crédible, la réforme territoriale doit être consommée au plus tard au printemps 2017. Tout le problème se situe là. Est-ce que le gouvernement saura s’imposer contre les résistances dans les régions ? En vue d’autres dossier moins importants, mais quasiment impossibles à réaliser (comme la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim), on est en droit de se poser la question si le gouvernement, qui manque terriblement de soutien dans la population, saura s’imposer.

Pour un projet d’une telle envergure, il sera crucial de faire appel à des experts qui ne se trouvent pas forcément dans les cabinets des politiques et encore moins dans les administrations. En vue du mauvais début de ce processus, on peut avoir des doutes quant à la mise en oeuvre de cette réforme territoriale.

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