Hollande, au plus mal dans les sondages, sauvé par l’économie ?
Alain Howiller se pose la question si "le mieux" de l'économie française peut sauver les ambitions politiques de François Hollande
(Par Alain Howiller) – Il était difficile ces derniers temps de ne pas se pencher -une fois de plus- sur la situation économique de la France : les chiffres se suivaient et se rejoignaient pour appuyer l’optimisme affiché par François Hollande affirmant : « La France va mieux ! » (eurojournalist.eu du 4 Mai). Même la « Frankfurter Allgemeine » – qui partage généralement avec le « Handelsblatt » une propension au « french bashing » à l’allemande- relève dans ses colonnes : « Les manifestations contre la ‘loi travail’ paralysent nombre d’activités. Et pourtant à en croire les statistiques portant sur les premiers mois de cette année la croissance de l’économie française se poursuit. L’économie a même pris un élan surprenant au premier trimestre 2016 !… »
Et la Direction Régionale de Strasbourg de la Banque de France, jusqu’ici assez prudente -voire davantage- sur l’évolution de l’économie alsacienne note dans sa dernière analyse de conjoncture : « La production industrielle progresse en Mai soutenue par une hausse des commandes et la nécessité de reconstituer les stocks pour la période estivale. Une stabilisation est attendue à court terme. L’activité dans les services marque quelques signes d’amélioration et les perspectives sont positives pour les prochaines semaines. » Même la courbe du chômage donne, enfin, quelques signes positifs, au point que les prévisionnistes tablent désormais sur un taux qui se situerait en fin d’année à 9,5% de la population active en métropole (9,8% si on inclut l’Outre-Mer), en dessous du fatidique seuil des 10%.
Un taux de popularité à… 14% et pourtant !… – Le « mieux » survient au moment où tant François Hollande que son Premier Ministre sont tombés au plus bas dans les sondages : selon un sondage Odoxa, réalisé pour la presse régionale, l’Express et France Inter, seuls 16% des sondés considèrent que le premier est un « bon président » et 26% des Français considèrent que Manuel Valls est un « bon Premier Ministre » ! Pire, seuls 22% des Français pensent que la situation économique va se redresser d’ici au printemps 2017 et ils ne sont que 16% (-6 par rapport à Décembre 2015) à souhaiter que l’actuel président sollicite l’année prochaine un nouveau mandat présidentiel de 5 ans !
Un autre sondage réalisé par l’Ifop pour le Journal du Dimanche indique que le taux de popularité du Président se situe à 14% en Juin et celui de Manuel Valls s’établit à 21% : les deux perdent un point par rapport au mois précédent. Se rappelant, sans doute, qu’au début des sondages menés à l’occasion de la « Primaire de la Gauche Unie » qui devaient lui ouvrir la voie pour l’élection présidentielle de 2012, il était crédité de…. 3% des intentions de vote et comptant sur la poursuite du mouvement d’amélioration de la situation de l’économie française, François Hollande continue, pourtant, à croire à ses chances d’être présente au premier puis au deuxième tour de l’élection présidentielle des 23 Avril et 7 Mai 2017.
La « primaire » : un timing qui ne doit rien au hasard ! – Il lui faudra, bien sûr, remporter d’abord la « Primaire Socialistes-Radicaux de Gauche-Ecologistes de… gouvernement » et être désigné comme candidat aux élections présidentielles. Il pense l’être car il est persuadé que d’ici au mois de Décembre, la « courbe du chômage » aura concrétisé l’inversion annoncée et espérée, lui ouvrant ainsi la promesse de l’inversion réalisée, la voie vers la candidature ! Ce n’est pas un hasard si les inscriptions aux primaires sont prévues pour le mois de Décembre, peu après les « Primaires de la Droite » (les 20 et 27 Novembre), le mois au cours duquel Hollande compte annoncer sa candidature. Ce n’est pas un hasard si les élections à la primaire « socialiste » devrait avoir lieu les deux derniers week-ends de Janvier, un peu moins de trois mois avant le premier tour de l’élection présidentielle : le « timing » est bien choisi pour lancer une candidature !
