Grèce : Et maintenant ?

Des vampires autour de l’Acropole

Cariatide, de Modigliani. La Grèce à bout de bras ? Foto: Bonhams/Wikimédia Commons/ PD

(Marc Chaudeur) – Elections européennes du 26 mai : le parti Syriza dirigé par Tsipras, gauche radicale (ou qui en était jusqu’en 2015), a été battu à plate couture par l’éternel vampire de droite, Nea Demokratia. Des législatives sont prévues pour le mois de juillet. Et maintenant ?

Il ne fait pas bon être grec au 21e siècle : pressuré entre les exigences exorbitantes de l’Union Européenne (de Wolfgang Schäuble et de la Troika), le maximalisme d’extrême-gauche du début du siècle et, last but not least, la corruption endémique des grands clans du pays, qui se réservent les grands monopoles de l’économie grecque… Que faire ?

En réalité, 3 élections avaient lieu en Grèce le 26 mai dernier : les Européennes, les régionales, les municipales. Aux Européennes, l’écart était de 10 points : 33% pour Nea Demokratia, 23 % pour Syriza. Lors des régionales, ND l’a emporté dans 10 des 13 régions de la Grèce, surtout dans les régions du nord du pays. Enfin, la droite va administrer les plus grandes villes du pays : Thessalonique et Athènes, où Kostas Bakoyannis, le neveu de Mitsotakis, le dirigeant du parti de droite, a emporté 43 % des suffrages.

Syriza paie ainsi l’austérité qu’il a imposée, certes de manière mouvementée et… dialectique, depuis le début de 2015. Elu pour réagir aux exigences imposées par la Troika (CE, BCE et FMI), Tsipras a fini par accepter de devenir l’agent d’une austérité à la Schäuble. Après avoir menacé les autorités européennes du Grexit pour imposer au moins quelques mesures sociales. Un calcul dangereux, puisque précisément, Wolfgang Schäuble était partisan de la sortie de la Grèce de l’UE : dans les calculs de cet épicier transcendantal, c’était : bon débarras ! On n’aurait plus à financer les errements de cette brebis galeuse !

Mais la Grèce, comme tous les autres Etats membres, ce n’est pas seulement un cordon de bourse : c’est aussi et surtout une population qui vit, qui souffre et qui survit… L’UE et surtout, la Banque Centrale Européenne, elles, ne partageaient pas cet aventurisme de boutiquier : expulser la Grèce de l’Union et de la zone euro, c’était mettre en danger l’ UE toute entière,pensaient-elles.

C’est en septembre 2015 que Tsipras avait, après un premier plan d’austérité, mis son pouvoir en balance en acceptant de nouveaux prêts (venus de grands créanciers grecs) en échange de la mise en œuvre d’un second plan d’austérité… Et ceci au grand dam, bien évidemment, de la majorité de ses électeurs ! Les Grecs, en effet, s’étaient prononcés lors d’un référendum et avaient rejeté cette austérité qui menaçait la survie même de milliers, voire de millions de Grecs.

Une contradiction récurrente dans l’histoire de la gauche, même radicale : élue contre la rigueur, contre l’austérité et ce que Tsipras nommait la « stratégie du nœud coulant » (plus on finance des mesures sociales, plus les créanciers serrent le nœud sur le kiki des citoyens), la gauche sert d’instrument à cette rigueur… Les Grecs n’ont pas suivi, cette fois, et ils ont donc préféré le modèle à la copie. A Bruxelles et dans la bourgeoisie affairiste hellène,on se frotte les mains : enfin, on va accélérer le règlement de la dette-serpent de mer !

D’autres raisons expliquent sans doute l’échec de Syriza ; notamment la mauvaise gestion de 2 catastrophes survenues l’an dernier : l’incendie de la station balnéaire de Mati (100 morts), et les inondations de Mandra (23 morts). Et surtout, le baptême bis de la Macédoine du Nord, contentieux que Tsipras et les dirigeants macédoniens ont réglé de façon admirable – mais qui a entraîné le départ des AN.EL (Grecs indépendants), parti souverainiste de droite qui gouvernait en coalition avec Syriza – le ministre de la Défense en était issu.

Que peut bien faire Tsipras, maintenant ? L’anticipation des Législatives, prévues pour le mois d’octobre mais qui auront lieu le 7 juillet, jouera en faveur de la gauche de Syriza ; elle limitera le carton que fera la droite de ND. Mais il n’est pas absurde de craindre une coalition de la ND et de cet autre parti dinosaure, le parti socialiste PASOK, aussi usé, corrompu et nocif que son vieux frère ennemi de droite, qui a rassemblé 7% des suffrages aux élections européennes.

Reste l’espoir que l’Union des centristes (EK) de Vassilis Leventi se rallie à Tsipras : ce qu’il a fait au début de l’année 2019, au nom de la lutte contre le conservatisme et la corruption. Un renfort plutôt modeste en nombre de voix, malheureusement…

Gia sou Syriza !

 

 

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