La honte de l’Europe
Le député européen Carles Puigdemont, démocratiquement élu lors de la dernière élection européenne, a été arrêté en Italie. L’homme doit être immédiatement libéré.
(KL) – La question si l’on est pour ou contre l’indépendance catalane, ne se pose même pas. La seule question qui se pose aujourd’hui, c’est comment il est possible qu’un eurodéputé, démocratiquement élu et n’ayant commis aucun crime, soit chassé à travers l’Europe. Carles Puigdemont n’a rien volé, il n’a pas incité à la violence, il n’a commis aucun acte de sabotage, mais il est frappé d’un mandat d’arrêt européen émis par l’Espagne qui elle, veut statuer un exemple en incarcérant les leaders du mouvement indépendantiste catalan. En arrivant en Sardaigne, pour participer à une manifestation organisée par des politiques régionaux indépendants, Puigdemont a été arrêté. Si jamais l’Italie décide de l’extrader vers l’Espagne, il y risque de longues années en prison pour avoir organisé, en 2017, un référendum sur l’indépendance catalane, référendum considéré comme de la « rébellion » par un gouvernement espagnol dépassé par cette volonté d’indépendance de la Catalogne.
Si le Parlement Européen avait annulé l’immunité parlementaire de Carles Puigdemont, la procédure est encore en cour, car ses avocats ont fait appel contre cette décision et la décision finale concernant cette immunité, n’est pas encore intervenue. L’Europe, grande donneuse de leçons sur la démocratie, accepte qu’il y ait des prisonniers politiques en Europe – et après on s’étonne que dans d’autres régions du monde, on n’a pas trop envie d’y instaurer justement cette démocratie européenne.
Carles Puigdemont n’est pas à sa première arrestation depuis son élection. L’ancien Président de la Région Catalogne avait déjà été arrêté en Allemagne où le tribunal de Schleswig avait rapidement trouvé l’astuce pour pouvoir lui rendre sa liberté : il n’avait retenu que le chef d’accusation « abus de bien sociaux » (pour le coût de l’organisation du référendum en question), tout en rejetant le chef d’accusation principal figurant sur le mandat d’arrêt, la « rébellion ». En cas d’extradition, l’Espagne n’aurait pu lui faire un procès que pour « abus de bien sociaux », mais justement, pas pour « rébellion ». Face à cette option, Madrid avait alors retiré le mandat d’arrêt européen qui depuis, a été renouvelé.
Aujourd’hui, Carles Puigdemont n’est pas le seul prisonnier politique en Europe. Il ne faut pas oublier Julian Assange qui est prisonnier politique en Grande Bretagne. En Espagne, plusieurs collègues de Carles Puigdemont ont déjà été condamnés pour l’organisation de ce référendum de 2017, à des peines allant jusqu’à 13 (!) ans de prison. Et maintenant, l’Espagne veut, coûte que coûte, aussi mettre Puigdemont derrière les barreaux. Mais cette façon de gérer une opposition, est digne d’une république bananière – aucun état-membre de l’Union Européenne ne devrait accepter le rôle d’agent exécutant du gouvernement espagnol.
Puigdemont, qui vit en Belgique, n’est pas un criminel. - Il est le représentant, démocratiquement élu à plusieurs reprises, de la majorité des Catalans qui elle, souhaite effectivement l’indépendance de l’Espagne. S’il est vrai que la constitution espagnole prévoit « l’unité inviolable du territoire », il n’en reste pas moins que les Catalans souhaitent leur indépendance, que cela fasse du sens ou pas. Personne n’aurait eu l’idée d’arrêter la première ministre écossaise Nicola Sturgeon pour avoir organisé un référendum sur l’indépendance de l’Ecosse du Royaume Uni. Dans un monde qui change rapidement, il ne peut pas être interdit de se poser des questions sur l’avenir des régions ou pays dans lesquels on vit.
Essayer de faire taire la majorité de la population car celle-ci exprime d’autres désirs que ceux admis par un gouvernement central, en incarcérant les leaders d’un tel mouvement, ce n’est pas de la démocratie, mais du totalitarisme. L’Union Européenne ne devrait pas accepter le fait que sur son territoire, on met des gens en prison pour la seule raison que leur souhait politique ne convient pas au gouvernement en place.
Les indépendantistes catalans ne sont pas des extrémistes-terroristes, il s’agit de citoyens et citoyennes qui ont une autre vision de l’avenir de leur région que le gouvernement. Est-ce criminel de poursuivre un projet d’indépendance ? Si le monde globalisé d’aujourd’hui s’oriente vers des structures plus importantes, le souhait d’indépendance d’une région peut paraître comme un anachronisme, mais en fin de compte, cela ne regarde que la Catalogne et l’Espagne et ce souhait n’a rien d’illégal. Il serait à l’Espagne de négocier l’avenir de la Catalogne avec les Catalans, au lieu de criminaliser la majorité de la population catalane, en incarcérant les figures de proue de ce mouvement d’indépendantistes.
Il faut immédiatement libérer Carles Puigdemont, qui n’est pas un criminel, mais un homme politique qui représente la majorité de la population de sa région. Aucun état-membre de l’Union Européenne ne devrait soutenir l’approche totalitaire du gouvernement espagnol qui lui, devrait trouver d’autres façons de gérer ce souhait d’indépendance. Une Union Européenne qui tolère la présence de prisonniers politiques sur son territoire, perd toute crédibilité lorsqu’elle donne des leçons de démocratie en apostrophant d’autres pays pour le fait qu’il y ait des prisonniers politiques. Un seul mot d’ordre : Liberté pour Carles Puigdemont, pour Julian Assange et pour tous les autres prisonniers politiques en Europe !
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