Iberolux Perpetuus

Concept déjà ancien, l'idée d'un rapprochement formel entre Espagne et Portugal est remise au goût du jour dans la Péninsule Ibérique.

Géographiquement, la proximité entre l'Espagne et le Portugal coule de source... Foto: Diego Homen / Wikimedia Commons / PD

(Jean-Marc Claus) – Vieille lune remontant au 18ème siècle, l’idée d’une union économique hispano-portugaise ou lusitano-espagnole, selon le point de vue d’où l’on considère la chose, est récemment réapparue dans le débat par le truchement de Rui de Carvalho de Araújo Moreira, homme d’affaires et actuel maire de Porto. Se fendant d’un néologisme inspiré de l’union douanière du Benelux fondée en 1944, o Presidente da Câmara Municipal do Porto fait désormais activement la promotion de l’Iberolux. Idée défendue naguère par des intellectuels ibériens tels que l’écrivain et polémiste Fernando António Nogueira Pessoa (1888-1935), le journaliste et écrivain José de Sousa Saramago (1922-2010), l’écrivain et psychiatre António Lobo Antunes (1942-2007), le poète et romancier Miguel de Unamuno  (1864-1936), le philosophe José Ortega y Gasset (1883-1955), ce rapprochement entre les deux pays se partageant la même péninsule n’est pas une chimère.

Les collaborations fructueuses, plus particulièrement entre régions frontalières, n’ont pas attendu l’arrivée d’un néologisme pour expérimenter le concept. Comme le rapporte El País dans son édition du 7 février 2020, pour le maire de Porto, « il n’y a plus de frontières entre le nord du Portugal et la Galice, une communauté où, comme en Estrémadure, des milliers d’écoliers espagnols étudient le portugais. ». Dans le même esprit, quand ils y trouvent un avantage, Espagnols et Portugais n’hésitent pas à franchir la frontière, afin de bénéficier de prestations des aéroports de Vigo et de Porto. Comme souvent, ce sont les peuples des régions frontalières qui, après avoir souffert des antagonismes anciens entre leurs pays respectifs, font preuve d’assez de résilience pour, une une fois la paix revenue, aller de l’avant. Évidemment, les cocardiers nationalistes ne sont pas aux abonnés absents,  notamment en Espagne.. Espérons que l’Histoire ne les acquittera pas…

La Péninsule Ibérique ne peut cependant se résumer à, d’un côté 10,3 millions de Portugais, qui ont vue imprenable sur l’Océan Atlantique, et de l’autre 46,7 millions d’Espagnols, qui ont vue tant sur la Mer Méditerranée que sur l’Océan Atlantique. Deux positions géographiques facilitant autrefois une concurrence effrénée des deux pays, lancés notamment à la conquête du Nouveau Monde. La Péninsule Ibérique, c’est surtout 57 millions d’individus, à la fois semblables et dissemblables, comme le souligne El País dans sa rubrique Verne où le 18/02/2020 sont restitués les témoignages de 8 Ibères âgés de 28 à 54 ans, en totale parité tant de sexes que de nationalités, avec pour point commun d’être originaires d’un pays et de vivre dans l’autre.

Il ressort, entre autres, des interviews de Franscisco, Laureana, Angela, João, Flor, Rafa, Inés, Antonio, que Portugais comme Espagnols, aiment bien manger et faire la fête, se mettent à table pour déguster des plats souvent très similaires, ne sont pas avares sur les pourboires, si toutefois le service s’avère satisfaisant, cultivent une même passion pour le football.

En revanche, dans leurs rapports à la vie et aux autres, des différences sont pointées par les interviewés. Les Portugais, moins vifs que les Espagnols, prennent plus le temps de vivre, d’où un certain manque de ponctualité agaçant leurs voisins. Au volant, les Portugais sont moins respectueux des passages piétons et roulent plus vite que les Espagnols ! Moins extravertis et plus distants que les Espagnols, les Portugais ne font pas systématiquement la bise à leurs collègues. En revanche, dans le monde du travail, les rapports peuvent être plus brutaux en Espagne qu’au Portugal. Contrairement à l’Espagne, où les mouvements féministes sont très actifs, au Portugal le machisme a plus d’emprise sur la société.

Au cours de l’Histoire, les Espagnols ont, à tort, regardé les Portugais de haut. Au Portugal, le rapport des clients aux vendeurs ou serveurs, n’est pas condescendant,  comme on peut l’observer en Espagne. Les Portugais, peut être plus enclins à la saudade, sont plus discrets, moins bruyants, mais aussi moins optimistes que les Espagnols. Il est à noter que dans les huit interviews, faisant preuve d’un savoir-vivre équitablement partagé, chaque personne critiquait son pays d’origine et non celui qui l’accueillait…

Carte des côtes de la péninsule ibérique et de l’ouest barbaresque, par Diogo Homen

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