Guérir le monde

Jorge Mario Bergoglio, alias Pape François, fait une analyse intéressante des crises découlant de la pandémie de Covid-19.

Ici en visioconférence avec la NASA, Jorge Mario Bergoglio a aussi les pieds solidement campés sur terre. Foto: NASA / Wikimedia Commons / PD

(Jean-Marc Claus) – En février dernier, les Éditions Emmanuel publiaient un recueil de textes rédigés courant 2020 par Jorge Mario Bergoglio, infatigable octogénaire, plus connu depuis 2013 sous le titre et le nom de Pape François. « Guérir le monde » s’adresse évidement aux croyants, mais pas forcément à eux seuls, car chacun de ces huit textes contient des éléments appropriables par tout un chacun.

Ceci à condition bien sûr, de ne pas céder à la tentation laïcarde, maladie infantile de la laïcité. Ainsi, la dimension universelle de certains éléments de ces textes, n’échappera-t-elle pas à qui saura faire preuve d’un minimum d’ouverture d’esprit. L’étymologie de catholique (ϰαθολιϰὸς), ne nous renvoie-t-elle pas à la notion d’universalité ?

L’ensemble de ces textes témoigne indubitablement de l’influence de la Théologie de la Libération, sur celui qui s’y était un temps opposé. Comme quoi, il y aurait bien non seulement à tout péché miséricorde, mais nous avons ici la preuve que Jorge Mario Bergoglio n’est pas un imbécile, puisque seuls ces derniers ne changent jamais d’avis !

Il affirme d’emblée que la pandémie n’est pas le seul mal à combattre, mais qu’elle met en lumière de plus amples pathologies sociales, dont celles conduisant à voir en l’autre un objet, transformant ainsi l’humain en bien de consommation. (pages 15-16). C’est là qu’il met en avant « l’option préférentielle des pauvres » (pages 21-22) chère à la Théologie de la Libération que ses prédécesseurs, Jean Paul II et Benoît XVI ont ardemment combattu.

Faisant le constat qu’aujourd’hui quelques personnes très riches possèdent plus que tout le reste de l’humanité (page 29), il démonte la Théorie du Ruissellement en concluant, non sans cynisme : « Mais voilà ce qui se produit réellement : le verre commence à se remplir, et quand il est presque plein, il grandit, il grandit et grandit encore, et la cascade n’arrive jamais. » (page 71).

Se plaçant du côté de ceux qui attendent vainement la cascade, il invite à revenir à la solidarité. Mais pas une solidarité instrumentalisée à des fins de basse politique, comme ce fut le cas avec Karol Józef Wojtyła alias Jean-Paul II, soutenant sans aucune réserve le syndicat polonais Solidarność, avec l’appui d’un certain Ronald Reagan. Jorge Mario Bergoglio y voit la création d’une nouvelle mentalité pensant en termes de communauté de destin et de partage des biens communs (pages 36-37).

Pour lui, l’amour comprend les relations civiques et politiques. Or, comme nous sommes des êtres sociaux et politiques, l’une des plus hautes expressions de l’amour est précisément social et politique, ceci devant nous conduire à accroître le développement humain et à faire face à toutes les crises (pages 43-44).

Combinant approches contemplative et active, il invite à découvrir chez l’autre et dans la nature, des choses bien plus grandes que leur utilité (page 53), mais aussi à assumer nos responsabilités dans les processus de guérison nécessaires de la société. Ceci en n’excluant aucun groupe social de cette démarche (page 60), et afin que participation, soin et générosité soient récompensés plutôt qu’indifférence, exploitation et intérêts particuliers (page 72).

Autant de vœux pieux diront certains ; et si ce n’étaient pas là plutôt, autant de pieux plantés dans le ventre encore fécond de la bête capitaliste ?

Guérir le monde – Pape François
Éditions Emmanuel, Dépôt Légal 1er Trimestre 2021
83 pages, 5,90€, ISBN 978-2-35389-908-1

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