L’amende infligée à Apple sonne le glas de l’évasion fiscale

Seule une politique fiscale européenne pourra éviter à l’avenir la compétition entre les états européens qui est à la base de ces systèmes qui ruinent l’économie européenne.

Au siège de la marque avec la pomme croquée, on n'est pas content de la décision de la Commission Européenne. Foto: Elwood_j_blues / Wikimedia Commons / CC-SA 2.5

(KL) – La Commission Européenne ne s’est pas laissé impressionner par les menaces du ministre des finances américain Jacob « Jack » Lew qui avait « vivement conseillé » à l’Europe de ne pas entreprendre des démarches pour faire en sorte à ce que les grands groupes multinationaux cessent d’éviter de payer des impôts là où ils réalisent leurs bénéfices. Pour avoir ainsi évité de payer des impôts, le groupe Apple doit maintenant faire face à une pénalité de jusqu’à 13 milliards d’euros – une décision qui pourrait changer un système qui représente un capitalisme sauvage qui favorise les entreprises les plus riches au détriment des citoyens. S’il convient d’applaudir cette décision des deux mains, il faudra également que les états-membres de l’UE revoient leur propre politique fiscale – la compétition visant à proposer des avantages fiscaux dans l’espoir de voir s’installer des entreprises dans son pays, a fini par pénaliser tout le monde, même les « paradis fiscaux ».

Inventer des avantages fiscaux dans l’espoir de donner un coup de pouce à son économie, n’est pas un système qui garantit la prospérité à long terme, mais ces systèmes comme ceux installés en Irlande, au Luxembourg, aux Pays-Bas ou ailleurs, ne font qu’attirer les « sauterelles », ces groupes qui viennent et qui restent juste le temps de profiter des avantages offerts, pour ensuite se délocaliser là où on leur propose de nouveaux avantages. L’Irlande en a fait l’expérience – dans les années 90, elle avait proposé aux groupes américains des avantages fiscaux substantiels pour une durée de 10 ans en cas d’installation sur l’île verte, dans l’espoir qu’une entreprise installée depuis 10 ans au pays, allait y rester aussi après ces 10 ans. Erreur. Les groupes multinationaux sont comme des sauterelles migrantes, ils vont là où ils trouvent de la nourriture, donc, des avantages qui permettent d’augmenter les profits. Ce n’est pas parce que l’Irlande est si belle que les multinationales y resteraient.

Comment éviter alors que les états européens s’engagent dans une telle compétition pour accueillir les sièges des multinationales ? Seule une vraie politique européenne pourra changer la donne – à partir du moment où les multinationales retrouveraient les mêmes conditions fiscales dans l’ensemble des états-membres de l’UE, à partir du moment où elles devraient payer des impôts sur leurs bénéfices comme les autres entreprises, les états pourraient enfin percevoir des impôts de la part de ceux qui réalisent les plus grands profits dans le monde économique. Et ce n’est pas parce que les Apple, Starbucks & Cie. devront payer des impôts qu’ils arrêteraient de commercialiser leurs produits sur les marchés européens.

La décision de la Commission Européenne de changer de cap dans le traitement des multinationales, est importante. Mais tant que cette « compétition fiscale » se poursuit, les multinationales et leurs experts continueront à chercher et à trouver des failles dans les systèmes fiscaux pour continuer à éviter de payer leur part aux budgets des pays où ils sont actifs. Si actuellement, on parle de plus en plus d’une armée européenne, donc une politique sécuritaire européenne, il convient de penser également à une politique fiscale européenne pour mettre un terme à une concurrence qui a fini par pénaliser tout le monde. Une telle politique européenne nécessite une réforme des institutions européennes, le renforcement du Parlement Européen, l’élection d’un gouvernement européen par le parlement et donc – une Europe fédérale. C’est étrange – tout le monde demande aujourd’hui la mise en œuvre d’une telle Europe fédérale, mais personne ne s’applique à la mettre en œuvre. Peut-être après les élections européennes en 2019 ?

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