Là où le «franco-allemand» fonctionne à merveille…

Pendant que les relations franco-allemandes semblent battre de l’aile au niveau politique, elles sont vivantes là où les gens s'engagent dans des projets d’échanges concrets. Et comment !

Pendant 4 semaines, Gaëlle A., élève du Lycée des Métiers Charles Pointet à Thann, se plonge dans le monde du travail allemand - une expérience enrichissante pour tout le monde. Foto: Phil Bergdolt

(Réd) – Depuis plusieurs années, le Lycée des Métiers Charles Pointet à Thann en Alsace organise des échanges dans le cadre du dispositif «Azubi – BacPro» pour des stagiaires alsaciens dans des entreprises allemandes. Dans le domaine de l’hôtellerie et de la gastronomie, ce sont plusieurs hôtels «Mercure» à Freiburg qui accueillent les stagiaires de ce lycée pour des stages d’une durée de 4 semaines. 37 élèves de ce lycée sont concernés cette année par ce programme, comme l’indique Madeleine Meyer, proviseure du lycée qui a su établir des coopérations étroites avec l’Ecole Edith Stein à Freiburg, la Hoga à Villingen et la Hoga à Tettnang. Philippe Bergdolt et Kai Littmann ont rencontré les acteurs de cet échange.

Eric Lassiaille, propriétaire du «Panoramahotel» à Freiburg, peut-être le plus beau hôtel fribourgeois situé au-dessus de la ville et offrant une vue magnifique sur toute la vallée rhénane, est content. Chef de cuisine de tout premier rang, homme d’affaires, propriétaire de cet hôtel, il n’a pas oublié ses débuts. «J’ai travaillé dans 5 pays différents et je crois que cette expérience à l’étranger est des plus importantes pour les jeunes dans notre métier. Faire connaissance avec d’autres cultures, d’autres religions, d’autres codes de conduite, cela ouvre l’esprit et rend plus tolérant». Pour faire vivre sa propre expérience aux jeunes Alsaciens, il s’est engagé dans ce programme d’échange permettant aux jeunes Alsaciens en formation, de découvrir le monde du travail chez les voisins allemands, d’y apprendre la langue professionnelle et de faire connaissance avec une autre culture du travail. Et ça fonctionne à merveille. «Le taux de réussite pour ces stages, et je parle autant de la réussite des jeunes que celle de notre maison, se situe environ à 80%», dit Eric Lassiaille, chiffre confirmé par le directeur du «Mercure» au centre-ville de Freiburg, Patrick Graf-Mathias. «Les jeunes Alsaciens ont très envie d’apprendre, ils veulent participer activement au travail et pour nous, il s’agit d’une véritable ‘success story’», se réjouit-t-il.

L’organisation de cet échange par l’école est parfaite. – Pourtant, ces derniers temps, on pouvait lire des articles dans la presse régionale qui faisaient état d’un manque de motivation de la part des jeunes Alsaciens d’approcher le marché de l’emploi allemand et aussi, du manque de volonté de la part des entrepreneurs allemands d’accueillir de jeunes Français. Les expériences faites par Eric Lassiaille et Patrick Graf-Mathis ne confirment en rien ces problèmes. «L’organisation par le Lycée des Métiers Charles Pointet à Thann est parfaite, ils s’occupent de toute la partie administrative et nous nous chargeons de l’accueil et des aspects de la formation sur le terrain», disent les deux.

Toutefois, Eric Lassiaille a des idées comment on pourrait encore améliorer ces programmes d’échanges. «C’est à notre niveau qu’on pourra progresser», explique-t-il, «c’est à nous de faire aimer nos métiers aux jeunes. Nous devrions établir ce que j’appellerais des ‘échanges toniques’ avec d’autres collègues – et permettre aux jeunes de passer du temps chez l’un et chez l’autre – ce ne sont pas les hôtels et restaurants de qualité qui manquent dans la région et ainsi, les jeunes pourraient faire des expériences encore plus variées et complètes.»

Aimer son métier. – Alors, d’où viennent les problèmes récemment évoqués ? «Ce n’est pas le manque d’information, tout le monde édite aujourd’hui des brochures et des dépliants d’information. C’est à nous d’aller dans les établissements et de donner envie aux jeunes de partager ce que nous aimons dans nos métiers. Il faut leur parler du plaisir de rencontrer des producteurs régionaux qui vous font goûter leur viande, légumes ou fromages, de la joie du travail bien fait et aussi des avantages qu’offrent nos métiers. On parle souvent des contraintes dans l’hôtellerie, du travail aux horaires où d’autres ne travaillent pas, mais justement, ceci n’est pas un inconvénient, mais un avantage ! Dans nos métiers, nous avons du temps de libre lorsque les autres travaillent, nos métiers permettent de connaître le monde et la diversité de ses cultures, nos métiers offrent d’énormes possibilités de carrière pour ceux qui s’investissent à fond – et nous devrions aller dans les écoles et partager notre passion avec les jeunes !»

Et les jeunes ? – Comment vivent-ils cette expérience à l’étranger ? Pour Gaëlle A. (17), il s’agit déjà du deuxième stage dans un hôtel allemand. «Bien sûr, parfois c’est un peu dur d’être loin de la famille et des amis», dit-elle, «mais c’est une formidable expérience. Ici, j’apprends la langue allemande dans la pratique et je fais beaucoup de progrès. J’ai envie de voyager, souvent les postes à l’étranger sont mieux payés qu’en France et finalement, je ne vois pas le temps passer !». Si elle peut recommander cette expérience à d’autres ? Sans hésiter une seconde, elle répond «oui !» Même réponse de la part de Patrick Graf-Mathis, le patron de l’hôtel où Gaëlle A. effectue son stage. «Je ne peux que recommander à mes collègues de s’engager dans ces programmes ! Il faut donner une chance aux jeunes et le taux de réussite nous donne entièrement raison.»

Concernant les échanges, le mot de la fin à Eric Lassiaille. «Oui, je suis très satisfait de ce programme, mais on ne devrait pas toujours raisonner qu’en termes de jeunes Alsaciens qui viennent faire des stages en Allemagne. Il faudra que cette possibilité existe de la même façon pour les jeunes Allemands en France et finalement, dans le plus grand nombre de pays possible. Pour permettre un vrai développement interculturel et professionnel aux jeunes, il faudra que les échanges ne se passent pas à sens unique. Mais cela viendra…»

Ecole, entreprises, jeunes – lorsque tout le monde s’y met avec le même engagement, le «franco-allemand» fonctionne très bien. Très, très bien même.

Eric Lassiaille (à droite) transmet sa passion pour son métier aux jeunes. Exemplaire. Foto: Phil Bergdolt

Eric Lassiaille (à droite) transmet sa passion pour son métier aux jeunes. Exemplaire. Foto: Phil Bergdolt

1 Kommentar zu Là où le «franco-allemand» fonctionne à merveille…

  1. 3locations // 20. Mai 2016 um 15:06 // Antworten

    Ce cas est quand même particulier car il me semble que le chef d’entreprise est d’origine française, ce qui facilite bien la communication auprès des jeunes lors du passage dans les lycées en Alsace …
    En outre, le fait d’avoir au moins un responsable de culture française dans une entreprise allemande facilitera l’immersion dans un monde culturel et linguistique certes à quelques kilomètres de son lieu de résidence, mais parfois fort éloigné dans certains domaines (administration, …).

    C’est en tout cas mon expérience personnel lorsque j’ai réalisé mon stage d’étude de quelques mois du côté d’Ulm.

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