Intramusiques

Pierre Durr, un trafiquant de musiques contraires au bon sens.

Pierrot le Fou, Pierrot le Sage Foto: Rédaction

(MC) – Il s’en passe, des choses, entre les oreilles de Pierre Durr, depuis des décennies… Et il en est passé, des choses ! Des choses diverses, déjantées, moelleuses ou stridentes, cahotiques ou éthérées, mais en tout cas zinzins comme tout. Le Festival MUSICA nous a donné les moyens de le faire parler.

Dans les années 1990, Pierre Durr était notre enthousiaste et généreux fournisseur en disques inconnus, underground et introuvables venus des pays baltes et des pays scandinaves ; des publications souvent très étonnantes… Pierre, en octobre 1983, a fondé avec Bernard Parent une émission sur Radio Bienvenue Strasbourg. Une émission vouée aux musiques autres ; aux musiques étranges, celles qu’on ne connaît généralement pas, qui offensent scandaleusement le bon goût et qu’il est bien difficile de classer – et d’autant plus intéressantes. Cette émission, qui s’appelle Intramusiques ( https://www.radiorbs.com) est programmée chaque dimanche matin de 10 heures à 11 heures. Au départ, elle durait 3 heures et se faisait avec Stéphane Ollivier. Et puis, ce dernier (mais à peine moindre) est parti créer l’émission Chant des Mammouths.

A l’origine, il y a la passion de Pierre pour le rock qu’on peut qualifier d’ « alternatif » : des groupes pas ou très peu diffusés, extérieurs au main stream commercial. Surtout pour Rock in Opposition, cette sorte d’agrégat nimbocumuleux né en Grande-Bretagne sous la baguette magique de Chris Cutler et de son groupe mythique, Henry Cow, et regroupant une dizaine de groupes européens auto-produits. De ceux dont les noms ont fleuri notre adolescence : Art Zoyd, Etron Fou Leloublan (si si), et d’autres (encore) moins connus comme le groupe suédois Samla Mammas Manna (qui a fait cependant un concert au Maillon au début des années 1980). On peut faire du rock autrement, et Pierre est l’un de ceux qui ont compris tôt qu’on pouvait le diffuser autrement.

Peu à peu, parallèlement au développement du Festival MUSICA, Pierre a programmé toujours davantage de jazz improvisé, de musique « contemporaine » et électroacoustique.

Intramusiques noue des partenariats en relation avec l’actualité musicale ; l’émission puise aussi sa programmation dans le Festival MUSICA ou bien encore, développe des thématiques choisies : labels, instruments, ou bien événements non musicaux. Par exemple, à la fin des années 1990, au moment de la finalisation du Jardin des Deux Rives, ce furent deux semaines sur le Jardin. On a donc pu se régaler avec des œuvres de Kaija Saariaho (Private Gardens), Popol Vuh (nostalgie…), Tusk et d’autres… Un miam musical remplaçait le miasme radiophonique habituel.

Pierre Durr complète son activité débordante par une collaboration active à l’excellente revue musicale trimestrielle intitulée… Revue et Corrigée, qui se définit comme « surface écrite de pratiques sonores expérimentales ». Entre autres méfaits, des gens de la Revue fréquentent le fameux festival de Vandoeuvre depuis 3 ans ; ils y proposent des chroniques live, c’est-à-dire des présentations d’extraits de disque parus tout frais ou non. La revue, très épaisse, en est à son n° 117. Fondée à Grenoble en 1989, elle est basée à Lille depuis 2014 (https://www.revue-et-corrigee.net)

Dès la fin des années 1970, Pierre a centré principalement son activité de dénichage sur l’Europe. Il s’est mis à importer des disques qui ne l’étaient nullement en France : à partir de la Norvège, de la Suède, de la République Tchèque… Il a ainsi constitué une très importante discothèque de la musique « alternative » des années 1970 et 1980, avant l’apparition des Cds déjà.

Pierre estime que l’activité musicale à Strasbourg est plutôt satisfaisante, bien qu’un peu moins vivante qu’il y a quelques années : par exemple, naguère, avec les Percussions de Strasbourg, d’assez nombreux concerts de musique « contemporaine » étaient programmés, de manière pointue, au MAMCS – mais ils se sont éteints comme une espèce de ptérosaures non viables, faute d’auditeurs. Et la municipalité se montre moins enthousiaste. Mais dans notre bonne ville paisible et tout et tout, il existe de nombreuses occasions d’écouter diverses musiques expérimentales.

Et n’oublions point : dans 15 jours, du 17 au 21 octobre, se tiendra ici même le Festival de musique électroacoustique Exhibitronic (https://exhibitronic.eu) qui investira lui aussi plusieurs lieux strasbourgeois. Par exemple, nous pourrons y entendre les grenouilles guyanaises de Thomas Tilly – mais nous vous laissons la surprise de les découvrir, hin hin. Intramusiques sera là, en tout cas, et bien là !

Eh bien : n’oublions point d’écouter Intramusiques chaque dimanche matin après la messe !

Lien : https://www.radiorbs.com et IntraMus@aol.com

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