La nouvelle Commission européenne

Blanche-Neige et les vingt-sept nains

Ursula von der Leyen hier à Strasbourg Foto: marcchaudeur / Eurojournalist(e) / CC-BY-SA 4.0int

(Marc Chaudeur) – On a envie de l’appeler Séraphine Lampion, tant elle attire et renvoie la lumière (et la produit ?). Un look impeccable, Ursula von der Leyen. Lorsqu’elle parle au milieu de l’hémicycle ou plus encore, lors de la conférence de presse de l’après-midi, elle semble baigner dans la lumière, avec sa veste orange vif et sa chevelure claire… Voilà ce que devrait devenir enfin l’Union Européenne : un endroit du monde où se fixent les projecteurs admiratifs, et qui renvoie les rayons lumineux qu’elle-même et ses voisins sur Terre produisent. Le centre du monde, en somme. Mais le pourra-t-elle ?

La nouvelle Commission Européenne a été élue à une grande majorité hier à Strasbourg. Non sans peine, depuis le mois de juin dernier, puisque l’ex- ministre de la Défense allemande n’avait été élue que grâce à 9 voix… Et malgré l’appellation malencontreuse de certaines Commissions, malgré l’ »Affaire Goulard » et la plus récente « Affaire Breton «  (conflit d’intérêt manifeste, que dénoncent les Verts !), malgré la nomination controversée de pas moins de 3 commissaires. Et non sans problèmes liés à sa définition, voire à son essence même. Cela fait beaucoup, certes.

Le projet européen consiste en un ensemble séduisant, prenant en considération toute l’importance du social et de l’écologie – trop pour la droite, pas assez pour beaucoup de socialistes et le groupe des Verts, qui s’est abstenu. 26 commissaires dont 12 femmes, davantage que la Commission Juncker (9 femmes seulement). Ce projet veut contenir un New Green Deal, une Nouvelle Donne Verte. Pourra-t-il mettre en œuvre ce qu’il préconise ? Rappelons que le moteur principal de l’Histoire, c’est l’espoir !

461 votes pour, 157 voix contre et 89 abstentions (les Verts et 5 députés français)… S’agira-t-il d’une politique « de droite », comme l’ont suggéré certains vilains voyous lors de la conférence de presse donnée par U.v.d.L. après le vote ? A cela, la nouvelle Présidente répond avec une certain impatience que la très large majorité du camp pro-européen en a plébiscité les fondements clairs, sans ambigüité. Avant qu’on ne dispose d’un vrai Programme détaillé, vers la fin janvier.

Quatre points essentiels captent l’attention de tous et nécessitent absolument la mise en œuvre de solutions dans les 5 prochaines années. Celui du changement climatique ; la question des migrations ; celle du numérique, et enfin celle de l’action extérieure de l’UE – avec un chapitre fameusement délicat, celui de la répartition des tâches internationales avec l’OTAN… Points complémentaires, bien évidemment. Et qui s’unissent sous le mot d’ordre de von der Leyen : « Mon message est clair : commençons à travailler ! » Bonne idée, en effet, et cela signifie qu’avant elle, personne n’a jamais travaillé… Merci, Ursula. Yé mé vengerai.

Autre motto : « Etre humain et efficace ». Etre humain, on sait faire. Mais efficace ? Pour chacun des 4 points évoqués, le problème se posera. Les migrations : l’UE mettra au point un plan global. Cela, personne d’autre que l’UE, fière de ses valeurs et de son concept d’état de droit, ne le fera ; et elle produira un projet global de régulation qui doit devenir un exemple pour le monde entier. En matière de relations extérieures, l’UE, avec notamment sa Commission géo-politique, dispose d’instruments uniques ; et son champ d’intervention ne sera pas celui de l’OTAN, malgré d’évidentes intersections. Nous aurons bientôt droit à une approche générale (sans jeu de mots) de la sécurité en même temps qu’à de (nouvelles?) structures pour agir, le cas échéant. Ces dernières années déjà, à l’occasion de la menace de DAESH en Afrique, on a créé l’Union Européenne de Défense, ainsi que le Fond Européen de Défense, qui relèvera du commissaire Thierry Breton. Et qui, entre autres, financera sans doute bientôt un drone européen.Pour le numérique, il existe de grands acteurs internationaux, mais ce sont des opérateurs économiques.

En tout cela, l’Union européenne, c’est différent, nous dit-on : l’UE placera l’humain d’abord, et non par dessus bord.

Pour ce qui est du Green Deal, Ursula von der Leyen est vraiment ambitieuse, au point que certains eurodéputés du PPE la qualifient de chimérique (nous, nous aimons entendre cela) : elle proclame qu’ « en 2050, si le travail est bien fait, l’Europe sera le premier continent du monde carbo-neutre »  en même temps qu’elle « sera chef de file dans la résolution des grands enjeux mondiaux ». Voilà qui est bien ! Et les agriculteurs traditionnels (et les bios aussi, qui rencontrent de graves difficultés) qui ont manifesté hier ? Cela reste un peu nébuleux… En tout cas, on ne peut qu’inciter avec obstination les commissaires à « bien faire leur travail » !

Et enfin, que deviendront l’Albanie et la Macédoine du Nord, éjectés hors des vertes prairies de l’Europe institutionnelle ? Von der Leyen se réjouit de ce qu’on ait mis sur table le renouvellement des négociations. Ces 2 pays méritent, dit-elle, qu’on ne change pas de règles au milieu du gué – mais en même temps, des réformes s’imposent dans ces Etats. Les bases juridiques de l’Europe sont claires…

On peut regretter l’abstention des Verts . Mais d’eux émane l’opposition la mieux articulée à ce qu’on peut appeler l’écolo-libéralisme d’Ursula von der Leyen. A guetter, un moment important, bientôt : la mouture précise du Programme européen, vers la fin janvier. Wait and see.

 

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