Le mot qu’il ne fallait pas dire

Le chef des conservateurs allemands, Friedrich Merz (CDU), a critiqué le « tourisme social » des réfugiés ukrainiens. Les protestations sont vives, même dans son propre parti. Ses excuses résonnent tiède...

Friedrich Merz (CDU) grossit les rangs de ceux qui ne sont pas à la hauteur de la situation. Foto: Harald Dettenborn / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0de

(KL) – D’abord, il faut savoir que les réfugiés ukrainiens ont, depuis le début de la guerre dans leur pays, un statut spécial en Allemagne (et dans d’autres pays européens) qui est largement plus généreux que pour des réfugiés qui arrivent d’autres régions du monde. Les réfugiés ukrainiens ont droit, dès leur arrivée et depuis le 1er Juin, aux mêmes prestations sociales que des citoyens allemands se trouvant dans une situation de précarité. Ce que critique Friedrich Merz, c’est que certains de ces réfugiés se rendent de temps en temps en Ukraine pour voir les leurs, avant de revenir en Allemagne. Pour Merz, il s’agit de « tourisme social », une déclaration qui a suscité l’indignation à travers tout le paysage politique. Son excuse « si jamais j’ai heurté quelqu’un, alors je présente les excuses », est plus que faible. Et ainsi, Friedrich Merz apporte la preuve qu’il ne dispose pas non plus des compétences pour assumer une quelconque responsabilité dans cette situation où les crises mondiales s’accumulent.

Friedrich Merz semble toujours penser que les réfugiés arrivant en Allemagne viennent pour « profiter de nos systèmes sociaux ». Pourtant, comme quasiment tous les autres politiques, il est aussi allé à Kiev pour se laisser prendre en photo avec Selensky – donc, il devrait savoir que les réfugiés ukrainiens ne viennent pas en Allemagne pour profiter du système social, mais pour sauver leur vie et celle de leurs familles. La notion du « tourisme social » constitue le summum du cynisme et la tentative d’abuser de cette situation pour des raisons partisanes (il y a plusieurs élections régionales en Allemagne ces prochains mois), est lamentable.

Evidemment, Merz essaye, par le biais de telles provocations, de stopper le nouvel essor de l’extrême-droite AfD qui grimpe à nouveau dans les sondages. Mais cette « stratégie partisane » ne prendra pas. Si les conservateurs veulent maintenant stimuler la haine envers les réfugiés ukrainiens, ils ont tout faux. Car tout le monde comprend que le chef des conservateurs est autant une erreur de casting que le dernier candidat conservateur à la chancellerie, Armin Laschet. Force est de constater qu’aucun parti politique allemand ne dispose actuellement de cadors capables de gérer cette situation – peu étonnant que les deux tiers des Allemands estiment qu’aucun parti n’est en mesure d’apporter des réponses aux multiples crises actuelles.

Face aux énormes tensions sociales qui attendent tous les pays européens cet automne et hiver, Friedrich Merz serait bien conseillé de ne pas verser de l’huile sur le feu. Le mot d’ordre devrait être « solidarité » et non pas « haine des plus faibles ». Mais c’est un mal pour un bien – au moins, les Allemands ne s’adonneront plus à l’idée que la CDU et son chef puissent constituer une vraie alternative au gouvernement en place. Dans une situation aussi critique que celle d’aujourd’hui, il aurait été souhaitable de disposer de responsables politique d’une qualité supérieure. Les « mordeurs de mollets », on en avait déjà un nombre suffisant…

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