La langue devient de plus en plus violente

Entre un président qui a « envie d’emmerder les non-vaccinés » et des internautes qui posent la question si les non-vaccinés ne seraient pas des « terroristes », les dérapages se multiplient.

Il serait temps de cesser de nous bouffer le nez mutuellement, mais de réinstaurer le débat sociétal. Foto: Jeangagnon / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Aujourd’hui, les sociétés occidentales sont totalement divisées. D’une part, il y a les « bons citoyens », comprendre : les personnes vaccinées et d’autre part, les personnes non-vaccinées qui subissent actuellement une campagne de désinformation violente des plus terribles. L’assurance, avec laquelle les « bons citoyens » condamnent les personnes non-vaccinées, est étonnante. Car aujourd’hui, à un moment où ni les scientifiques, ni les politiques savent réellement où nous en sommes avec la pandémie, il est presque ridicule de lire des posts sur les réseaux sociaux où des ignorants lâchent des phrases comme « la vaccination est la seule sortie de la crise. Point barre. Et les non vaccinés sont des terroristes. ». Des terroristes ?!?

La brutalisation de la langue est un signe qu’il convient de ne pas sous-estimer. La division de la société s’exprime à ce niveau et plus la langue se dégrade, plus on approche d’autres niveaux de la violence. Il s’agit là d’une évolution qu’il faut prendre au sérieux. Si les personnes non-vaccinées étaient d’abord des « égoïstes », elles sont rapidement devenues des « non-républicains », avant que le président ait exprimé son « envie de les emmerder » et maintenant, on pose publiquement la question si ces personnes ne seraient pas des « terroristes ».

Un terroriste, et en France on ne sait que trop bien ce que c’est, est une personne qui commet des actes meurtriers, fourbes et logiquement interdits par la loi. Un terroriste, c’est une personne que l’on combat avec tous les moyens. Est-ce que demain, les Français combattront, invités par leur président, leurs compatriotes non vaccinés « par tous les moyens » ?

Il serait important que la France revienne à la raison. Si la grande majorité des Français est aujourd’hui vaccinée, il est trop facile d’imputer l’évolution pandémique à ces personnes non-vaccinées qui, depuis un moment, ne participent plus vraiment à la vie sociale. La responsabilité pour l’évolution pandémique incombe, outre la gestation du virus proprement dite (laboratoire à Wuhan ?) à une gestion catastrophique de cette pandémie. Depuis deux ans, les gouvernements (partout dans le monde) « tricotent » des « mesurettes » dans l’espoir de pouvoir ménager la chèvre et le chou, de protéger à la fois l’économie et la santé publique et ce, à un niveau national et souvent régional. Et – depuis deux ans, ça ne fonctionne pas. Malgré un très fort taux de vaccination, le virus continue à sévir comme jamais avant, à muter et à se propager. Mais au lieu de réfléchir aux erreurs commises, on préfère (nous sommes en période électorale) désigner un bouc-émissaire, tout en répétant à quel point on a bien géré cette crise.

Mais un jour, cette pandémie sera maîtrisée. D’une façon ou d’une autre. La division de la société, elle, restera bien plus longtemps et on devra attendre pendant de longues années avant que les gens fassent à nouveau confiance à un gouvernement.

C’est le moment pour freiner sec et pour réfléchir quant à notre propre langage. On devrait arrêter d’insulter, de dénigrer, de faire des reproches, de menacer et d’approfondir davantage cette fraction sociétale. Ceux qui voudraient partir à la chasse aux réfractaires, doivent se calmer. Personne ne connaît actuellement la vérité derrière cette pandémie et il convient d’être très prudent avec des affirmations pseudo-scientifiques, glanées sur les réseaux sociaux et proposées par des pseudo-scientifiques qui cherchent à exister par tous les moyens.

La question qui se pose aujourd’hui, n’est pas comment organiser la chasse aux non-vaccinés, mais comment assurer un vivre-ensemble aujourd’hui et demain. Il ne faut pas se laisser entraîner dans cette spirale de la haine que propose le gouvernement. Et une accalmie de la situation doit commencer par – le langage. Retrouvons le chemin vers la discussion, le débat, l’échange de points de vue. A un moment où même les plus éminents scientifiques n’arrivent pas à avoir une lecture partagée de la situation, ce n’est pas aux citoyens de se substituer aux experts pour condamner autrui sur aucune base réelle. Là, il ne s’agit pas seulement d’un virus, mais aussi de la qualité du vivre-ensemble dans la société de demain. Du calme !

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