La burqa, c’est bientôt fini en Suisse

La première chambre législative a voté une interdiction de se voiler le visage – valable sur tout le territoire suisse et avec une courte majorité de 88 contre 87 voix.

Dans le désert suisse, on ne verra plus la burqa... Foto: Afghanistan Matters, Brunssum, Netherlands / Wikimedia Commons / CC_BY 2.0

(KL) – Les discussions autour de la burqa, du niqab et du « burkini » ne sont pas terminées. Au contraire. La Suisse vient de relancer ce débat par un vote surprenant – le Conseil National, l’équivalent de l’Assemblée Nationale, vient de voter un texte interdisant de « se couvrir le visage ». Un texte qui ne vise certainement pas les motards…

Une seule voix a fait la différence – à 88 votes contre 87 (10 abstentions), le parlement suisse s’est donc prononcé en faveur de cette interdiction qui est déjà en vigueur dans certains cantons, comme le Tessin où l’interdiction de la burqa était particulièrement mal vécue par les hôteliers et gastronomes habitués à une clientèle richissime du Moyen-Orient qui elle, se cherche maintenant d’autres destinations de luxe.

Les arguments pour et contre cette interdiction sont les mêmes que dans les autres pays. Les socialistes et les Verts ont voté contre cette loi, les conservateurs se sont dépêchés de déclarer que cette interdiction ne visait pas seulement la burqa, « mais aussi des casseurs cagoulés ». Les porteuses de burqa sont aussi rares en Suisse que les casseurs cagoulés, mais force est de constater que la burqa est considérée en Suisse (comme ailleurs) comme une expression politico-religieuse et comme un symbole de l’oppression de la femme et non pas comme un habit comme un autre.

Ce vote au parlement anticipe une initiative visant l’organisation d’un référendum portant sur la question. Les responsables politiques savent que la vox populi votera de toute manière en faveur de cette interdiction – comme en 2013, lorsque les Suisses des cantons italophones avaient voté à 65% en faveur de l’interdiction de la burqa. Et forcément, on pense aussi à ce référendum qui interdisait la construction de nouveaux minarets en Suisse, dans un pays qui compte guère plus que 300 000 musulmans et 4 ( !) minarets.

Toutefois, c’est un peu le monde à l’envers – la droite et l’extrême-droite suisses votent, main dans la main, un texte qui veut « maintenir le respect de la femme », un sujet traditionnellement défendu par la gauche qui elle, évalue la liberté vestimentaire plus haute que la dignité de la femme. Après des décennies d’une lutte pour l’égalité des sexes (une lutte loin d’être gagnée…), le sujet semble avoir changé de camp. Et que fait la gauche de cette question de la dignité de la femme ? La burqa réduit la femme au niveau d’une « propriété » de son homme, la burqa prive les femmes qui la portent d’une identité visible, leur enlève une partie de leur personnalité pour – rassurer leurs hommes qui eux, toujours en faisant référence aux us et coutumes religieux, peuvent en épouser et ainsi « posséder » plusieurs femmes. Comme au Moyen Age. Et il est surprenant que cette position soit défendue non pas par une gauche moderne, mais par la droite et l’extrême-droite.

Si cette nouvelle loi n’est pas encore entrée en vigueur, il ne lui reste que deux obstacles – le vote dans la deuxième chambre législative, le Conseil des Etats et le vote populaire. Pour ces deux votes, une approbation est très probable. Est-ce que ce vote approfondira le clivage entre les communautés ou est-ce qu’il fera en sorte à ce que les femmes musulmanes retrouvent leur visage tant qu’elles vivent dans un pays occidental ?

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