Ce n’est pas un hasard non plus si le Premier Secrétaire du Parti Socialiste (qui n’a pu agir sans l’accord du Président de la République) a attendu que les vents mauvais de l’économie tournent un peu laissant espérer un revirement plus profond, pour obtenir une adhésion du Parti -et de François Hollande- à l’idée de l’organisation de « primaires ». Il est vrai que tant le FMI que l’INSEE ou le Ministère des Finances ont fourni les munitions pour une éventuelle « canonnade », sur le mur des élections présidentielles.
Les prévisions de ceux qui y croient ! – Le Fonds Monétaire International FMI a revu à la hausse ses prévisions de croissance pour la France : elles devraient s’établir à +1,5% en 2016, corrigeant ses prévisions initiales (+1,1%). L’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques INSEE estime que le Produit Intérieur Brut (PIB) devrait progresser de 1,6% alors que le Ministère des Finances table sur une progression de 1,5% (au lieu du 1,2% obtenu en 2015). La consommation des ménages (+1,6%) servie par le pouvoir d’achat (+1,7% attendus cette année ; 1,5% réalisés en 2015) une reprise constatée de la production industrielle (+1,2%), une reprise de l’intérim et la création d’emplois (190.000 créations d’emplois attendus cette année, contre 160.000 créés sur un an), une reprise des investissements (+4,7% attendus cette année) justifient les espoirs placés en un redressement économique. Sera-t-il suffisant pour légitimer les ambitions présidentielles de l’actuel locataire du Palais de l’Elysée ?
Un certain nombre de fragilités subsistent, susceptibles de peser sur les résultats français et sur l’évolution politique que j’ai approché aujourd’hui. Au-delà des éléments positifs dégagés, on s’attend cette année, à un recul des exportations : le déficit commercial pourrait atteindre 55 milliards d’Euros (contre 46 en 2015, marquée par une forte progression des ventes d’armement). Personne ne peut réellement prédire quelle pourrait être l’impact d’un éventuel « Brexit ».
Le poids de la croissance européenne. – Quel sera, au final, l’impact des grèves auxquelles l’économie a du faire face ? Quels effets auront les inondations et le mauvais temps qui sévit depuis des semaines ? Quel effet la campagne électorale qui, de fait, s’est déjà engagée, aura-t-elle sur l’économie ? Autant de questions qui pourront avoir un impact sur l’évolution du pays et sur les décisions que prendront, le moment venu, les citoyens-consommateurs et… électeurs !
La croissance européenne (+1,7% dans la zone euro attendus en 2016, sous réserve d’un éventuel effet « Brexit ») aura, elle aussi, un effet sur la croissance française ; elle jouera, en particulier en Alsace où la marche des affaires et le marché du travail intègrent fortement les évolutions relevées dans les pays voisins, Allemagne et Suisse.
La conjoncture y reste favorable et les taux de chômage continuent de rassurer (6% en Allemagne, 3,7% au Bade Wurtemberg, 3,4 en Bavière, mais 3,3% dans l’Ortenau, et d’après les derniers chiffres connus : 3,6% en Suisse dont 4,3% à Bâle-Ville et 3,1% dans le canton de Bâle-Campagne).
Hollande compare ses 3% avant 2012 et ses 14% avant 2017 en oubliant une chose : entre temps, il a gouverné et il a montré qu’il ne se sent nullement engagé ni par un programme (politique de libéralisation et de casse des solidarités des salariés qui ne faisait pas parti de ses “engagements électoraux”) ni même par des principes (discours nationaliste, politique liberticide).
“Votez pour moi! vous verrez bien plus tard ce que je ferai de mon mandat! les autres sont encore pires!” : est-ce vraiment un bon argument?
Les anciens des IEP (Sciences po) et a fortiori les anciens de l’ENA, même les recalés, se souviennent encore des théories des cycles économiques ( période d’expansion suivie d’une dépression): cycles courts pour Juglar (autour de 10 ans), longs pour Kondratieff ( autour de 50 ans et+) et une multitude de petits, souvent sectoriels. F. Hollande y croit-il depuis ses études?
Après la pluie le beau temps?
Kondratieff lui y a cru, prévoyant une nouvelle expansion après la grande dépression dans le monde capitaliste, donc pas de grand soir. Staline l’a fait fusiller pour hérésie économique! Aucun rapport bien sûr.
Merci à Alain Howiller pour cette analyse globale bien étayée avec un zoom peu réjouissant sur la Région du Rhin Supérieur.