La reprise (42) – « Il est urgent d’attendre… »

Après les annonces faites par Emmanuel Macron, nous voulions savoir comment le nouveau confinement était vécu par les commerçants du centre-ville strasbourgeois.

Yannick Garzennec et Jacques Zucker - une attitude de sportifs face à la crise et le 3e confinement. Foto: Marine Dumény / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Depuis bientôt un an, Eurojournalist(e) suit trois enseignes du centre-ville strasbourgeois – l’Hôtel de la Cathédrale, le restaurant « Muensterstuewel » et la boutique « Blanc du Nil ». Pendant un an, nous avons documenté les efforts de ces trois enseignes de se relancer, de maintenir leurs équipes, de garder le moral. Maintenant, à l’occasion du troisième confinement, interview avec Jacques Zucker « Blanc du Nil ») et Yannick Garzennec (« Muensterstuewel »).

Messieurs, vous avez pris connaissance des nouvelles mesures décrétées mercredi soir – quelle est votre réaction ?

Yannick Garzennec : J’écoute ces annonces comme je les écoute depuis le mois d’octobre, lorsqu’on nous avait annoncé la réouverture de nos enseignes pour le mois de janvier. Aujourd’hui, nous somme au mois d’avril et à vrai dire, je n’ai aucune raison de croire en une réouverture au mois de mai. On nous annonce la possibilité de rouvrir les terrasses à la mi-mai, mais il faut également tenir compte de la météo en Alsace. Il suffit que le ciel soit gris et on se retrouvera chaque jour devant la décision si oui ou non, on ouvrira la terrasse. Dans les conditions actuelles, ce sera difficile à gérer. Donc, il est urgent d’attendre…

Jacques Zucker : Moi aussi, j’ai attentivement suivi les nouvelles mesures. Il devient de plus en plus difficile de suivre toutes ces annonces, un coup par Macron, après par Castex / Véran ou vice-versa. En attendant, le centre-ville de Strasbourg est désert et rouvrir notre boutique comme au mois de novembre, ne servira pas à grande chose. Et malheureusement, le quartier général de notre marque ne nous soutient pas – il faudra donc se débrouiller.

Yannick Garzennec : On n’est effectivement pas obligés à croire en cette date de la mi-mai, mais il convient de souligner que les aides d’état seront maintenues…

Jacques Zucker : Il est toujours facile d’être sur son canapé devant la télévision et de critiquer les mesures annoncées. Je me pose la question si d’autres gouvernements auraient agi différemment et franchement, je commence à fatiguer avec tous ces « Nyaka » et « Fauquons ». Notre réalité, que vous connaissez bien pour nous suivre déjà depuis un an, est toute autre. Malgré une année vraiment compliquée, pendant laquelle on s’était fait insulter et même agresser, nous sommes toujours là. Et on croit en des jours meilleurs.

Une année sans chiffre d’affaires – comment est-ce que vous vous en sortez ?

Jacques Zucker : Nous avons terminé l’exercice 2020 sans dettes et c’est notre plus grande fierté. Actuellement, chacun fait comme il peut et doit essayer de tirer son épingle du jeu.

Yannick Garzennec : L’existence de nos établissements n’est pas en danger. On a perdu 60 à 70% de notre chiffre d’affaires et nous sommes déterminés de nous en sortir, même si entre temps, nos réserves fondent. Mais je n’attends pas de pitié, je suis bien conscients que d’autres se retrouvent dans des situations bien pires que la nôtre.

Lorsque vous traversez le centre-ville de Strasbourg, vous constatez comme nous, les nombreuses boutiques et enseignes qui ont déjà fermé ou qui s’apprêtent à mettre la clé sous la porte. Cette évolution vous inspire quoi ?

Yannick Garzennec : La crise pandémique est un révélateur de ce qui ne fonctionne pas dans le centre-ville de Strasbourg. Quand je vois le nouveau centre commercial « Shopping Promenade », je constate qu’au centre-ville, on n’était pas préparés à cette arrivée d’une nouvelle concurrence. Au centre-ville strasbourgeois, nous avons besoin d’une vraie projection, d’une stratégie. Si vous regardez bien, « Shopping Promenade », ce sont des commerçants qui se sont mis ensemble pour un intérêt commun. Et c’est exactement ça qui manque au centre-ville strasbourgeois.

Jacques Zucker : Je confirme ce que dit Yannick. Dans toutes les structures chargées de l’animation commerciale et événementielle du centre-ville strasbourgeois, les responsables gagnent très bien leur vie, mais qu’est-ce qu’ils ont fait pour nous ? On cotise régulièrement à toutes ces structures et en contrepartie, on doit constater que ces structures ne se sont pas préparées aux changements qui ont et qui avaient lieu – il faudra que ces structures mettent les bouchées doubles pour réellement soutenir leurs adhérents.

Malgré les difficultés, on perçoit quand même une note d’optimisme dans votre discours. Ou est-ce seulement une impression ?

Jacques Zucker : Yannick et moi, nous sommes tous deux des anciens sportifs du monde du rugby. Le rugby, c’est la gnac, la force, l’espoir, le respect. Fort de cette expérience, nous savons que ce ne sera pas en se lamentant qu’on s’en sortira…

Yannick Garzennec : Jacques a raison. Dans le rugby, il ne faut pas avoir peur de l’adversaire, mais le respecter et travailler à son propre niveau. Les difficultés sont en réalité des défis et avec notre vécu de sportif, on sait qu’il faut continuer à affronter ce challenge. Et c’est exactement ce que nous faisons !

Messieurs, merci pour cet entretien !

 

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