Jour du Fléau !

Dans le calendrier républicain, le 30 décembre correspondait au jour du... fléau.

Un fléau d’armes contre le fléau Sars-CoV-2 ? Foto: Gind2005 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Avant-dernier jour de l’année, le 30 décembre a de particulier qu’il se situe juste avant la charnière de l’année écoulée, le 31 décembre constituant, avec le 1er janvier, la dite charnière. Que l’on soit enthousiaste ou dépressif, voire même exalté ou terrorisé, à l’idée de basculer dans la nouvelle année, le 30 décembre permet soit de s’accrocher encore un peu au passé, soit de se projeter dans le futur ; car très souvent, la période incluant les 31 décembre et 1er janvier ressemble, les libations d’usage aidant, à un nom-mans-land de la pensée.

Dans le calendrier républicain, ce jour de l’année du calendrier grégorien, avait été remplacé par le 10e jour du mois de nivôse. Jour portant le nom d’un instrument aratoire, à l’instar de chaque décadi concluant une décade. Ainsi le 10e jour de nivôse était le « Jour du Fléau ». Comme si le 30 décembre était un jour propre au battage des récoltes de céréales ! Si les paysans pré- et postrévolutionnaires avaient attendu le 10 nivôse pour battre les blés, les récoltes auraient alors été irrémédiablement perdues. Ceci conduit alors à penser qu’au temps de la Révolution Française, il y avait déjà des technocrates !

Voilà pour ce qui est du côté amusant de ce « 30 décembre – 10 nivôse », mais que les tristes-sires se rassurent, car en prévision de l’année 2020, le site « Stephen King Catalog » avait mis en vente son almanach intitulé « The Year of The Stand 2020 » (L’Année du Fléau 2020), inspiré de son roman d’horreur « The Stand » publié en 1978. L’année 2020 : Année du Fléau ! Mais qui aurait un seul instant pensé au caractère prémonitoire de ce titre, quand le Sars-CoV-2 sévissait en Chine et lorsqu’il était qualifié en occident, de petite grippette !

Et comme si cela ne suffisait pas, le calendrier 2021 mis en vente par le site « Stephen King Catalog » a pour thématique « Stephen King goes to the movies » (Stephen King va au cinéma), alors que ce maudit Sars-CoV-2 a fait fermer les salles de cinéma ! L’année du fléau, il nous faut bien l’admettre, s’étend ainsi de 2020 à 2021. Seuls quelques rares privilégiés pourront, l’année prochaine, à l’instar d’un fameux quarteron de dîneurs élyséens contrevenant aux règles sanitaires, se rendre au cinéma.

Le fléau, qu’il serve à battre les blés, fut-ce à contre temps comme dans le calendrier républicain, ou à décrire une calamité, comme dans le roman de Stephen King, possède cette double connotation. Porteur à la fois de vie et de mort, il nous renvoie, sans donner pour autant dans la psychologie de Café du Commerce (fermé lui aussi pour cause de pandémie), à l‘eros et au thanatos, les pulsions de vie de mort habitant chacun d’entre nous.

Mais le fléau peut être aussi d’armes. Très utilisé en Moyen-Âge, surtout dans les contrées alémaniques, son maniement malaisé requérant une grande maîtrise, en faisait une arme redoutable. Alors pourquoi 2021 ne deviendrait-elle pas l’année du fléau d’armes ? Sachant qu’un bouclier complète nécessairement la panoplie de celui qui le manie, gestes barrières et autres mesures prophylactiques forment cet écu. Quant au fléau d’armes lui-même, thérapies ajustées et vaccins éprouvés, pourront en constituer la structure.

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