L’Alsace dit «NON» à la fusion des régions…

… et engage un bras de fer avec le gouvernement !

Le Conseil Général du Bas-Rhin à Strasbourg a également voté en faveur d'un Conseil Unique d'Alsace. Foto: Jean-Luc Stadler / Wikimedia Commons / CC-BY 2.5

(Par Alain Howiller) – On s’y attendait certes, mais la vigueur avec laquelle les élus du Conseil Régional, ceux des Conseils Généraux du Haut- et du Bas-Rhin ont repoussé l’idée même d’une fusion de l’Alsace avec les régions Champagne-Ardennes, voire même la Lorraine, a surpris. Dans les trois collectivités consultées, sur 122 votants 101 se sont prononcés contre toute fusion et se sont prononcés en faveur d’un Conseil d’Alsace qui regrouperait les trois structures. Dans une motion commune, les élus ont demandé au gouvernement et au Parlement «d’abandonner l’idée d’une grande région réunissant les territoires d’Alsace, de Lorraine et de Champagne-Ardenne et de maintenir à l’Alsace ses contours géographiques actuels…»

Le texte demande «de créer en Alsace, dès le prochain renouvellement des assemblées (note de la rédaction : prévu l’année prochaine), une collectivité territoriale unique issue des actuels Départements ainsi que de la Région et dotée d’une capitale régionale : l’Eurométropole de Strasbourg». Avant de demander que ces principes soient inscrits dans le projet de loi sur les fusions des régions, la motion demande que soit ouvert «un droit d’option pour les départements limitrophes qui souhaiteraient à terme intégrer la nouvelle collectivité».

Une fusion sans… champagne ! – Le message est clair : si les départements de la Moselle ou du Territoire de Belfort, aujourd’hui intégrés à la Région Lorraine, voulaient rejoindre le Conseil d’Alsace, ils seraient les bienvenus. Une façon pour les élus alsaciens de répondre à ceux qui reprochaient aux porteurs du projet de Conseil unique d’être ringards, passéistes, partisans d’une région qui cultiverait le «repli sur soi» et refuserait de s’ouvrir en réfutant une «grande région à l’échelle de l’Europe, une grande région symbole d’ouverture et de modernité» !

Cet argument utilisé notamment par ceux (membres du Parti Socialiste) qui se prônaient une fusion avec la Lorraine sans Champagne-Ardennes, a été réfuté par les partisans du maintien de l’Alsace dans les limites géographiques actuelles. Devant le flou d’une réforme qui ne définissait ni les pouvoirs, ni les ressources et encore moins les structures des régions fusionnées, les partisans du conseil d’Alsace ont rappelé qu’il valait mieux «une région forte qu’une région grande !»

A ceux qui, comme le Maire de Strasbourg, favorable à une fusion avec la Lorraine mais affirmant qu’il accepterait le conseil d’Alsace si cette fusion ne pouvait pas se faire, la motion adoptée souligne que la capitale de la «future région Alsace maintenue», serait l’Eurométropole Strasbourg. Ecartée lors du premier essai de structuration d’un conseil unique d’Alsace, objet du referendum avorté du avril 2013 (voir notamment notre synthèse d’eurojournalist.eu du 3 Septembre dernier), la reconnaissance de Strasbourg comme capitale régionale ne pouvait qu’interpeller Roland Riesm, le maire de la métropole.

Les élus socialistes «coincés» ! – Ce qui, sans doute, explique une évolution vers le conseil d’Alsace ! Une évolution accompagnée de cet embarras qui a sous-tendu les prises de position des élus socialistes. Ces derniers n’étaient-ils pas «coincés» entre le devoir de solidarité avec un gouvernement issu de leurs rangs et des soucis électoraux liés au fait que la grande majorité des Alsaciens semblent refuser les fusions annoncées ?

A la veille des élections sénatoriales du 28 Septembre, les prises de position pouvaient représenter un risque que le Maitre de Strasbourg n’aura pas à subir puisque, sénateur sortant, il ne sollicite pas de nouveau mandat ! Cet embarras se traduit dans le fait qu’au Conseil Régional, trois élus du groupe socialiste (les autres membres du groupe ont refusé de participer au vote !), qu’au Conseil Général du Haut-Rhin trois élus socialistes (cinq ont refusé de participer au vote) ont approuvé la motion présentée tandis qu’au Conseil Général du Bas-Rhin, les huit élus socialistes ont refusé de participer au vote.

