La fabrique des abrutis – Vive le sport !

Dans les pratiques sportives, la violence se sent comme le ver dans le fruit, or, quand elle touche les enfants, c’est d’autant plus immonde et révoltant.

Pour un enfant, la pratique d’un sport ne doit pas être source de souffrances. Foto: USAG-Humphreys / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – Publiée il y a peu par la Fondation pour l’Enfance, la seconde édition de son le baromètre relatif aux violences éducatives ordinaires (VEO), étude menée sur un échantillon représentatif de 1007 parents d’enfants âgés de 0 à 10 ans, mériterait plusieurs articles. Le volet relatif à l’encadrement des pratiques sportives des jeunes, s’avère particulièrement inquiétant.

Au sein du groupe des parents dont les enfants font du sport, 90% discutent avec eux de leurs entraînements, et 67% le font régulièrement. De ces parents, 70% ont le sentiment de bien connaître les entraîneurs et encadrants (20% très bien – 50% plutôt bien – 25% plutôt pas bien – 5% pas bien du tout). Des chiffres plutôt rassurants en somme, or 38% ont déjà eu connaissance de comportements qu’ils qualifient de violents ou d’inappropriés. Ces derniers se déclinent en violence verbale (19%), violence psychologique (15%), négligence (14%), violence physique (11%), violence sexuelle (9%).

Certaines de ces violences sont, selon l’étude, pour un tiers des parents considérées comme nécessaires : « 36% adhèrent à l’idée que pour faire progresser un enfant dans son sport, il faut le forcer à exercer et lui faire ressentir une forme de pression régulière et 33% qu’un enfant ne pourra atteindre un haut niveau dans son sport que s’il est soutenu par son entraîneur, cela impliquant parfois des violences psychologiques, verbales voire physiques » (sic). La conclusion de l’étude souligne également que « 48% des parents interrogés jugent qu’il est difficile voire impossible d’entraîner un enfant sans crier, 34% sans le punir, 28% sans lui dire qu’il est mauvais ou feignant, 27% sans le bousculer, 26% sans le gifler ou lui donner une fessée. » (sic).

Autant de chiffres qui interrogent, lorsqu’on les met en perspective avec une recrudescence de manifestations conflictuelles de parents envers les encadrants de leurs enfants. Non essentiellement à propos de violences subies par les jeunes sportifs, ce qui serait souhaitable et compréhensible, mais surtout quant à l’arbitrage, la sélection, les résultats, en somme tout ce qui touche à la performance. Ceci ayant motivé pour certains clubs et certaines fédérations, le déploiement de stratégies allant d’affiches spécifiques dédramatisant les enjeux de la compétition à de véritables plans d’action.

En cette année olympique, où la pratique sportive est en France, par le président jupitérien, érigée en vertu républicaine pour ne pas dire divine, l’association de la violence au sport va-t-elle perdurer ? Nous sommes là bien loin de l’esprit de l’olympisme conceptualisé par Pierre de Coubertin, et auquel trop de nos politiques contemporains font en ce moment référence, alors que leurs pratiques lui sont diamétralement opposées. Et que dire de l’esprit de compétition naturellement inhérent au sport, auquel s’est substituée l’idée de la compétitivité générée par la concurrence des marchés ? Comme il pervertit l’art en en faisant un commerce, le capitalisme dénature le sport, pour en faire un objet de spéculations qui n’ont rien de sportives.

Vecteur de violences ordinaires selon la magazine Parents (7 juin 2024), la pratique sportive des jeunes sur lesquels pèse une omerta dénoncée par la députée Sabrina Sebaihi (EELV) dans les colonnes de l’Humanité (14 septembre 2023), doit impérativement être repensée, si l’on ne veut pas qu’elle fabrique autant d’abrutis que certaines émissions de télévision ou les prestations internetiques de certains influenceurs. Ceci sans compter avec la cumulation des trois phénomènes, dont en l’espèce, les conséquences dépassent alors tout entendement…

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