Il n’y aura donc pas d’été magique…
… l'emploi continue de souffrir ! Alain Howiller se penche sur l'évolution du marché de l'emploi.
(Par Alain Howiller) – Il n’y aura donc pas d’été magique pour reprendre le titre d’un film (assez quelconque, il est vrai !) de Rob Reines, sorti en 2012 et les Français ont retrouvé leur quotidien après cette finale ratée d’un EURO 2016 qui les aura passionnés. Pour ceux des habitants du Centre Est qui ne sont pas en vacances (les autres auront le temps d’en prendre connaissance à… leur retour !), ils auront eu le privilège de découvrir -sans surprise particulière- la dernière note de conjoncture publiée par le « Conseil Economique, Social et Environnemental (CESER) du Grand Est », l’assemblée des socio-professionnels de la région « Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine » (appelée désormais Région Grand Est). Dans sa note, le CESER relève : « Ce second Tableau de Bord met en évidence quelques indicateurs dans le vert, même si ceux-ci ont toujours peu d’influence sur l’emploi… ».
Triste confirmation de ce que je relevais ici même (eurojournalist.eu du 4 Mai) en concluant, alors, mon article par cette remarque : « Globalement, l’économie française va mieux : les représentants du gouvernement ont raison de l’affirmer. Mais ce mieux est-il « significatif » ? Et surtout est-ce suffisant pour affirmer que l’économie française est enfin sortie de la crise et du chômage massif ?… » La question se pose d’autant plus que d’après les derniers éléments fournis -sur un plan national- par Pôle Emploi, le chômage a subi une poussée de fièvre en Mai, après deux mois de tassement : il est vrai que sur un an, le chômage s’inscrit à un moins 1% modeste, chiffre qui reste à moins 2% sur trois mois. Pas de quoi crier son enthousiasme, même si la tendance est à une légère amélioration globale.
Les nouvelles régions, porteuses d’espoir ? – Les créations d’emplois qui sont relevés dans le tertiaire (y compris dans le service aux entreprises) ne compensent pas les destructions d’emplois dans le secteur industriel. Et l’exemple du Grand Est est significatif à cet égard, comme le relève le CESER : alors que l’industrie représentait 19,2 % de la valeur ajoutée en Région du Grand Est et que l’industrie manufacturère (hors énergie, eau, déchets) y représentait 16,7% des emplois salariés du privé, « la Région Grand Est a perdu », note le CESER, « près de 110.000 emplois entre 2007 et 2013… La perte de 7.000 emplois dans l’industrie sur un an souligne l’urgence de solutions innovantes et concrètes sur le territoire afin de faire face à la désindustrialisation ».
Si la majeure partie des solutions ne peuvent qu’être gouvernementales car relevant de la politique générale de l’Etat vis à vis des entreprises, les nouvelles régions pourraient apporter une contribution non négligeable à la création d’emplois par la réindustrialisation : à condition -ce qui est loin d’être garanti- que l’Etat ne se contente pas de confier aux régions une responsabilité d’animation et de pilotage de l’économie sans leur transférer les moyens correspondants à leur nouvelles missions.
Vent debout contre une taxe « Richert » ! – La polémique née de la création annoncée d’une nouvelle « taxe d’équipement régionale » destinée à financer les missions que les Régions ont hérité de l’Etat dans le domaine économique est significative à cet égard. Cette taxe perçue sur les ménages et les entreprises devrait figurer dans la loi de finances 2017 et être approuvée par le Parlement !Elle figure dans un accord signé entre Manuel Valls, le Premier Ministre et Philippe Richert, Président de la région du Grand Est, en sa qualité de Président de l’Association des Régions Françaises (ARF). Attaqué sur cet accord qui crée ce que certains ont déjà baptisé « la taxe Richert » (!), le Président de l’ARF réagit en soulignant qu’il croyait, de bonne foi, que cette taxe qui rapporterait 600 millions d’euros (sur les 800 millions réclamées par l’ARF) serait perçue sur les recettes générées par la « taxe carbone ». Elus, chefs d’entreprise, particuliers se sont élevés avec vigueur contre toute nouvelle taxe qui viendrait contredire l’engagement pris par le gouvernement et le chef de l’Etat de ne plus créer de nouveaux impôts !
Dans la tâche qui lui a été dévolue en matière d’économie, le Grand Est allie mesure en faveur des entreprises (participation aux capitalisations en fonds propres des entreprises, soutiens aux créateurs et repreneurs d’entreprises, aides à l’innovation etc…) mais aussi des salariés sur le plan de l’aide à l’emploi transfrontalier et à la formation/reconversion. Dans le cadre d’une convention de partenariat Etat/Region, le pilotage de la mise en oeuvre régionale du « Plan 500.000 emplois » doit permettre l’accès à la formation pour 75.000 (au lieu de 49.000 en 2015) jeunes ou adultes demandeurs d’emplois. Ces mesures à court terme doivent relancer la création d’emplois par des implantations, des reconversions, des reprises et poursuivre la lutte contre le chômage grâce à la formation.
Le poids des « métropoles » du Grand Est. – A moyen terme, c’est la définition -engagée- du « Schéma Régional de Développement Economique, d’Innovation et d’Internationalisation – SRDEIII » qui doit aider la Région à se redéfinir sur le plan économique, de déterminer les enjeux sur le plan de la croissance et de l’emploi, de conclure les accords nécessaires avec les métropoles de la Région (Strasbourg, Nancy, Metz) et les inter-collectivités, de définir -en liaison avec les collectivités des Etats voisins- les règles concernant la coopération transfrontalière.-
Les actions engagées ne créeront certes pas cet « été magique » dont je rêvais plus haut, mais elles devraient participer à la création d’une dynamique qui pourra s’appuyer sur les signes de pré-convalescence économique déjà enregistré : pour la première fois depuis plusieurs années, le nombre des travailleurs frontaliers au profit du Luxembourg, de la Suisse et de l’Allemagne a légèrement progressé, relève la note du CESER qui souligne par ailleurs que, grâce notamment aux exportations et à l’interim, le chômage a fléchi au cours des trois derniers mois, au contraire de la tendance enregistrée au plan national. Mais tout reste fragile et insuffisant pour nourrir une véritable -et durable- inversion de la courbe du chômage.
Valls à la Foire de Strasbourg en Septembre. – Il reste à espérer qu’à la sortie de l’été la croissance se fortifie davantage. « Pour que cette inversion ait lieu, il faudra que se retrouve, chez les chefs d’entreprise comme chez les consommateurs, une constante qui ne se décrète pas : la confiance. Viendra-t-elle soutenir les frémissements relevés ? Les amplifiera-t-il ?… » Curieusement -et cela n’est pas rassurant- c’est ce que j’écrivais, il y a un an (eurojournalist.eu du 22 Juillet). Je ne peux -hélas- que conclure de la même manière !
En attendant que le 2 Septembre l’inauguration par Manuel Valls de la 84ème Foire Européenne de Strasbourg nous permette de dresser un bilan de l’été et d’esquisser des perspectives (qu’on espère enfin rassurantes) sur un automne qui amorcera en fait la… campagne pour les élections présidentielles des 23 Avril et 7 Mai 2017. En attendant, passez un bel été !
Attendons donc la Foire!