Le combat solitaire d’Angela Merkel

Tout le monde s'attend à une solution européenne pour la question des réfugiés lors du prochain sommet européen. Il n'y en aura pas.

Angela Merkel explique, argumente, convainc - et n'est pas suivie. Tragique. Foto: Eurojournalist(e)

(KL) – Mardi soir, à Freiburg, Angela Merkel était fatiguée, mais quand même en forme. La chancelière allemande doit puiser ses forces dans la conviction d’être dans le vrai et en effet, son argumentation est simple, mais convaincante. «L’article 1 de la constitution allemande stipule que la dignité de l’homme est intouchable», disait-elle au Konzerthaus à Freiburg, «et ceci ne vaut pas que pour les allemands !». Il fallait attendre quelques secondes avant que le public ne prenne la mesure de cette déclaration. Mais les applaudissements restaient polis, trop d’adhérents à la CDU pensant tout bas ce que l’extrême-droite dit tout haut.

Angela Merkel a conjuré une solution européenne à Freiburg, tout en restant réaliste. Elle sait qu’une solution européenne ne portera, dans le meilleur des cas, sur une déclaration concernant la protection des frontières extérieures de l’Union Européenne et que la volonté de solidarité des états-membres s’arrêtera là. «Mais est-ce une raison pour abandonner le combat ?», demanda-t-elle, faisant référence à deux grandes figures de l’histoire de la République Fédérale, «est-ce que Konrad Adenauer et Ludwig Erhard ont jetté l’éponge ? Non, et je continuerai à me battre pour une solution européenne !». Combattive, la «Mutti» qui est entourée par des faucons qui tentent en permanence de scier la branche sur laquelle la CDU est assise. Et ce, non seulement chez ses adversaires politiques, mais également au sein de son propre parti.

L’Europe, ce grand malade à court d’idées, d’idéaux et de valeurs partagées, l’abandonnera tout comme ses propres «amis» politiques en Allemagne. Tout en regardant vers la Turquie en espérant que le pays d’Erdogan sauve l’Europe de ce que les populistes qualifient déjà «d’invasion». Et toute l’Europe ferme les yeux et les oreilles quand Erdogan menace de laisser passer les 2,5 millions de réfugiés syriens qui se trouvent en Turquie. Et toute l’Europe ferme les yeux et les oreilles face aux multiples violations des droits de l’homme commises pas Erdogan. Et toute l’Europe ferme les yeux et les oreilles face au comportement étrange d’Erdogan vis-à-vis du Daesh, des Kurdes, les Russes… pourvu qu’il sauve l’Europe du devoir de partage qui nous incombe !

Angela Merkel, elle, aurait aimé miser sur la solidarité européenne. C’est bien qu’elle veuille poursuivre ce combat pour un minimum de valeurs communes, mais elle perdra la bataille pour plus humanisme contre des états comme la Grande Bretagne, la Pologne, la Hongrie, l’Autriche, la Slovaquie, la République Tchèque et tous ceux qui actuellement, préfèrent le retour vers le Moyen Age à une politique courageuse et humaniste.

Angela Merkel, mardi entre Berlin, la Hesse et Freiburg, poursuit sa mission. Elle explique, elle argumente, elle tente de convaincre. Et on lit sur les visages de son public, majoritairement des électeurs et électrices conservateurs, qu’elle n’a pas le soutien nécessaire. Même pas dans son propre parti. L’Histoire retiendra qu’elle aura tout essayé pour sauver l’Europe d’une implosion proche. Mais il n’y a que peu d’espoir à ce qu’elle y arrive.

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