La Russie se fiche de la Cour Européenne des Droits de l’Homme

Après que la Cour Européenne des Droits de l’Homme ait sommé la Russie de libérer immédiatement Alexej Navalny, Moscou a donné sa réponse : Njet.

La Russie n'entend pas libérer Alexej Navalny - que feront les institutions européennes ? Foto: Evgeny Feldman / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Il est rare que la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) à Strasbourg prenne des décisions en référé. Mais dans le cas de l’opposant russe Alexej Navalny, elle a fait une exception en sommant la Russie de libérer immédiatement l’opposant de Poutine, arguant que sa vie était en danger. Après la tentative d’assassinat de Navalny, dont l’implication des services secrets russes ne peut pas être exclue, la CEDH a estimé nécessaire d’intervenir immédiatement. Seul problème : la Russie n’entend pas respecter ce jugement.

Il y a deux semaines, suite au retour de Navalny de Berlin où sa vie avait été sauvée après l’empoisonnement subi lors d’un vol entre Omsk et Moscou, Navalny avait été condamné à 3,5 ans d’emprisonnement dans un goulag, pour avoir violé les conditions d’un sursis dont il faisait l’objet. Peu étonnant qu’il n’ait pas pu respecter ces conditions – suite à la tentative de meurtre, il avait été soigné à La Charité, le célèbre hôpital berlinois. Entre la vie et la mort et dans un coma profond, Navalny n’était pas en mesure de remplir ses obligations dans le cadre de son sursis. Le procès, très critiqué à l’échelle internationale, était une farce, un procès politique.

La cour strasbourgeoise, qui avait déjà vivement critiqué le procès contre Navalny en 2017 (et qui avait conduit à une peine avec sursis – le sursis dont Navalny ne pouvait pas respecter les conditions en vue de son état), a donc demandé à la Russie de libérer immédiatement l’opposant du Kremlin, mais seulement quelques heures après cette demande, le ministre de la justice russe Konstantin Tchouitchenko l’a refusé, estimant qu’il n’y avait « pas de fond juridique » à la démarche de la CEDH. En plus, il a vivement critiqué « l’ingérence grossière » de la cour dans les affaires de son pays.

Cela pose un grand problème pour la CEDH et le Conseil de l’Europe dont dépend la cour. En principe, la Russie, signataire de la « Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales », doit respecter les décisions de la CEDH et normalement, elle s’y conforme aussi. Mais en ce qui concerne Navalny, la Russie n’entend pas donner suite à cette décision, ce qui mettra le Conseil de l’Europe devant la délicate tâche de devoir sanctionner la Russie. Mais comment faire respecter une telle décision dans un pays qui refuse de s’y conformer ?

Il ne faut pas rêver – la demande de la CEDH n’est guère plus qu’un soutien moral pour Navalny. Le président du comité juridique du parlement russe, Michail Emeljanov a remis une couche en rappelant la nouvelle constitution de la Russie qui stipule qu’en Russie, le droit national prime sur le droit international.

Si l’engagement européen pour Alexej Navalny est tout à fait honorable, on se pose toujours la question pourquoi cette même Europe n’a entrepris aucune démarché similaire pour faire libérer le lanceur d‘alerte Julian Assange qui est toujours détenu et torturé en Grande Bretagne. Mais visiblement, les institutions européennes arrivent plus facilement à condamner les violations des Droits de l’Homme en Russie qu’en Grande Bretagne. Le silence coupable de l’Union Européenne dans le dossier de Julian Assange décrédibilise malheureusement la démarche concernant Alexej Navalny, une démarche qui du coup, est également plus politique que juridique.

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