#FreeFariba : Les batailles du hijab

Porté obligatoirement par les femmes depuis la Révolution Islamique, ce à quoi Fariba Adelkhah assignée à résidence à Téhéran s’est toujours pliée, le hijab est aujourd’hui au cœur des conflits entre progressistes et réactionnaires.

Même coloré et finement ouvragé, le hijab est un instrument de domination de la femme, lorsqu’une loi l’oblige à le porter. Foto: Classiccardinal / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Devenu l’un des pivots du rapport de force entre les citoyens progressistes et le gouvernement réactionnaire, le hijab fait couler de l’encre en Occident et du sang en Iran. En commençant par celui de Mahsa Amini, des suites de son arrestation par la police de la moralité en septembre dernier, pour port d’un voile mal ajusté. Début juillet, une loi voulue par le président Raïssi, avait alors imposé de nouvelles restrictions aux femmes, durcissant la loi en obligeant celles-ci à se couvrir non seulement les cheveux, mais aussi le cou et les épaules.

Cette année au mois de mars, inversant les rôles assignés par la morale islamique, de nombreux iraniens et notamment des étudiants, s’affichaient en public et sur les réseaux sociaux, coiffés d’un hijab. Le but était de se montrer solidaires des femmes et de ridiculiser le régime. Les pharmaciens de l’Iran Food and Drug Administration (IFDA) se sont également mis à porter le hijab. Ce que la journaliste opposante au régime Masih Alinejab, vivant aux USA et militant depuis 2014 contre le port du voile, avait initié en lançant en 2016 le hashtag #meninhijab, qui déboucha l’année suivante sur le mouvement « White Wednesdays ». La photo de Vida Movahed, une jeune femme brandissant son voile au bout d’un bâton en décembre 2017, restera dans l’Histoire.

Ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui la bataille du hijab, ou plus précisément les batailles du hijab, se joue sur plusieurs fronts. Alors que les dernières lois assimilent le fait de se dévoiler en public, à une menace envers la sécurité nationale, des actrices très populaires s’y opposent et en font courageusement les frais. Baran Kosari a été poursuivie pour non port du voile, alors qu’elle assistait à des obsèques. Ce qui est arrivé aussi à Shaghayegh Dehghan, plusieurs fois primée au festival cinématographique Fajr de Téhéran, qui se trouvant dans un café, ne portait pas de hijab. Il en a été de même pour Pantea Bahram, Afsaneh Baygan, Fatemeh Motamedarya et Katayoun Riahi. La dernière, qui publia une photo d’elle sans voile dès le 18 septembre 2022, soit deux jours après le décès de Masha Amini, avait alors ouvert la voie dans le monde du cinéma.

Début mai, Hashem Siami, le président de la Fédération Iranienne d’Athlétisme a démissionné, car comme l’a relayé Masih Alinejab sur Twitter, plusieurs athlètes ont participé tête nue à une course d’endurance se déroulant à Chiraz, au sud du pays. Pour mémoire, en novembre dernier, la championne de roller sur piste Niloufar Mardani, avait été vivement critiquée en Iran, alors qu’elle participait tête nue à une compétition se déroulant en Turquie. Le mois précédent, la grimpeuse Elnaz Rekabi avait déjà fait les frais de sa participation à Séoul au Championnats d’Asie d’Escalade, coiffée d’un simple bandana. Elle fut accueillie triomphalement à son retour par la population. Quant au pouvoir, qui a vécu une double humiliation, sa réaction ne s’est pas faite attendre : arrestation de la sportive, déclaration (très certainement sous la contrainte) que le son non port du hihab n’était pas intentionnel et… destruction de la maison familiale des Rekabi, au motif (très probablement fallacieux) qu’elle n’avait pas de permis de construire valide.

Le hijab n’est pas juste un morceau de tissu, et le porter ne relève pas des simples conventions sociales, comme voudraient le laisser entendre ceux qui, s’arc-boutant sur des principes religieux discriminatoires et machistes, essayent d’en minimiser les enjeux.

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