L‘Allemagne découvre son passé en Grèce

Le gouvernement allemand se montre intraitable sur la question de réparations pour les crimes que les Nazis ont commis en Grèce.

Les Allemands ne veulent plus entendre parler de l'époque nazie. Pourtant... Foto: Bundesarchiv, Bild 183-R99237 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) «Aucun homme», écrivait Oscar Wilde, «n‘est assez riche pour pouvoir racheter son passé». Cette expérience est en train d‘être vécue par les générations d‘après-guerre qui découvrent actuellement les horreurs que les Nazis avait commis entre 1941 et 1944 en Grèce. Mais les appels du pied venant d‘Athènes où l‘on s‘attend à un geste de solidarité de la part de l‘Allemagne, ne déclenchent que de la panique au niveau du gouvernement allemand qui refuse catégoriquement de se pencher sur la question des réparations. Même si le «crédit forcé» que la Banque Nationale de la Grèce a du mettre à la disposition des Nazis, n‘a rien à voir avec des «réparations». Au lieu de se montrer coopératif, le gouvernement allemand accepte les interférences graves qui s‘installent entre les Grecs et les Allemands.

Nikos Kotzias, le ministre des affaires étrangères grec, avait parlé d‘un «compromis» que la Grèce cherchait avec l‘Allemagne. Mais même un compromis semble impensable pour l‘Allemagne. Dont la population apprend avec stupeur que le volet «Grèce» compte parmi les chapitres les plus noirs des Nazis, chose assez peu connue par la majorité des Allemands à qui on n‘enseigne toujours pas toute l‘ampleur de l‘horreur nazie. Aux élèves allemands, on parle de Stalingrad, des camps de concentration, de la défaite, mais pas de tout ce que les Allemands avait fait partout en Europe. C‘est peut être pour cela que l‘opinion publique allemande se laisse tromper par des slogans comme «plus de milliards pour ces Grecs avides».

70 ans après la fin de la IIe Guerre Mondiale, ce n‘est toujours pas à l‘Allemagne de s‘auto-pardonner pour les crimes de guerre perpétrés sous les Nazis, qui, faut-il le rappeler, avaient été élus démocratiquement et donc avec le consentement des Allemands. Bien entendu, les générations ne sont plus coupables de ce qui s‘est passé, mais ils portent toujours la responsabilité vis-à-vis des victimes des deux guerres du siècle dernier.

La réponse allemande est – typiquement allemand. Dans une diction froide de fonctionnaire, un porte-parole du ministère des affaires étrangères a commenté la demande grèque : «Pour nous, le chapitre ‚réparations‘ est clos, juridiquement et politiquement parlant». Basta.

Mais l`Allemagne risque d`avoir une mauvaise surprise, car même les juristes du Bundestag estiment que la demande de remboursement du «crédit forcé» de 476 millions de Reichsmark semble juridiquement parfaitement fondée. Et il semble tout aussi clair que cette somme doit être calculée en valeur actuelle en Euro – voilà ce que l`Allemagne doit à la Grèce, si déjà le gouvernement pense qu`il ne doit pas réagir à la demande grecque d`aider le pays dans une situation aussi compliquée que celle d`aujourd`hui.

En attendant, de nombreux Allemands découvrent pour la première fois les anciennes photos des crimes nazis en Grèce. Nombreux sont ceux qui ignoraient jusqu‘ici que l‘Allemagne avait aussi envahi la Grèce, qu‘elle avait déporté les juifs vivant en Grèce dans les camps de la mort, qu‘elle avait exsangué l‘économie de la Grèce.

L‘Allemagne, par son attitude trop germanique, forcera la main à la Grèce d‘aller chercher justice devant la Cour Internationale. Non seulement, l‘Allemagne risque d‘y perdre la face, mais aussi beaucoup d‘argent. Car la valeur que déterminera la cour pour cette somme de 476 millions de Reichsmark, sera le montant à rembourser. La proposition de Kotzias était avantageuse pour l‘Allemagne. «Je propose la mise en place d`un Conseil de Sages», avait suggéré Kotzias, «qui déterminera ensemble la valeur actuelle de cette somme». Mais il n‘en sera rien – et on comprend que la Grèce, aussi en vue de dernières années, n‘ait pas envie de faire cadeau à ceux qui tiennent responsables pour la crise que traverse le pays actuellement.

Toutefois, force est de constater que l‘attitude allemande fait preuve d‘une mentalité détestable. Le gouvernement craint une précédence, que d‘autres pays puissent se souvenir des torts que les Allemands leur ont infligés et qu‘ils puisse également demander des compensations. Mais il convient aussi de souligner que l‘Allemagne, après avoir dévasté le monde à deux reprises, s‘en est tiré à merveille. Pendant que des pays comme la France devaient encore reconstruire leur pays et leur économie, l‘Allemagne fleurissait grâce aux plans de reconstruction, sans trop se soucier du bien-être des pays ruinés.

L‘arrogance allemande se traduit même dans des propositions qui se veulent conciliantes. Ainsi, Renate Künast (Verts) a proposé la création d‘une fondation en faveur des victimes des Nazis en Grèce. Mais la Grèce est adulte et vaccinée – elle a droit à ce remboursement et personne ne devrait lui dicter comment utiliser cette somme. Si les Grecs veulent en faire une fondation, pourquoi pas. Mais on pourrait autant s‘imaginer que face aux problèmes actuels, la Grèce pourrait aussi utiliser cet argent pour assurer sa survie. A condition que l‘Allemagne se décide d‘assumer sa responsabilité pour les crimes nazis. Ce qui serait quand même la moindre des choses.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste