La fabrique des abrutis – Exit les va-t-en-guerre !

C’est tellement facile de parader sur les réseaux sociaux et de faire la guerre sur le web...

L’idiotie se produit en quantité industrielle, à la fabrique des abrutis... Foto: CJ Sorg / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

(Jean-Marc Claus) – Dans un récent article intitulé « Die Sternstunde des Rob Bauer », Kai Littmann mettait l’accent sur le caractère irresponsable et totalement surréaliste des propos tenus par le « Vorsitzender des Militär-Ausschusses der NATO ». Qui peut sensément affirmer que Vladimir Poutine n’est pas fou au point de s’abstenir d’employer l’arme nucléaire ? Qui peut croire à une opération sans danger de conflagration mondiale, si l’OTAN engageait une confrontation directe avec la Russie ? Robert Bauer dit Rob Bauer, mais il n’est pas le seul.

Loin s’en faut, car depuis bientôt une année, les spécialistes en géopolitique ont, sur les réseaux sociaux, remplacé les spécialistes en épidémiologie. A moins que, chose très probable, il s’agisse des mêmes qui se sont juste reconvertis pour continuer à exister. En 1991, Édith Cresson affirmait qu’elle était là pour gouverner et non avoir de bons sondages. C’était durant le siècle précédent, soit avant la création des réseaux sociaux. Depuis lors, l’opinion publique se façonne et se manipule en grande partie via ces canaux, alors que les médias sont régulièrement et sans aucun discernement cloués au pilori.

Qu’un individu lambda aborde les solutions pouvant stopper la poursuite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, sur un mode « jeu en ligne » ou « jeu de rôles » ou façon « jeu de plateau » comme « Risk » soit, mais pas un haut responsable d’un organisme tel que l’OTAN ! C’est là que le fameux aphorisme de Clemenceau, « La Guerre ! Une chose trop grave pour la confier à des militaires. », reprend du service et prend tout son sens. Si aujourd’hui, les Nivelle et les Mangin ne manquent pas du côté des militaires, existe t-il encore des Clemenceau et des Churchill du côté des politiques ? La question est vite répondue, pour employer une expression courante à la fabrique des abrutis…

Que les militaires fourbissent leurs armes et déploient des stratégies, n’a rien d’étonnant même si certains tel le « Luitenant-admiraal de la Koninklijke Marine » Rob Bauer, parlent et réfléchissent après, si toutefois ils réfléchissent. Mais chez les civils et plus précisément les politiques, qui a suffisamment de hauteur de vue, d’épaisseur et de charisme pour ne pas se laisser mener par le bout du nez par les va-t-en-guerre ? A l’est, la guerre est déjà déclarée. A l’ouest, aux USA, Joe Biden se la joue tout en souplesse « America First », l’Union Européenne cherche son chat et livre des chars, la France a un président pour qui le téléphone pleure quand il appelle Moscou.

On est mal patron, on est très mal, car guerre ou pas guerre, sans politiques de l’envergure de Clemenceau ou de Churchill, nous allons droit dans le mur. Mais sombrer dans les pessimisme serait une grave erreur, car comme le rapportait au tout début des seventies André Malraux, citant son mentor gaullien « La fin de l’espoir est le commencement de la mort. ». Alors évidemment, en 1971, il y avait la guerre dite froide, mais aussi le Prix Nobel de la Paix attribué à un certain Willy Brandt pour sa politique de rapprochement (Ostpolitik) avec l’Europe de l’Est et la Deutsche Demokratische Republik.

Aujourd’hui, avec le groupe formé par les états de Višegrad, l’Union Européenne est fracturée, même si la Pologne a sur certains points changé de camp, suite à l’agression russe en Ukraine. Mais il n’en demeure pas moins nécessaire de travailler à la consolidation diplomatique du « front de l’est », si l’on veut avoir la moindre chance de n’être pas qu’un banal pion sur l’échiquier international. Alors, plutôt que de parler de guerre et d’élaborer des stratégies militaires, qui sur le terrain s’avèrent très souvent mises en échec par des variables non prises en compte dans les cabinets feutrés des ministères et des états-majors, ne pourrait-on pas envisager une « Ostpolitik » favorisant la paix ? Chose dont ces abrutis de va-t-en-guerre, grouillant sur le web et les réseaux sociaux, n’ont absolument aucune idée et très certainement aucune envie…

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