La fabrique des abrutis – Cette corvée que personne ne nomme
Des politiciens de petite(s) vertu(e) et de grande avidité, plaident pour la suppression d’un jour férié afin que, par du travail non rémunéré, les salarié(e)s contribuent à renflouer le déficit de la sécurité sociale, et plus largement les finances publiques.
(Jean-Marc Claus) – Comme la mémoire politique des Français est généralement assez courte, il serait bon de rappeler que Jean-Pierre Raffarin, alors premier ministre de Jacques Chirac, leur a déjà fait le coup il y a vingt ans, avec le Lundi de Pentecôte. Décision prise à l’automne 2003, appliquée l’année suivante ad vitam aeternam, afin definancer un plan solidarité en faveur du vieillissement et de la dépendance. Nous étions alors sous le choc de la canicule d’août 2023, provoquant une surmortalité des seniors de plus de 75 ans. Requiescat in pace…
L’idée de supprimer un jour férié, avait précédemment été avancée par Valéry Giscard d’Estaing, qui voulait s’en prendre au 8 mai. Une levée de boucliers des anciens combattants l’a conduit à renoncer. Quant à Emmanuel Macron, il disait en 2019, évoquant l’option d’une nouvelle suppression : « On a déjà essayé. Ça n’a pas très bien marché, ce n’est pas clair. ». Le monarque-président avait alors eu à faire face au Mouvement des Gilets Jaunes, dont la police du ministre Castaner en éborgna plus d’un. « J’évoque, j’balance pas ! »
Quid aujourd’hui d’une seconde journée de solidarité, le Lundi de Pentecôte étant redevenu chômé en 2008, mais les sept heures de travail gratuit toujours imposées aux salariés ? Les parlementaires qui votent ces lois antisociales, pour ne pas employer l’adjectif insultant ad hoc, sont exemptés de ces corvées médiévales, auxquelles est ajouté aujourd’hui le doux mot de solidarité. Des corvées de solidarité en somme, mais dont les créateurs se sont dispensés, au motif que leur gain est une indemnité et non un traitement. On vit une époque formidable !
Un ex-ministre de Jacques Chirac, qui voulait en 2022 dealer avec Emmanuel Macron pour ramener la droite au gouvernement, s’est, il y a peu, benoîtement positionné, pour l’éventuelle suppression du caractère férié du 11 novembre, aux motifs qu’il y a mille manières de commémorer, et que nous n’avons pas ce jour là, 65 millions de Français au pied des Monuments aux Morts. Se dire républicain, et vouloir effacer des symboles de la République, relève à la fois du reniement et de la bêtise crasse. Beati pauperes spiritu…
La volonté de certains politiques de réduire la Sécurité Sociale à un organisme assurant des prestations minimalistes, est maintenant à peine dissimulée. Démolir un conquis social essentiel du Conseil National de la Résistance, au profit d’assurances privées, tel est le plan. Assurances privées relevant du système capitaliste, donc des logiques de maximalisation des profits, et non des principes de solidarité. ¡ Salud !Prost ! Cheers ! Santé !
Mieux encore que les COP, qui ne sont d’aucune utilité réelle pour la préservation du climat, les politiques françaises de prétendu sauvetage, tant de la Sécurité Sociale que de la retraite par répartition, sont en fait des opérations de détricotage et de démantèlement, couvertes par une propagande du niveau de celle imaginée au siècle dernier, par un certain Joseph G. Plus que toute autre chose, il importe de bien mettre dans la tête des Français, que le capitalisme serait un humanisme. Auri sacra fames !
Comment détruire un service public ? Noam Chomsky a donné clairement la recette : « Commencez par baisser son financement. Il ne fonctionnera plus. Les gens s’énerveront. Ils voudront autre chose. C’est la technique de base pour privatiser un service public. ». En 2022, un ouvrage collectif intitulé « Tuer un service public en cinq étapes », détaillait les mécanismes de la privatisation de ces biens communs. Auparavant, la sociologue Nadège Vezinat décrivait très simplement, le cercle vicieux amenant à ce qu’elle nomme le crépuscule des services publics. « Que celui qui a des oreilles pour entendre entende. »…
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