Favorable à la fusion avec sa région d’origine, le député socialiste de Strasbourg Philippe Bies a finalement rejoint la position défendue par Roland Ries, tandis que l’autre député socialiste strasbourgeois Armand Jung (né en Moselle) s’est prononcé en faveur d’une fusion avec la Lorraine, une position d’autant plus remarquée qu’il vient d’être désigné comme président de la nouvelle «commission du droit local d’Alsace-Moselle».

Les écologistes votent pour ! – Soucieux de la proximité avec les électeurs de la future structure régionale, mais aussi séduits -apparemment- par le fait que la motion adoptée réclame un scrutin proportionnel pour les élus de la future région, le groupe des «écologistes-verts» a voté en faveur de la motion favorable au conseil d’Alsace.

Pour appuyer leur position et souligner le soutien des Alsaciens, les élus des collectivités ayant adopté la motion en faveur du conseil d’Alsace ont appelé à une manifestation de soutien qui aura lieu le 11 Octobre à Strasbourg. Les promoteurs de la manifestation s’attendent à ce que des milliers d’Alsaciens (on parle de 10.000) se déplacent à cette occasion pour appeler le gouvernement à changer son approche. Beaucoup dépendra, sans doute, de la vigueur de cette manifestation dont le retentissement devrait être d’autant plus fort que les Alsaciens manifestent rarement car, au contraire des… Bretons, il n ‘ont pas le goût des «bonnets rouges», perturbateurs et violents ! Les manifestants seront peut-être d’autant plus nombreux qu’ils se souviendront d’une autre manifestation qui eut lieu, il y a trente ans, le 22 Novembre 1984. 10.000 manifestants, toutes tendances confondues, avaient alors battu le pavé strasbourgeois, pour que le gouvernement -dirigé par Laurent Fabius- respecte la promesse de l’Etat d’installer à Strasbourg un équipement lourd de recherche (le «synchroton»). La promesse ne sera pas tenue et nombre d’observateurs avaient considéré, alors, que l’Alsace, région de droite (comme aujourd’hui), n’étant pas dans la majorité gouvernementale, la non-installation du synchrotron n’aurait pas de conséquences électorales majeures ! Les mêmes causes produiront-elles les… mêmes effets ?

Hollande et les promesses du Hartmannswillerkof ! – En attendant, les élus alsaciens attendent que le Président de la République qu’ils avaient rencontré, le 3 Août dernier, au Hartmannswillerkopf, en marge de la cérémonie de commémoration du centenaire de la Première Guerre Mondiale, concrétise son engagement de l’époque : il avait annoncé qu’il recevrait une délégation pour échanger sur la réforme territoriale. Le rendez-vous pourrait avoir lieu le mois prochain à l’Elysée. Qu’en sortira-t-il ? Le gouvernement amendera-t-il son projet ou faudra-t-il attendre que le Sénat ou l’Assemblée Nationale le fasse, lors de l’adoption définitive de la loi ? Ou encore ne se passera-t-il rien du tout, si ce n’est la mise en place de . «Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes» ?

2 Kommentare zu L’Alsace dit «NON» à la fusion des régions…

  1. Fabien Nierengarten // 24. September 2014 um 23:16 // Antworten

    Euh…quelqu’un pourrait-il signaler à Alain Howiller que le Territoire de Belfort ne se trouve absolument pas en Lorraine mais en Franche-Comté ? Faut-il en arriver à espérer la création de la méga région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine pour que les Alsaciens acceptent de réviser leur géographie française ? PS : Je suis moi-même Alsacien, mais du sud. ;-)

  2. bien sûr j’aurais du écrire : “Si le département de la Moselle -aujourd’hui intégré à la Lorraine- ou le Territoire de Belfort- voulaient etc.” Mille excuses pour cette imprécision. Alain Howiller

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