La France et l’Espagne sont d’accord…

… pour créer des camps de concentration en Europe. De préférence en Italie et en Grèce. Le sommet européen cette semaine à Bruxelles s’annonce houleux.

La réponse de l'Espagne et de la France sur la question des réfugiés - des camps d'internement. Foto: andrej_s / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Nous sommes en 2018 et il convient de retenir cette date. C’est en 2018 que la France et l’Espagne proposent à l’Europe la mise en œuvre de camps de concentration pour réfugiés. Et parce que les camps de concentration font désordre, le premier-ministre espagnol Pedro Sanchez et le président français Emmanuel Macron ont une idée qui elle, traduit toute la solidarité européenne : ces camps de concentration devraient se trouver « à proximité de l’endroit où les réfugiés arrivent en Europe », comprendre : en Italie, en Grèce, en Chypre, en Malte. Pour faire passer la pilule, la France et l’Espagne proposent que le financement de ces camps de concentration soient financés par tous les états-membres de l’Union Européenne, si nécessaire, en forçant la main aux pays qui ne remplissent pas leurs obligations en termes d’accueil de réfugiés.

L’Europe devrait réagir à cette proposition de mise en œuvre de camps de concentration. Si l’UE finance déjà de tels camps au nord de l’Afrique, camps qui fournissent la marchandise pour les marchés d’esclaves africains, la création de tels camps en Europe constitue une nouvelle dimension dans la « guerre contre les réfugiés » que mène l’Europe actuellement. Hormis le fait que cette nouvelle initiative réduit les réfugiés à un statut de « criminel potentiel ambulant », Sanchez et Macron versent de l’huile dans le feu des populistes néo-nationalistes qui eux, sont en train de prendre le contrôle politique en Europe.

La France et l’Espagne justifient les « centres fermés » que proposent Sanchez et Macron  par la volonté de « ne pas se faire bousculer par les extrémistes » – une belle rhétorique. Donc, pour ne pas permettre aux extrémistes de continuer leur ascension, on adopte un comportement pire que le leur. Mais Sanchez et Macron peuvent dormir sur leurs quatre oreilles : le Conseil Européen ne risque pas d’accepter cette proposition scandaleuse. Mais le refus de ces camps de concentration ne viendra pas d’un élan humaniste des autres pays européen : il viendra par la simple peur de faire partie des pays qui devront accueillir ou financer ces camps. En 2018, l’humanisme européen se situe au niveau des cheminots français – il est en grève.

Mais à qui s’est adressé Emmanuel Macron en déclarant : « il n’est pas possible que des pays qui profitent de la solidarité de l’UE fassent valoir leurs égoïsmes nationaux dès qu’il s’agit du sujet de la migration ». Surprenant, cette autocritique venant d’un pays qui ne remplit pas ses obligations découlant de l’accord du mois de septembre 2016, et qui ne brille guère dans l’accueil des réfugiés.

Il est évident que le sommet du 28/29 juin à Bruxelles n’apportera pas de solutions. Bien entendu, les 27 (28) se mettront d’accord pour augmenter le budget de « Frontex », l’agence européenne chargée de balayer la Méditerranée, chargée de former les bandes de criminels libyennes qui volent, violent et tuent les réfugiés dans les camps de concentration que l’UE a déjà mis en œuvre dans le nord de l’Afrique.  Et suite à ce sommet, les chefs d’Etat et de gouvernement se féliciteront mutuellement pour les progrès exceptionnels réalisés.

Est-ce vraiment un succès pour l’Union Européenne d’imiter la pire des époques de l’histoire européennes en mettant en œuvre des camps de concentration pour des êtres humains dont le seul crime consiste à avoir voulu sauver leur vies ? En 2018, les « nouveaux juifs » sont les réfugiés qui arrivent des zones de guerre et de guerre civile. La façon de les « gérer » ressemble fort à la « gestion » des juifs par les Nazis.

L’Europe touche le fond dans la question des réfugiés. Les égoïsmes nationaux ont remplacé l’idée d’une Europe humaniste, solidaire et sociale, et le cynisme des dirigeants politiques ne connaît plus de limites. Un nuage noir-brun s’abat sur l’Europe, les principes les plus sacrés de notre continent sont trahis, et rien ni personne ne semble en mesure d’arrêter cette évolution qui mène inévitablement à de nouvelles guerres, guerres civiles et violences dans nos sociétés. Transformer les réfugiés en boucs émissaires pour notre propre incapacité de nous comporter de manière solidaire, cela ressemble à d’autres exemples de l’Histoire récente de notre continent.

Certes, à Bruxelles, l’Italie refusera l’approche de la France et de l’Espagne, car ce que proposent Pedro Sanchez et Emmanuel Macron, n’est autre que la mise en œuvre de ces camps de concentration en Italie – ceux qui ont suivi les déclarations de Mattéo Salvini, le nouveau ministre de l’intérieur italien, savent que l’Italie n’acceptera pas cette proposition venant de la France et de l’Espagne.

L’Union Européenne se brisera sur la question de l’accueil des réfugiés. Il est tout simplement exclu que les 27 (28) trouvent un accord au-delà du nationalisme ambiant. Les élections européennes en 2019 seront la dernière occasion d’arrêter cette évolution vers une Europe froide, cynique, meurtrière. Mais faute d’alternatives crédibles, les Européens et Européennes risquent de continuer à voter pour ceux qui sont responsables de ce désastre européen. Tout comme au début des années 30 du siècle dernier :  tout le monde voit la catastrophe arriver, mais au lieu d’appuyer sur le frein, on appuie sur le champignon. L’Europe, avec son personnel dirigeant, va droit dans le mur. Et nous, nous ne faisons que regarder en pensant que cette évolution est imposée par une volonté divine. Et si on votait différemment en 2019 ?

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste