Grand Est : l’économie tente de résister à la crise sanitaire

Alain Howiller analyse pour nous les derniers chiffres publiés par l’INSEE – la situation se corse de plus en plus, mais les acteurs économiques sont déterminés à se battre. Est-ce qu’ils réussiront ?

Pendant que notre économie bat de l'aile, celle à Wuhan (photo) est en train de se relancer... Foto: CraigTheBrit / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Alain Howiller) – Rarement, une publication de « l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques – INSEE » aura trouvé un titre aussi évocateur d’une triste réalité ! « L’économie tente de résister à la crise sanitaire », a titré l’institut dans son numéro 25 (Janvier 2021) de la publication « Conjoncture Grand Est ». Comment d’ailleurs définir autrement l’évolution économique d’une année qui n’a cessé de pratiquer un système de « montagnes russes », alternant (relativement) bonnes et (très) mauvaises nouvelles, à la remorque d’une pandémie qui entend imposer son rythme.

« Vaincre le virus est la seule façon efficace de protéger l’économie et de protéger les populations des répercussions sociales », avait souligné ici même(1) Angel Gurria, le secrétaire général de l’O.C.D.E. qui évoquait le rôle que joueront les vaccins contre la Covid-19 : les angoisses, les affrontements nés, par exemple, en France ou en Allemagne, devant les aléas des livraisons des produits injectables, soulignent une prise de conscience parfois tardive, mais aujourd’hui bien réelle !

Eviter une terrible explosion sociale ! – Comme en écho, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, rappelle (DNA du 18.01.) : « L’économie est sous perfusion et quand ça va s’arrêter, on va constater les dégâts économiques, sociaux, psychologiques… Je crains vraiment la montée d’un chômage très fort. C’est maintenant qu’il faut anticiper les dégâts, accompagner les salariés, préparer les transitions professionnelles, prévoir des emplois aidés… Soit, on anticipe en cherchant des solutions ensemble, soit on attend que ça explose et là, ce sera terrible, ça emportera tout. « Nous ne laisserons tomber personne », avait affirmé Bruno Le Maire, le Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, qui multiplie les soutiens à l’économie alors que l’activité économique s’est légèrement redressée en Décembre : le PIB n’a reculé que de 7% par rapport à un an, alors qu’en Novembre il avait chuté de 11% par rapport au mois correspondant de 2019.

Par les temps qui courent, on s’accroche au moindre élément qui génère l’espoir : les prévisions de la Banque de France qui compte toujours sur une croissance de 5% en 2021 (+3,5% en Allemagne selon le DWI de Berlin), la forte progression des créations d’entreprise (+4% en 2020 par rapport à l’année précédente) figurent, sans conteste, au nombre de ces éléments ! Encore conviendrait-il ne nuancer les constats tirés du chiffre des créations d’entreprises : beaucoup de ces « naissance » ont été le fait de salariés fraîchement licenciés ou en chômage qui, avec leurs indemnités et des aides publiques, s’installent en autoentreprises : tiendront-t-ils ?

Et pourtant, on crée encore des entreprises ! – C’est la conclusion qu’on peut également tirer de la dernière note de conjoncture de l’INSEE qui note qu’au troisième trimestre 2020, la création d’entreprises portait (déjà) sur 13.910 unités dans le Grand Est, contre 12.000 créations durant la période correspondante de 2019 : il y a eu, parallèlement et paradoxalement moins de défaillances d’entreprises. Et s’il est vrai que les mesures de confinement qui ont redémarré le 30 Octobre se sont traduites par une diminution d’activité de -3% par rapport à Octobre 2019, le ralentissement a été moins fort que lors du premier confinement (Mars/Avril) où la diminution avait été de -30% par rapport à la période correspondante de l’année précédente.

Cela a notamment été le cas dans le Grand Est qui, comparé aux résultats nationaux, a été moins affecté par le deuxième confinement, même si, note l’INSEE la « chute de l’emploi dans le Grand Est a été plus forte (ndlr : exception faite du secteur de la construction) qu’au niveau national en 2019 (respectivement -1,4% contre -1,2%). Cette distorsion est imputable aux résultats des secteurs : agriculture, industrie et services non marchands. En Alsace, le repli de l’emploi a été plus fort (-2,1%) dans le Haut-Rhin que dans le Bas-Rhin.

Et la croissance reprend en… Chine Populaire ! – Sondant les chefs d’entreprise du Grand Est, la Banque de France (direction régionale de Strasbourg)(2) note : « … les niveaux d’activité enregistrés (ndlr : en Décembre) dans l’industrie restent inférieurs de 7 points par rapport à la normale. Les perspectives pour le mois de Janvier évoluent peu… » Et pour les services, la Banque relève : « … secteur d’activité fortement impacté par les mesures de couvre-feu succédant au confinement… ». Globalement, la note de conjoncture établit qu’on assiste à une : « …Accélération des cadences de production. Carnets de commande toujours décevants. Repli prévu de l’activité industrielle pour les semaines à venir. Stabilité de la demande et du nombre de prestations pour les services marchands avec des prévisions peu encourageantes à court terme… ».

Dans l’industrie qui représente un peu plus de 18% des salariés dans le Grand Est, la baisse attendue de l’activité, les carnets de commande en deçà des attentes pourraient se traduire par des réductions d’effectifs. En ira-t-il de même dans les services marchands (18,4% des effectifs salariés du Grand Est) où, en Janvier, on s’attend également à une baisse d’activité liée à une diminution de la demande ? L’économie tente, plus que jamais, de résister à la crise sanitaire !… Et en Chine Populaire, le quatrième trimestre 2020 a été marqué par un rebond d’activité de +6,5% : la croissance est repartie ! Et si, il y a un an, le 23 Janvier, Wuhan entrait dans l’Histoire en reconnaissant ses premiers cas de Covid-19, la Chine, pourtant, n’en a pas fini avec la pandémie : elle vient, notamment, de confiner 3 millions de personnes dans le Nord-Est du pays !…

(1) Voir eurojournalist.eu du 1.01.2021.

(2) Léon Sahuquet, 55 ans, a pris ses fonctions à Strasbourg comme Directeur Régional de la Banque de France pour le Grand Est : il était précédemment, à Orléans, Directeur de la Banque en Région Centre Val de Loire. Au cours de sa carrière, il a passé trois ans à la Banque des Règlements Internationaux (BRI) à Bâle. Il succède à Jean-Christophe Ehrhardt qui quitte Strasbourg pour Marseille où il prend la direction de la Banque en région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA).

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