La lutte contre un chômage important…

… une priorité pour la nouvelle grande région de l’est de la France !

Un peu de géographie d'ACAL... à Cherleville-Mézières (point jaune), le chômage est de 13,7%. Foto: Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Par Alain Howiller) – Pendant que citoyens et élus «phosphorent» sur le nom à donner à la méga-région de l’Est «Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine» (ACAL), les fonctionnaires de l’institution régionale – comme les conseillers régionaux eux-mêmes- apprennent à travailler et à vivre ensemble -et cela est significatif- dans sa dernière note de conjoncture, la Direction Régionale de Strasbourg de la Banque de France appelle : «Jusqu’au mois de Juin 2016, les analyses conjoncturelles de la direction régionale de la Banque de France couvrent le périmètre des anciennes régions. A compter de Juillet, les enquêtes porteront sur la région «Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine». Cette note portant sur les analyses du mois de Janvier relève : «(Une) Stabilité de la production industrielle après plusieurs mois de de légère croissance et (un) maintien de ce niveau à court terme». La note signale, par ailleurs, une «stabilité de l’activité dans les services avec une perspective d’amélioration».

Pas encore de quoi sauter d’enthousiasme sur sa chaise, comme un cabri, d’autant que dans sa note de février «l’Observatoire de l’économie  alsacienne»(1) ne pousse pas non plus à l’optimisme puisque, d’après les chefs d’entreprise consultés dans le cadre de son panel, c’est le maintien de la situation qui, là aussi, l’emporte : seuls 16 % des entrepreneurs estiment que leurs effectifs vont augmenter au cours de ce premier trimestre 2016 alors que 13 % pensent qu’ils vont diminuer et qu’ils ne sont que 18 % (contre 27 % lors de la consultation précédente) à penser que l’activité va augmenter et 11 % (contre 16 %) que la rentabilité va augmenter ! Cela rejoint, en gros, les constats dressés par la «Banque Publique d’Investissement» (BPI-France) dont la dernière note de conjoncture relève que 28 % des chefs d’entreprise alsaciens (15 % estimant le contraire) comptent sur un développement de leur activité, 19% pensent augmenter leurs effectifs (10% pensent les réduire). La note de conjoncture de la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Alsace constate une légère augmentation des effectifs notamment dans l’industrie, une amélioration de la trésorerie, du chiffre d’affaires et de la rentabilité, avec des prévisions d’embauche dans les grandes entreprises.

L’Est : 6e région pour le taux de chômage ! – C’est en marge de ces prudentes données (voir aussi eurojournalist.eu du 3 Février) que les dirigeants des structures régionales de l’INSEE, de la DIRECCTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi) et de la Banque de France ont présenté une étude sur la situation économique de la région ACAL, et plus particulièrement sur l’état du chômage dans cette grande région qui regroupe 5,5 millions d’habitants et qui compte 523.000 demandeurs d’emplois, dont 307.000 n’ayant exercé aucune activité professionnelle.

C’est la sixième (sur 13) région de France (après l’Ile de France, Auvergne-Rhône-Alpes, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Aquitaine-Limousin-Poitou- Charente, Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées) pour le nombre d’habitants et c’est, ex-aequo pratiquement avec la Normandie (10,2%), la cinquième région en ce qui concerne le nombre de chômeurs (10,4% dont, en gros, 10,1 % dans le Haut-Rhin et 9,1 % dans le Bas-Rhin : avec une légère amélioration dans ces deux départements au cours du deuxième semestre en matière du chômage des jeunes).

Mauvais chiffres pour Strasbourg et Mulhouse. – Si au niveau départemental, le Bas-Rhin a le plus faible taux de chômage des dix départements composant l’ACAL, Strasbourg avec une moyenne de 10,6% (10,4 à Metz) dépasse la moyenne départementale et régionale, de même que Mulhouse avec 11,8%, ce qui ne les place pas pour autant, dans ce qu’on pourrait appeler des poches de chômage relevées dans le «Grand Est» comme Troyes (avec un taux de 12,9%), Forbach (13,9%), Charleville-Mézières (13,7%), Saint Dié (14,4%), Lunéville (11,9%), Verdun (11,3%) ou Reims (11,1%)…

Des secteurs qui, il est vrai, ne doivent pas faire oublier, au niveau de la «grande région», Nancy (9,9%), Chaumont-Langres (7,6%), Epernay (8%), Châlons-en-Champagne (8,9%), Bar-le-Duc, Sarrebourg, pour ne prendre que des secteurs connus, dont les taux de chômage se situent parfois largement en dessous des 10% comme à Epernay (8%) ou Chaumont-Langres (7,6%). Fortement industrialisée, donc plus exposée au repli de l’industrie, l’Alsace a dû faire face, ces dernières 10 années, à une montée du chômage, ce qui n’empêche pas la région alsacienne de compter, elle aussi, des secteurs qui échappent à la moyenne : Colmar (8,5%), Saint-Louis (7,9%), Sélestat (7,9%), Haguenau (7,6%), Wissembourg (6,4%), Saverne (7,8%), Molsheim-Obernai (6,9%). Il n’échappera à personne que ces secteurs comptent un nombre important de travailleurs frontaliers allant en Allemagne ou en Suisse ou bénéficiant de l’apport d’investissements étrangers (le plus souvent également… allemands ou suisses) !

