L’archevêque fait ses valises et cartons

Le feu couvait depuis des mois, en divers lieux de la galaxie catholique alsacienne, jusqu’à ce que la nouvelle tombe la semaine dernière : Luc Ravel, archevêque de Strasbourg, quittera la Rue Brûlée.

Celui qui couronnait la Vierge (Marie) en 2013, quitte Notre Dame (de Strasbourg) en 2023. Foto: Catholicon / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Il s’est tout de même écoulée une dizaine de mois entre la visite apostolique de l’été dernier à l’archevêché façon descente de l’IGPN, et la décision prise par le très clivant archevêque Luc Ravel la semaine dernière. Décision annoncée par l’intéressé dans la presse, sans avoir été préalablement évoquée lors du Conseil Épiscopal. Ce qui témoigne bien du caractère de celui qui fût durant plus de sept ans, Évêque aux Armées, avant d’intégrer son poste à Strasbourg, il y a un peu plus de six ans.

S’appuyant sur le Concordat, celui qui a appelé à voter pour Emmanuel Macron en 2022, n’est pas sans savoir qu’une « dé-nomination » par l’État doit compléter sa démission pour quelle soit effective. En clair, comme Le Vatican n’a pas les coudées franches à l’archevêché, la procédure peut se complexifier. Mais d’après ce qu’il a pu être observé du comportement général du principal intéressé, c’est très probablement son caractère autoritaire qui fait toute la différence, car il n’est pas interdit de penser qu’en un autre diocèse, il n’agirait pas autrement.

Que lui est-il reproché ? Bien des choses en somme, mais en qualité de CSP+ de l’Église, ancien polytechnicien et ingénieur de l’École Nationale Supérieure du Pétrole et des Moteurs, il ne manque ni de ressources ni d’idées pour contre-argumenter. Ce qui n’a visiblement pas convaincu le Saint Siège, lui ayant demandé de donner sa démission, suite à la visite apostolique de l’été dernier. Une manière élégante de laisser l’église au milieu du village, à laquelle le monsignore s’est enfin résolu.

Que retenir ici ? Mettant de côté les affaires en cours ou ayant eu cours, sans pour autant les minimiser, il apparaît très clairement que le reproche majeur fait à ce prélat, est de ne pas avoir d’attitude pastorale. La lettre-pétition adressée au diocèse par des catholiques alsaciens, ainsi que les différentes actions qui en ont découlé, évoquent clairement le management autoritaire et la tendance autocratique d’un haut fonctionnaire de l’Église qui, de surcroît, n’a jamais cherché à s’intégrer à l’Alsace.

Or, jusqu’à la Casserolade de Sélestat – Muttersholtz, que les cabinets de consulting grassement payés par l’Élysée n’ont pas vu venir, l’Alsace était considérée comme soumise aux pouvoirs, qu’ils soient temporels, économiques ou spirituels. Mais il se trouve qu’en Alsace, comme partout ailleurs en France, le management autoritaire ne fait plus vraiment recette. Avec parallèlement à cela, le paradoxe de la tentation de l’extrême-droite, lors de chaque séquence électorale, mais pourquoi la pensée complexe ne serait-elle que l’apanage d’un seul ?

Il y a tout lieu de penser que le citoyen Luc Ravel, monsignore de son état, a très certainement cru que dans la monarchie de droit divin qu’est l’Église Catholique, le très ancien cantique « Parle, commande, règne » dont l’auteur reste inconnu, pouvait encore avoir l’effet d’une formule magique sur les milliers d’anonymes constituant l’Église alsacienne. Pour revenir aux fondamentaux bibliques, dans une perspective chrétienne, occuper une position d’autorité, rend d’une certaine manière serviteur de ceux sur qui on a autorité. Ce qui à l’époque de la rédaction des textes néotestamentaires, avait une très forte connotation disruptive. Mais depuis, comme dans l’économie et la politique, les intérêts privés ont prévalu sur l’intérêt général et le bien commun.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste