Hongrie : A babord toute !

Primaires de la gauche pour la mairie de Budapest

Attila, le grand ancêtre de Viktor Orban Foto: Csanady / Wikimédia Commons / CC-BY-SA PD

(Marc Chaudeur) – Curieux : c’est un membre du Fidesz, le parti national-populiste dominant dans l’ensemble de la Hongrie qui occupe la mairie de Budapest. Pourtant, la ville dans son ensemble est plutôt libérale… Pour remédier à cette anomalie, la gauche va choisir son meilleur candidat à l’issue de primaires qui auront lieu prochainement. Afin de soustraire la population au populisme.

Socialistes du MszP (Parti socialiste hongrois) et écologistes du Párbeszéd (Parti pour le Dialogue) organisent des primaires qui décideront en un premier temps du choix entre leurs deux champions. Les deux partis sont réunis en une coalition ; le vainqueur gagnera l’accès à une primaire plus large qui cette fois, départagera entre ce vainqueur et le candidat du parti centriste, LMR, pour vaincre la droite lors des élections locales qui auront lieu à l’automne prochain dans cette capitale de 1 million 800 000 âmes.

Les champions, c’est l’écologiste Gergely Karácsony, 43 ans, un homme sympathique et plutôt charismatique, codirigeant du parti Párbeszéd (avec notre chouchoutte Timea Szabó), maire actuel du 14e arrondissement de Budapest, député de 2010 à 2014. C’est ensuite le socialiste Csaba Horváth, qu’on peut situer au centre gauche – le MszP est un parti plutôt divers où cohabitent un nombre assez important de « plateformes » (ce que les socialistes français appellent des « courants » et que les mauvais esprits appellent « courants d’air »).

Le premier débat entre les deux prétendants a eu lieu dimanche dernier le 20 janvier, au Danubius, dans le 11e arrondissement de la capitale. Les deux hommes se sont couverts mutuellement de fleurs, comme dans cette chanson de Lou Reed (« Vicious, you hit me with flowers ! »). C’est ainsi que Horváth a déclaré : « Si je gagne, je voudrais dire que je tiens à travailler avec Gergely, pour l’avenir de Budapest ! » Et le brave Karácsony a répliqué un peu plus tard : « Je sais que je peux compter sur Csaba si c’est lui qui gagne ». Voilà qui est bien.

Echange de gentilles friandises, donc, et les problèmes de fond n’ont été qu’effleurés. En revanche, les critiques ont plu très dru sur le maire Fidesz de Budapest : « Orbán et Istvan Tarlós ont mené une guerre contre Budapest durant ces 9 dernières années » ; « Ils ont abîmé la capitale et ils servent surtout les intérêts des hommes du gouvernement !» ; et puis « Nous construirons Budapest avec les habitants, en tenant compte de leurs avis pour toutes les décisions importantes » !

Seul désaccord affiché : l’opinion respective des deux hommes quant à l’éviction du dirigeant de la Régie municipale de transports (BKK), David Vitézy, qui a développé de façon admirable le tram et le vélo dans une ville naguère très enfumée – et que Tarlós a expulsé de son poste en 2014, à cause de profonds désaccords. Est-ce important ? Oui, parce que dans cette histoire se niche (une fois de plus) l’influence russe : en 2014, il fallait choisir entre remplacer les rames du métro 3 de la ville ou leur rénovation. Vitézy a choisi le remplacement – mais il avait ainsi empêché la firme russe Metrovagonmas d’exercer ses talents généreusement rétribués… Vitézy est évidemment un anti-russe primaire : en 2013, il était allé jusqu’à se permettre d’exprimer devant une délégation russe son souhait d’un appel d’offres clair et sans ambigüité ! C’est vous dire !

En tout cas, on peut voir que la contradiction qui s’est fait jour lors du premier débat des primaires n’est ni superficielle, ni artificielle : si le socialiste Horváth ne regrette pas le départ forcé de Vitézy, eh bien, l’écologiste Karácsony, si ! « Vitézy a fait un excellent travail, a-t-il déclaré, et les Budapestois devraient lui en être reconnaissants ». Un désaccord étrange et sans doute significatif…

On l’a dit plus haut, cette primaire est le prélude à une primaire plus large : en effet, entre le 28 janvier et le 3 février, il s’agira de départager entre le gagnant et le dénommé Robert Puzsért, candidat proclamé du parti dont Párbeszéd est issu : le LMP ( La Politique peut être Différente). Un parti centriste, écologiste et libéral (eh oui), plutôt conservateur – et qui est membre observateur du Parti vert européen au Parlement européen.

Mais cette liste gauche- centre gauche a-t-elle quelque chance de l’emporter contre Tarlós, qui occupe le fauteuil baroque de la mairie depuis dix ans ?

Un sondage paru récemment dans le magazine hebdo HVG indique que face à Istvan Tarlós, Karácsony ferait le score de 43 % contre 49 % ; Horváth, lui, ferait 33 % contre 53 %. Quant à Robert Puzsért, il ferait 19 %. La popularité du maire Fidsz est donc encore grande. Mais il faut miser sur les gros problèmes sociaux qui agitent la Hongrie depuis début décembre et qui fait descendre des milliers de citoyens dans la rue, pratiquer des débrayages éclair, bloquer les routes
La population a compris l’énormité de la démagogie populiste de Viktor Orbán et souhaite visiblement le changement.

Des espoirs sont permis. Pas tous, mais beaucoup !

 

 

 

 

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