Guy Moll, un amoureux du Portugal

Réinstallé au Portugal en 1999, un enseignant français à la retraite, peint magnifiquement son pays d’adoption.

Scène de la vie quotidienne à Silves, en Algarve. Foto: Guy Moll / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – L’histoire d’amour que Guy Moll – homonyme d’un pilote automobile des années trente – vit avec le Portugal, remonte au début des années soixante. Salazar était au pouvoir depuis déjà trente ans, et pour qu’advienne la Révolution des Œillets, il fallait encore en patienter douze. Comme il l’explique dans « Courrier Expat », ce Colmarien qui étudiait alors à Strasbourg, s’est rendu en juillet 1962 à Cadaval, près de Lisbonne où l’avait invité un ami portugais pour les vacances.

Il y rencontra sa future femme qu’il épousa en 1964 et, à l’issue de son service militaire, revint à Lisbonne où il obtint un poste d’enseignant au Lycée Français en 1966. En ce temps-là on était majeur à 21 ans, ce qui correspond pour Guy Moll à l’année de son mariage. Il enseigna 12 ans dans ce lycée démocratique, en plein régime dictatorial. Lycée où se côtoyaient tant des jeunes issus de l’establishment fasciste, que de la gauche qu’il qualifie de « non officielle ».

Après avoir parcouru l’Europe, enseignant notamment à Vienne, Madrid et Barcelone, il s’est en 1999 fixé en Algarve, au Sud du Portugal, pour y vivre sa retraite en compagnie de son épouse. C’est là qu’il occupe une grande partie de son temps à peindre. Aquarelliste de talent, une partie de ses œuvres est accessible via internet, notamment sur son compte « Flickr » rassemblant 1.477 toiles et croquis, dont 156 consacrées au Portugal. Également passionné par la photographie, il réalise entre autres, des vues panoramiques saisissantes dont une partie est visible sur l’Internaute Vues panoramiques sur le Portugal.

Guy Moll raconte le Portugal par l’image, et visionner ses œuvres, tant picturales que photographiques, invite au voyage immobile. Chose d’autant plus intéressante en ces temps de pandémie et de réchauffement climatique, car au prix d’un bilan carbone minimaliste et en respectant la distanciation physique, l’esprit peut sereinement franchir les frontières en tous sens.

Ses tableaux et croquis, tant pour leurs thématiques que pour leur style pictural, n’ont rien de naïf. Ils racontent le quotidien de tout un chacun, comme par exemple dans une usine de liège à Tavira ou au marché couvert à Faro. Quant aux paysages, urbains comme à Lisbonne ou plus ruraux comme la route de Géres, très souvent y apparaît d’une manière ou d’une autre, l’élément humain. Ce qui se retrouve aussi dans certaines photos, et conduit à penser que pour Guy Moll, l’humain serait indissociable de l’environnement. Serait, car lui seul peut répondre par l’affirmative à cette supposition.

Toujours est-il, que ces œuvres picturales et photographiques contribuent très largement à mettre en valeur le Portugal, au point de peut-être venir s’y établir. Ce que les gouvernements successifs ont depuis 2009 facilité, entre autres pour les retraités étrangers à fort pouvoir d’achat, en les faisant bénéficier d’avantages fiscaux les exemptant d’impôts sur leurs pensions durant dix ans, tant au Portugal que dans leur pays d’origine. Système que le Gouvernement Costa a modifié très marginalement en 2020.

Mais Guy Moll n’est pas venu et revenu au Portugal pour s’approprier quoi que ce soit, au détriment de qui que ce soit. Il reconnaît sans détours certaines conséquences néfastes de l’installation d’étrangers à haut pouvoir d’achats, comme la hausse des cours de l’immobilier pénalisant les classes modestes des populations locales. Lui, quand il s’y est installé une première fois en 1966, l’administration salazariste l’avait alors accueilli comme un chien dans un jeu de quilles. Ainsi a-t-il aujourd’hui, plus que beaucoup d’autres, de très bonnes raisons d’y demeurer, car son œuvre apporte une plus-value culturelle à son pays d’adoption.

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