La Alberca et son Marrano
Dans ce joli village médiéval de montagne, subsiste une tradition remontant à l’Inquisition Espagnole...

(Jean-Marc Claus) – L’Espagne ne manquant pas de villes et villages médiévaux, ces derniers sont toujours attrayants, tant pour les touristes que les historiens. Une route allant d’Hondarribia au nord du pays à Jerez de los Caballeros au sud-ouest, soit du Pays Basque à l’Estramadure, permet sur près de 1.600 km, d’en découvrir un nombre conséquent. La Alberca, située dans la province de Salamanque, est enregistrée à l’association des plus beaux villages d’Espagne (Los Pueblos más Bonitos de España), fondée en 2011 et comptant 122 localités, dont cinq aux Îles Canaries et deux aux Îles Baléares.
Peuplé d’un millier d’habitants, ce « pueblo medieval » fut le premier village rural à entrer au répertoire des monuments historiques. Perchée à 1.048 m d’altitude, La Alberca est le plus haut village de la Sierra de Francia, et sa superficie représente un peu plus de 10% des 630 km² de cette zone montagneuse et boisée. Sa situation à proximité des 32.000 hectares du Parque Natural de Las Batuecas – Sierra de Francia, a permis d’y construire la Maison du Parc.
Une tradition remontant à la fin du XVe siècle et toujours vivace, veut qu’à la San Antón de Padua (13 juin), un cochon tiré au sort, soit bénit et une cochette au cou, laissé libre d’aller et venir dans les rues du village, jusqu’à la Sans Antonio Abad (17 janvier). Une période de liberté de sept mois, durant laquelle les habitants ont la charge de nourrir, soigner et abriter l’animal, puis ce dernier est vendu aux enchères et les bénéfices reversés à une ONG, alors qu’autrefois, il était offert à la famille la plus pauvre de la communauté villageoise.
Nommé Marrano de San Antón, ce cochon à la gloire duquel un monument a été érigé en 1996 sur le parvis de l’église Nuestra Señora de la Asunción, nous renvoie à l’Inquisition Espagnole (1478-1834). Une période durant laquelle on sortait les cochons dans les rues, quand on suspectait certains villageois d’être des marranes. Le mot « marrano », venant de l’arabe « muharram » signifiant ce qui est rituellement interdit, fut longtemps attribué aux juifs ou musulmans convertis au catholicisme, mais gardant une répugnance pour la viande de porc, car pratiquant en secret leur religion d’origine.
Le terme « marrano », est passé dans le langage courant pour désigner le porc, pour lequel sont employés aussi « cerdo, cochino, cochinillo, guarro, puerco, gorrino ».A une dizaine de kilomètres, Mogarraz, autre village médiéval comptant au nombre de Los Pueblos más Bonitos de España, a renoué avec la tradition du Marrano de San Antón, mais sa population représentant le quart de celle de La Alberca, la célébration de cette fête y est moins connue.
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