La France attire à nouveau les investisseurs étrangers…

… qui attendent les réformes pour continuer à investir !

On a beau chercher - la fin du chômage n'est pas (encore) en vue... Foto: SeptemberWoman / Wikimedia Commons / CC-BBY-SA 3.0

(Par Alain Howiller ) – En décidant de ne plus commenter, mois après mois, les chiffres du chômage tels qu’ils apparaissent à travers les chiffres publiés par « pôle emploi », le gouvernement français a sans doute pris une sage décision : certains y verront une tentative pour mettre les « politiques » à l’abri d’évolutions à court terme qui n’ont guère de sens dans le domaine de l’économie politique, d’autres y verront un retour à des repères temporelles qui permettront de mieux suivre l’évolution de l’économie dans ses tendances profondes. C’est l’avis de Muriel Penicaud, la nouvelle Ministre du Travail, qui cherche à sortir de l’éternel « yo-yo » des chiffres mensuels sur l’emploi. Les dernières statistiques publiées faisant le point sur la situation de l’emploi illustrent assez bien le dilemme !

C’est ainsi que, une fois de plus, les chiffres concernant le mois d’avril mettent en relief le caractère erratique des données:après une progression du chômage en Mars, ils constatent un repli pour le mois d’avril, alors que sur un an, l’inversion (légère mais réelle) est régulière pour se situer, à l’issue du premier trimestre 2017, à 9,6% de taux de chômage contre plus de 10% un an plus tôt. En Alsace où l’évolution du marché du travail s’est inscrit en contraste (négatif) avec l’évolution nationale, le chômage a également reculé en avril (moins 0,4% sur un an, mais -1,6% dans le Grand Est, voir eurojournalist.eu du 17 Mai). Reste à définir le rythme auquel la Ministre du Travail entend commenter l’évolution des chiffres après avoir tranché si « oui ou non » les statistiques futures s’appuieront sur les données évaluées à l’aulne des chiffres établies par le Bureau International du Travail qui permettraient des comparaisons, certifiées conformes, de pays à pays.

La France : « un incroyable vivier » pour Siemens France ? – Dans la bataille de l’emploi, la reprise des investissements constatée en 2016 (+2,7%) dans l’économie française, les perspectives de croissance de l’économie mondiale (+3,5%) revues à la hausse par le FMI, mais surtout le retour, après une année 2015 catastrophique, des investisseurs étrangers en France, laisse augurer que l’amorce de redressement de l’économie française se poursuivra avec l’espoir que des créations de postes de travail plus significatives réussiront enfin à faire reculer sensiblement le taux de chômage. Pour l’heure, si la reprise semble s’accélérer, le chômage continue de peser y compris sur la vision qu’ont les Français de leur avenir.

Président de Siemens France, qui continue d’investir en France et plus spécialement en Alsace, Christophe de Maistre voit loin : « Il est temps de créer en France une industrie d’avant garde et d’encourager les industriels à passer à la nouvelle ère digitale », écrit-il en marge du « Baromètre 2017 de l’attactivité de la France » que vient de publier le cabinet de conseil « Ernst & Young ». « Notre pays », poursuit de Maistre, « dispose d’un incroyable vivier de chercheurs et d’ingénieurs qu’il forme à l’excellence dans ses écoles : en créant des pôles d’attractivité rassemblant industries, start-ups et chercheurs, la France s’assurerait une fertilisation croisée, vivace, au service de l’innovation… Ces partenariats stratégiques doivent, d’une part, bénéficier d’une grande lisibilité et d’une communication forte et, d’autre part, s’incarner dans les territoires. Il convient de les accueillir dans des écosystèmes stimulants, d’impliquer les villes, les universités, les grandes écoles ainsi que les régions. » C’est bien ce que le « Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) » du Grand Est essaiera de mettre en pratique.

Le poids des investisseurs : 1,8 million de salariés français. – Après l’étude de la « Chambre franco-allemande de Commerce et d’Industrie » qui avait souligné (eurojournalist.eu du 16 Décembre) que la majorité des entreprises allemandes implantées en France ne regrettaient pas leur décision d’installation en territoire français et que, si cela était à refaire, elles prendraient la même décision d’implantation(1), Jean Pierre Letartre, Président d’E.Y. en France et Marc Lhermitte, Associé du cabinet, constatent dans le « baromètre 2017 » : « En dépit des soubresauts politiques qui continuent d’agiter l’Europe et la France en 2017, les investissements directs étrangers constituent l’un des moteurs persistants de l’économie française. Selon l’INSEE, plus de 20.000 entreprises, nées hors de France, y ont élu domicile et y emploient prés de 1,8 million de personnes. Ce qui représente 12% de l’effectif salarié en France, 19% du chiffre d’affaires de l’économie française et 30% de ses exportations ».(2)

D’après « E.Y. », 2016 a été marquée, en France, par une forte augmentation des implantations et des extensions annoncées par les investisseurs étrangers (+30% par rapport à l’année précédente). Près de 780 projets ont permis la création de 17.000 emplois environ (+24%). La France se place en troisième position, derrière le Royaume Uni et l’Allemagne, pour le nombre d’investisseurs étrangers accueillis sur son sol, mais elle n’est que cinquième (derrière le Royaume Uni, la Pologne, l’Allemagne et la Roumanie) pour le nombre d’emplois créés par ces investisseurs.

