Irlande : Le Jour viendra

Bientôt le Référendum pour la réunification ?

" Notre revanche, demain : les rires de nos enfants " Foto: Olaf Baumann/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/2.0Germany

(Marc Chaudeur) – Le Brexit a considérablement changé la donne en Irlande, et particulièrement en Irlande du Nord. L’étroitesse d’esprit des nationalistes brexiteers a mis en évidence des liens que parfois, à l’étranger, on soupçonnait à peine. Et le Sinn Fein, grand vainqueur des dernières élections, demande la tenue d’un référendum d’ici trois ou cinq ans. Avec des chances de victoire ?

Le Brexit a apporté des bouleversement considérables en Irlande du Nord. Le DUP lui-même, qui se montrait plus anglais que les Anglais,qui a longtemps soutenu les partis britanniques et surtout les Conservateurs, s’est récemment recentré sur l’identité en somme irlandaise de ses membres et ne se montre plus nécessairement opposé au Référendum.

A cela, plusieurs raisons : au fil des années, et surtout depuis le Good Friday Agreement de 1998, les Unionistes (protestants dans leur écrasante majorité) ont tissé des liens de plus en plus fréquents et étroits avec la République d’Irlande – au point que ces relations finissent souvent par l’emporter sur l’union sacrée avec Londres : beaucoup se rendent bien plus souvent à Dublin que dans la capitale des Brits. Le DUP entretient par ailleurs des liens non négligeables avec les agriculteurs nord-irlandais : or, ceux -ci sont farouchement partisans de la PAC, dont ils profitent en effet très largement.

Et ils se sont sentis négligés, voire trahis par les troupes des brexiteers de Boris Johnson et consort. Ceux-ci ont ainsi réussi à réveiller la fibre vieille-irlandaise des protestants, par leur exclusivisme et leur étroitesse de nationalistes anglais. A Dublin, le Taoiseach (le premier Ministre, en l’occurrence Leo Varadkar), en général si modéré et si cauteleux, se déclare favorable à la consultation ; mais surtout, Peter Robinson, la figure de proue des Unionistes, a déclaré tout récemment qu’il « accepterait les résultats du Référendum » ! Inconcevable voici encore cinq ans.

Selon les sondages de 2016, 56% des Irlandais du Nord désirent rester dans l’Union européenne. Le Sinn Fein, parti catholique de gauche qui passait pour (et l’était réellement) l’édredon parlementaire de l’IRA, surfe sur ce courant favorable pour presser à la roue. Le Sinn Fein a remporté 37 sièges au Dail, la chambre basse du Parlement irlandais – ce qui ne suffit pas pour gouverner, mais installe une solide influence sur tous les partis en présence. La dirigeante du parti, Mary Lou Mc Donald, une personne déterminée et cultivée, réclame ainsi la tenue de la consultation dans « 3 ou 5 ans » (interview du Times, le 14 février dernier).

Peut-on espérer une issue favorable à un tel Référendum ? Sans doute vaudrait-il mieux alors qu’il ait lieu dans dix ou quinze ans : en effet, les sondages indiquent que la majorité favorable à la Réunification se situe dans la République d’Irlande, mais nullement en Ulster… Attendons encore un peu que la démographie fasse son effet, et que les catholiques deviennent nettement majoritaires au Nord. D’autant plus que le Good Friday Agreement de 1998 contient une clause selon laquelle le gouvernement britannique s’engage à organiser un référendum dès que les sondages sembleraient montrer que la Réunification pourrait l’emporter. Et que plus largement, il s’attache à respecter les desiderata de la majorité nord-irlandaise, dans un sens ou dans l’autre.

La revendication est d’ailleurs plus instable qu’il n’y paraît : si dans un avenir proche, elle n’est portée activement que par le Sinn Fein, l’électorat (par essence assez volatile) s’en détournera à la moindre déception. Ce qui peut arriver par la fragilité du programme économique du parti. Il faudra bien qu’il finisse par résoudre la sempiternelle équation qui toujours gêne les partis de gauche : difficile d’augmenter considérablement les dépenses de l’Etat tout en diminuant les impôts… Et un maximalisme gauchiste dans l’imposition des « riches » aurait de graves conséquences politiques.

Volatilité de l’électorat du Sinn Fein : en particulier chez les jeunes. Ceux-ci, que la période des Troubles (1969-1998) n’intéresse pas ou très peu, se préoccupent bien davantage de leurs études, des questions sociétales (mariage gay, etc) et des conditions pragmatiques de leur existence que de considérations romantico-nationalistes. Raison pour laquelle ils votent souvent pour le  parti Alliance (Alliance Parti of Northern Ireland) - ni unioniste, ni nationaliste - plutôt que pour le Sinn Fein…

Certes, il n’en demeure pas moins que l’injustice historique de 1921 doit être réparée. Cette année où la République d’Irlande s’est formée en laissant en plan le Nord, ses patrons anglais et leurs Black and Tans, au nom d’un échange inique – qui cependant installait la paix dans la majeure partie de l’Ile verte.

Tiocfaidh ár lá ! Et sans violence, de préférence.

 

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