Le capitalisme dévore ses enfants

Pour la première fois depuis 30 ans, le groupe Volkswagen envisage des licenciements. La raison officielle – la concurrence chinoise. Mais il y a d'autres raisons.

L'ardoise pour la prétendue crise chez Volkswagen sera payée par les salariés... Foto: AndreasPraefcke / Wikimedia Commons / CC-BY 3.0

(KL) – Le groupe Volkswagen a toujours tiré son épingle du jeu. Le maître-mot était « expansion », et pendant trois décennies, aucun salarié du groupe n’a du être licencié. Mieux – la direction avait conclu un accord avec le puissant comité d’entreprise qui prévoyait une « garantie d’emploi » à tous les salariés jusqu’en 2029. Mais cet accord vient d’être annulé par la direction du groupe, ce qui veut dire que ni la fermeture de sites de production, ni le licenciement de salariés ne sont plus exclus.

Pour Oliver Blume, le PDG du groupe, il y a plusieurs facteurs qui menaceraient le groupe Volkswagen. D’une part, explique le manager, les Européens achètent moins de voitures et d’autre part, la concurrence chinoise arrive massivement sur les marchés européens. « Le gâteau n’a pas grandi, mais il y a de nouveaux invités à table », explique Blume.

Dans les budgets du groupe, il manqueraient 5 milliards d’euros pour pouvoir continuer comme avant. Mais ce que Blume ne dit pas, c’est que l’année dernière, le groupe a versé 4,5 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires et cette année, la direction s’est payé un temps de loisir et de discussions pour plusieurs millions d’euros en Suède, en privatisant un hôtel de luxe et en faisant la fête sans compter les dépenses. Pendant ce temps, des salariés sont menacés par la perte de leur emploi.

La réponse à cette crise serait facile à mettre en œuvre, estime l’une des cheffes de Die Linke, Janine Wissler. « C’est minable que le groupe déclare ne pas pouvoir trouver 5 milliards d’euros pour éviter des fermetures d’usines et des licenciements », a-t-elle dit, « si VW a besoin de cette somme, le groupe n’a qu’à demander aux actionnaires comme la famille Porsche et Piëch de rembourser ces dividendes ».

Comme souvent, ce sont les « derniers de la cordée » qui payeront les pots cassés qui en fait, ne sont même pas cassés. Le groupe réalise toujours un bénéfice impressionnant. En 2023, le plus grand groupe automobile européen a enregistré un chiffre d’affaires de 322,3 milliards d’euros (!), pour un bénéfice de 17,9 milliards d’euros. Et pour 5 milliards d’euros, le groupe annule la « garantie d’emploi » pour ses salariés ?

Ce ne sont pas les évolutions des marchés qui mettent en péril la stabilité de l’emploi des salariés de Volkswagen, mais l’avidité des actionnaires qui visiblement se fichent de la question sociale des salariés du groupe. Mais ce capitalisme qui créé la précarité chez ceux qui n’ont pas les moyens de se défendre, est un modèle qui devra disparaître rapidement. Qu’une poignée d’actionnaires super-riches exsanguent un groupe industriel qui par ailleurs, se porte très bien, en faisant payer l’ardoise aux salariés, c’est un capitalisme digne du siècle dernier.

Tout comme nous avons besoin de nouveaux systèmes politiques et sociétaux, nous avons également besoin de nouveaux systèmes économiques, car ce capitalisme « far ouest » ne pourra plus durer. Le fruit du travail des classes ouvrières ne peut pas être éternellement encaissé par des actionnaires et les « marchés financiers », tandis que la paupérisation de nos sociétés continue. Il vaudrait mieux instaurer de nouveaux systèmes avant que les vieux systèmes qui ne fonctionnent plus, ne soient balayés par une population en colère et par la violence. Qu’un groupe menace ses salariés de licenciements économiques à un moment où des actionnaires encaissent des milliards, c’est un système vétuste qui doit être remis en question.

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