La Russie prend la présidence du Conseil de Sécurité de l’ONU

Incroyable, mais vrai. Dans quelques jours, c'est le tour de la Russie d'assurer la présidence du Conseil de Sécurité de l'ONU. Le renard devient le chef du poulailler.

Sergej Lavrov est tout content de pouvoir présider les réunions du Conseil de Sécurité de l'ONU. Il ne faut pas lui faire ce plaisir... Foto: MID.ru / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Parfois, le calendrier fait mal les choses. Le 1er Avril, et ce n’est pas un poisson d’avril, la Russie prendra la présidence du Conseil de Sécurité de l’ONU. Si dans un premier temps, cette info peut provoquer un sourire, dans un deuxième temps, on constate à quel point l’organisation mondiale, continentale et nationale est en décalage avec les réalités du monde d’aujourd’hui. Ce qui n’a pas empêché la Russie de jubiler.

C’est la porte-parole du ministère des affaires étrangères russe Maria Sacharova d’annoncer le programme pour la présidence russe : « L’un des moments clés de la présidence russe sera la discussion publique et à très haut niveau concernant le sujet ‘multilatéralisme efficace par la défense des principes fondamentaux de l’ONU’ », a-t-elle déclaré et la Russie doit être le seul pays à se réjouir d’avance de ce sujet – les autres membres du Conseil de Sécurité (sauf la Chine) préféreraient certainement débattre de la guerre déclenchée par la Russie en Ukraine. Mais il y a fort à parier que ces prochains mois, la Russie fera son possible pour empêcher les débats concernant l’agression russe. Au lieu de parler de la guerre, on parlera du « multilatéralisme efficace par la défense des principes fondamentaux de l’ONU ».

L’agresseur russe présidera donc le Conseil de Sécurité de l’ONU. Pourtant, il est évident que la sécurité mondiale est actuellement menacée principalement par un pays, la Russie. Et puisque les membres permanents de ce Conseil de Sécurité disposent d’un droit de veto, la délégation russe sera intouchable pendant sa présidence. Mais si Sergeij Lavrov, le ministre des affaires étrangères qui depuis un an, a vieilli de 10 ans, veut présider au moins la première réunion sous la présidence russe, force est de constater que ses jours à la tête de la diplomatie russe sont comptés. Celle qui est pressentie comme la prochaine ministre des affaires étrangères, la virulente Maria Sacharova, remplace déjà peu à peu son patron. Pour la diplomatie russe (qui actuellement se trouve au point mort), la perte d’influence de Lavrov n’est pas une bonne nouvelle, car Maria Sacharova est une représentante d’une nouvelle génération politique en Russie qui est totalement sur la ligne de Poutine et qui estime souvent que le chef du Kremlin ne vas pas assez loin.

Les autres membres du Conseil de Sécurité n’ont pas beaucoup d’option. S’ils ne veulent pas participer activement à un show propagande pendant la présidence russe, il ne pourront que boycotter un Conseil de Sécurité qui n’a malheureusement aucune incidence sur les conflits dans le monde. Certes, de temps en temps, ce conseil réussit à voter une résolution (ce qui est assez rare), mais ces résolutions n’engagent personne à rien. Autant boycotter les réunions de ce conseil pour envoyer un signal fort à Moscou. Mais même cela ne se fera pas et ainsi, le monde regardera avec de grands yeux la Russie présider le Conseil de Sécurité de l’ONU.

L’organisation mondiale n’ayant qu’une incidence morale, mais pas pratique sur l’actualité mondiale ; les organisations continentales s’enlisant dans des scandales de corruption et d’inefficacité ; les gouvernements en défaillance face aux crises mondiales – quand est-ce qu’on se rend à l’évidence que ces organisations, pour la plupart créées après la IIe Guerre Mondiale, ne sont plus en phase avec le monde d’aujourd’hui ? Même si le constat est amer, mais il faut réformer les systèmes politiques à tous les niveaux, sans exception.

La situation à l’ONU est rocambolesque. Est-ce que quelqu’un peut imaginer qu’en 1940, l’Allemagne nazie aurait pris la présidence d’un tel conseil ? Bien sûr que non. En principe, si l’Occident veut vraiment isoler la Russie, il faudra effectivement boycotter l’intégralité des réunions du conseil sous présidence russe. Ainsi, la Russie et la Chine pourront discuter à deux et puisque ces deux pays ne pourront pas voter à deux des résolutions, il faudra geler le conseil, si déjà il n’y a aucune possibilité d’exclure la Russie du conseil. Et après, qu’on le veuille ou non, il faudra s’attaquer à la réforme de tous les systèmes politiques qui ne fonctionnent plus. Si ce n’est pas déjà trop tard pour s’y mettre.

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