Industrie : 1 emploi sur 4 détruit ! – Les chiffres sont d’autant plus préoccupants, en Alsace, qu’après avoir longtemps résisté à la dégradation de l’emploi constatée au plan national, la région alsacienne a donnée des signes de repli ces dernières années au point d’avoir pratiquement rattrapée pratiquement le niveau des statistiques nationales. ACAL n’a pas plus échappée au phénomène : Champagne-Ardenne ou la Lorraine ont même moins bien résisté que l’Alsace… comme l’a relevé Antoine Latham dans le quotidien «DNA» : «La destruction d’emplois salariés a été nettement plus forte dans le nord-est du pays, pour partie en raison de la place importante occupée par l’industrie. Cette dernière est passée d’une base 100 en 2005 à un indice proche de 75 l’an dernier, soit un emploi détruit sur quatre !»

C’est ce qui explique que le Président d’ACAL, Philippe Richert ait déclaré récemment : «Je prendrai toutes mes responsabilités pour travailler avec l’Etat en matière de développement économique et d’emploi. Oui, je pense que nous n’avons pas de temps à perdre et que nous devons concentrer les moyens de l’Etat et des Régions pour créer de l’activité et de l’emploi. Le temps est venu d’unir nos efforts». Et le Président de décliner ses intentions (présentées dans eurojournalist.eu du 3 février) en soulignant son souhait de voir confie aux régions le «pilotage» des actions en faveur de l’emploi des chômeurs peu qualifiés qu’on formerait pour leur proposer les places restées libres faute de candidats qualifiés : dans La foulée des promesses du Premier Ministre, qui a confirmé ce «pilotage» par les régions, pourra-t-elle se concrétiser ?

Etat + Régions : même combat ? – Décidée à s’associer au plan gouvernemental de relance de l’emploi, à condition que l’Etat lui reconnaisse un rôle de pilote, ACAL profitera de l’amélioration et de l’extension des outils créés précédemment en ex-Région Alsace sur le plan de l’aide aux investissements, à la création d’entreprise, à la formation professionnelle y compris transfrontalière.

Il est intéressant  de relever, dans ce contexte, que d’après le Directeur, à Fribourg, du “Wirtschaftsverband Industrieller Untertnehmen Baden – WVIB» (Fédération des entreprises industrielles du Pays de Bade), 88% des entreprises pensent bénéficier d’une stabilisation à bon niveau voire d’une augmentation de leur chiffre d’affaires en 2016 et que si, en 2015, 56%… seulement des entreprises au lieu de 65% l’année précédente, ont augmenté leurs effectifs, c’est essentiellement par manque de main d’œuvre !…

Pour la création d’emplois, ACAL compte, notamment, sur l’expérience apportée par la société régionale Alsace-Capital créée en 2012 pour participer à la création d’entreprises, contribuer à la naissance de fonds propres, à la transmission d’entreprises, au conseil, au développement, qui elle, participera tout particulièrement aux efforts, appuyée par la Région et les banques qui ont été à son origine (CIC-Est, Neuflize, Banque Populaire, Crédit Mutuel et Banque Kolb).

ACAL + Eurometropole : un accord ! – Plus récemment, ACAL (tout comme de son côté l’Eurométropole Strasbourg), a jeté les bases d’un accord avec l’institution financière d’Etat qu’est la «Caisse des Dépôts et Consignations» (dont dépend la «Banque publique d’investissement – BPI»). Il s’agit par cet accord de favoriser notamment les interventions de la «Caisse» dans les entreprises (création, redressement). Il est clair que la bataille contre le chômage est devenue prioritaire.

Mais il est clair aussi que cette bataille ne sera pas gagnée sans les véritables créateurs d’emplois que sont les entreprises. Elles créeront des emplois, lorsque l’Etat leur aura laissé, en plus d’une indispensable confiance, les moyens d’investir. Mais comme aurait pu dire… Rudyard Kipling : ceci est une autre histoire !… La polémique qui s’est engagée autour du projet de réforme du code du travail en apporte une nouvelle preuve !

(1)   L’Observatoire a été créé à l’instigation des DNA, avec le concours de l’Ordre régional des Experts Comptables et le Crédit Agricole Alsace Vosges. Les sondages auprès des chefs d’entreprise sont menés par «l’Ecole de Management de Strasbourg-Partenaires».

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