L’Après COVID-19 : radicalisation des classes moyennes ?

Avenir réel, non-utopique et à construire

Revolution... Foto: Sheila Thomson/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/2.0Gen

(Marc Chaudeur) – Faut-il craindre, après le règlement espéré du problème COVID-19, une révolution fomentée par les classes moyennes ? Certains analystes mettent en évidence ce danger social et politique, probable selon eux au vu de l’appauvrissement de ces classes, leur fonction de vache à lait de gouvernements divers (de gauche et de droite) et le sentiment d’injustice qui y règne largement. En ce sens, on met depuis longtemps en lumière l’analogie des années 2010-2020 avec les années 1930. Les effets prévisibles du virus ne font qu’accentuer fortement cette analogie.

Marco Buschmann, certes membre du FDP (le parti libéral allemand) rappelle, dans une édition récente du Spiegel, les analyses devenues pour certaines d’entre elles classiques, d’auteurs grands ou supposés l’être sur ce point à la fois essentiel et délicat.

Ainsi, au milieu du 19ème siècle, Alexis de Tocqueville considère que les citoyens d’un Etat sont plus sensibles à ce qu’ils ressentent comme des injustices (déclassement et pression fiscale démesurée, principalement) quand elles surviennent après de longues périodes de prospérité. Actuellement, Samuel Huntington et le sociologue allemand Thomas Geiger pensent que la faillite des PME-PMI, la suppression d’innombrables emplois, la pression fiscale et la dévaluation des dépôts d’actions privées (et donc d’une grande partie de l’épargne) ont entraîné, entraînent et risquent d’entraîner dans un avenir proche une forte radicalisation de cette partie de la société. Et ceci par le biais du sentiment de déclassement et de « désidentification » sociale qui en est la conséquence.

Historiquement, en tout cas, on sait bien que les événements tragiques des années 1930 (à commencer par ce qu’on peut qualifier de révolution ultra-nationaliste, mais qu’il n’est pas si aisé de qualifier de manière réellement pertinente), a été la conséquence de la déchéance des classes moyennes (artisans, commerçants, patrons de petites entreprises) après la grande crise de 1929 – ou plus exactement d’ailleurs, de 1921 à 1929, puisque le krach de Wall Street de 1929 n’a représenté que l’aboutissement en forme de sommet de toute crise de l‘après guerre, particulièrement en Allemagne.

Ainsi, les mois COVID-19 (ou les années COVID-19, puisque l’Institut Koch parlait la semaine dernière d’une durée probable de deux ans…) constituent une sorte de répit où les Etats européens, du moins on l’espère – c’est moins évident de ce côté ci du Rhin ou au Sud des Alpes – de vraies solutions à la crise : solutions sanitaires, solutions sociales et politiques. Mais l’avenir pose des problèmes redoutables qu’il faudra prendre à bras le corps. Notamment celui de l’imposition des plus riches, de la préservation et de la création d’emplois, des changements structurels presque inévitables de l’économie (des économies) européenne(s). Espérons qu’il se trouvera des gouvernements pourvus d’un minimum de compétence et de discernement pour au moins répartir de manière plus équitable la charge du règlement de cette crise, et pour éviter notamment, soyons tout à fait clair, des ravages sociaux dans cette partie de la population et une montée en flèche de l’extrême-droite !

Les citoyens mobilisés les y aideront puissamment. C’est cela qui s’avérera constitutif de l’avenir proche, bien davantage que les considérations exaltées et euphoriques d’un esprit utopiste généralement d’origine grand-bourgeoise, qui mène si souvent à des catastrophes subies par les classes censées en être les bénéficiaires.

L’avenir proche, nous devons moins le rêver que le préparer de manière active, assurément.

 

 

 

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