Laissez les frontières ouvertes ! (Au moins, pour le virus…)

Le taux d'incidence en Moselle est plus élevé que celui de la Région Grand Est et la moyenne nationale. Les différentes stratégies du gouvernement français ne semblent pas fonctionner.

La frontière luxembourgeoise (ici à Mondorf-les-Bains) doit rester ouverte, quoi qu'il arrive. Dit le Luxembourg. Foto: Cayambe / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Chaque semaine, lorsque les Castex, Macron ou Véran se présentent devant les médias, ils sont contents. Tout est encourageant, nous sommes les champions. Et puisque nous sommes tellement champions, on se fiche des chiffres catastrophiques et on se vante de mieux gérer la situation que « les autres ». Mais visiblement, on a du mal à lire et à comprendre les chiffres à Paris – les chiffres sont inquiétants et ce n’est pas le comportement auto-satisfait des gouvernants qui y changera quelque chose. Mais actuellement, tout le monde est fatigué de s’occuper de la santé publique : maintenant, on mise tout sur l’économie.

Deux informations du week-end retiennent l’attention. D’une part, la France et la Grande Bretagne allègent les mesures sanitaires à la frontière franco-britannique, histoire de fluidifier la circulation des camions qui s’entassent devant les postes de frontière britanniques, puisque les Britanniques, saouls de leur « libération du joug européen » avaient tout simplement « oublié » de se préparer au Brexit tant réclamé. Mais bon, ils n’avaient que 4,5 ans pour se préparer…

A partir de maintenant, la circulation entre la Grande Bretagne et la France, deux des pays européens présentant le plus fort taux d’incidence, sera facilitée. Une bonne nouvelle pour les chauffeurs de camions, pour les sociétés de transport et – pour le virus qui pourra ainsi continuer à circuler assez librement entre l’île britannique et le continent européen. Les routiers qui passeront moins de 48 heures en Grande Bretagne ne devront plus, à leur retour, présenter un test Covid-19. Une très bonne mesure pour assurer que le variant détecté en premier en Grande Bretagne, ne reste pas enfermé au Royaume Uni. Et puisqu’il est beaucoup plus virulent que d’autres variants, il fallait quand même en assurer une circulation plus juste aussi en France et ailleurs en Europe.

On préfère donc d’assurer la circulation du virus aux bouchons devant la frontière britannique. Dont acte. On y repensera lorsque nos gouvernants s’auto-féliciteront la prochaine fois pour leur gestion exemplaire, beaucoup plus performante qu’ailleurs.

Mais ailleurs, on suit également l’évolution en France, surtout dans le département Moselle où on atteint aujourd’hui un taux d’incidence de presque 300. Maintenant, on y craint que l’Institut Robert Koch puisse classer la Moselle au niveau 2 (« zone à risque à haute incidence ») ou au niveau 3 (« zone à risque à forte présence de variants »). Cela impliquerait des contrôles beaucoup plus sévères à la frontière et de nouvelles obligations pour les travailleurs et travailleuses frontaliers, notamment l’obligation de présenter un test actuel à chaque passage de la frontière. Mais là, une « conscience européenne » se réveille dans la Grande Région.

Mais il n’y a que peu de chances à ce que la France puisse trouver un accord avec l’Allemagne à l’instar de celui avec la Grande Bretagne. L’Allemagne où le taux d’incidence au niveau national se situe actuellement à 60 (!), n’aura pas trop envie de s’organiser pour permettre une circulation maximale du virus et de ses variants. Inquiet, le ministre des affaires étrangères luxembourgeois Jean Asselborn a lancé un appel émouvant – « Laissez la frontière ouverte ! ». Mais il ne faut pas se tromper – ce n’est pas l’Espace Schengen qui intéresse le Luxembourg, mais uniquement son économie.

« Nous devons tout faire pour que les travailleurs frontaliers puissent arriver à leur lieu de travail et ce, sans encombre », a martelé Asselborn, sans pour autant cacher son véritable intérêt. « 60% des salariés dans nos hôpitaux, EHPADs et autres structures de soins à la personne, sont des frontaliers. Si ces frontaliers ne pourront plus circuler librement, notre système de santé risque de collapser. » Tous les jours, 100 000 Français, 50 000 Allemands et 50 000 Belges vont travailler au Luxembourg. Pour sauver l’économie luxembourgeois, on accepte donc la circulation du virus.

En regardant les deux infos ensemble, on constate que désormais, la voie est libre entre la Grande Bretagne et le Luxembourg – puisque les routiers ayant séjourné moins de 48 en Grande Bretagne, ne seront même plus testés.

Nous sommes aujourd’hui à des années-lumière d’une stratégie européenne – mais ce « tricotage national » ne permettra pas de combattre ce virus. Au bout d’une année de vie avec ce virus, avec ses conséquences sociales, sanitaires et économiques, chaque état continue à ne regarder que son nombril. Avec de telles approches, une seule chose est certaine – ce virus avec ses variants restera encore très longtemps avec nous. Mais puisque nos responsables sont tellement contents de leur travail…

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