L’attractivité, qui a retrouvé son niveau d’avant la crise amorcée en 2008 : elle s’explique par l’effet levier exercé par l’innovation, l’e-commerce, les services, les centres de Recherches et de Développement, la logistique. 58% des investisseurs interrogés dans le cadre de l’enquête de « E.Y. » estiment que la politique mise en oeuvre pour encourager la création de « start-up » est efficace. Une « nouvelle France Industrielle » adhére à l’évolution de l’économie numérique, à la politique de l’énergie ou de la… santé. 61% des décideurs non encore implantés en France ont une image positive du pays.

L’Eurometropole de Strasbourg interpelée ! – Dans l’attractivité, l’image du « Grand Paris » (qui accueille un projet sur trois) est un atout important pour l’ensemble du pays qui attire également grâce à ses métropoles régionales qui « captent une part conséquente des investissements » : Strasbourg se retrouve en huitième position pour son pouvoir d’attraction, derrière Lyon, Bordeaux, Marseille/Aix en Provence, Toulouse, Nantes, Lille et Grenoble.

La métropole alsacienne précède Nice, Montpellier, Rennes et Le Havre. Dans son « Baromètre » paru en 2012, « E.Y. » avait déjà insisté, après son enquête auprès des investisseurs, sur l’importance des métropoles : Strasbourg se trouvait alors en septième position derrière Lyon, Toulouse, Lille, Marseille/Aix, Bordeaux et Nantes alors que dans une étude sur l’attractivité des villes menée par « l’Association pour l’Emploi des Cadres (APEC) », elle se trouvait au 12ème rang (sur 15 villes classées). Ces chiffres donnent une idée des efforts que l’Eurométropole strasbourgeoise, s’appuyant sur son image européenne, sur son université, ses unités de recherche, sur son économie devra continuer à déployer pour asseoir ses objectifs de grande métropole sur le Rhin.

Il est vrai que, sur un plan national, les points positifs relevés par le « Baromètre E.Y. » ne doivent pas faire oublier les demandes que les investisseurs étrangers formulent pour adhérer définitivement au retour en grâce de l’économie « France ». Si la prudence continue de s’imposer chez les investisseurs étrangers pour une implantation à court terme et la création d’emplois qui y serait liée, c’est qu’ils attendent les mesures que le nouveau gouvernement français et sa majorité arriveront à mettre en place pour améliorer la compétitivité de l’économie.

Les réformes qu’ils attendent ! – Les investisseurs (étrangers comme du reste français) attendent des mesures en matière de fiscalité, de simplification des procédures de toutes sortes, de simplification du Droit du Travail, d’allègement du coût du travail. Ils réclament aussi une stabilité « à l’allemande » de la fiscalité et des réformes pour que, grâce à une nouvelle visibilité, ils puissent s’engager sur le moyen et le long terme.

Le retour d’ attractivité devra être confirmé car si l’industrie a un avenir en France pour 65% des investisseurs interrogés, « les signaux positifs ne doivent cependant pas faire oublier que la concurrence reste forte au sein de l’Europe », concluent Jean Pierre Letartre et Marc Lhermitte qui ajoutent : « La France doit et devra se battre pour continuer à attirer et retenir les investissements étrangers sur son sol… Pour transformer le rebond de l’attractivité et le pérenniser, il faut plus que jamais transformer la France ». Le « Baromètre » tombe pile pour le rappeler aux nouveaux dirigeants que les Français se sont donnés !

(1) On estime qu’il y a plus de 3.000 entreprises d’Outre Rhin en France : elles y emploient 350.000 salariés, tandis qu’on a recensé plus de … 5.300 entreprises et filliales contrôlées par des investisseurs français en Allemagne où elles emploient 400.000 salariés.

(2) En Alsace, d’après l’INSEE, on compte 1.200 entreprises étrangères qui emploient 22% des salariés alsaciens ou 34% des seuls salariés occupés dans l’industrie. D’après une étude régionale réalisée par « E&Y », on estimait à 400 le nombre d’entreprises allemandes en Alsace : une cInquantaine d’entre elles venaient du Pays de Bade voisin. Les entreprises allemandes sont en tête des investisseurs étrangers en Alsace : elles précèdent les Etats-Unis et la Suisse.

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