Le Parquet européen formé

Enfin, le Conseil a nommé les 22 juges anti-corruption

LCK sur un mur de Budapest, l'an dernier Foto: Babu/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/4.0Int

(Marc Chaudeur) – Parfois, de très bonnes nouvelles nous arrivent des instances européennes, si si. Lundi dernier le 28 juillet par exemple, nous avons appris la nomination des 22 procureurs qui composeront le tout nouveau Parquet européen. Ils seront chargés de lutter contre la fraude et les infractions commises contre les intérêts financiers de l’Union européenne. Une belle réussite.

La création de ce Parquet européen – ou Bureau du Procureur Général Européen, BPGE (en anglais : EPPO) – et sa formation auront été riches en péripéties diverses et en rebondissements, que nous avions retracées en son temps dans eurojournalist. Normal, vu l’enjeu : c’est la première fois que les institutions européennes prennent le taureau Europe par les cornes et décident de combattre réellement la corruption interne et transfrontalière. Sa dirigeante, la première Procureure générale (ou « Procureure en chef »), choisie l’an dernier :  Laura Codruţa Kövesi. Une véritable héroïne populaire dans son pays, la Roumanie.

Cette jeune femme y dirigeait une instance destinée à y lutter contre la corruption, la DNA (Direction Nationale Anticorruption), de 2013 à 2018. Le parti au pouvoir, le SDS, digne héritier de l’ère Ceauşescu, a essayé à maintes reprises de la chasser de ce poste, parce qu’elle y exerçait trop bien sa fonction de traqueuse de corruption… En vain ; grâce à la persévérance du président de la République, qui lui, est issu d’un parti libéral ; et grâce surtout à des manifestations populaires impressionnantes dans les rues de Bucarest et d’autres grandes villes roumaines.

La nomination de LCK au poste de Procureure générale du Parquet européen n’a pas été aisée ; on a suscité contre Laura Codruţa Kövesi d’autres candidats, plus dociles et représentant certains lobbies bien précis, le candidat français notamment (voir http://eurojournalist.eu/laura-koevesi-maillot-jaune/). Mais cela a été chose faite définitivement le 1er octobre 2019. Maintenant, le Conseil a nommé les 22 procureurs. Il s’agit de magistrats de 22 nationalités différentes, peu connus du grand public ; 14 d’entre eux sont en place pour 6 années non renouvelables, 6 autres pour 3 années seulement. Les candidats sont proposés par les Etats membres.

Pourquoi 22 seulement ? Parce que la constitution du Bureau s’est faite par le processus de coopération renforcée, c’est-à-dire sur une procédure inaugurée en 1997 à Amsterdam : base volontaire sur un minimum de 9 membres. Or, certains pays, comme c’est curieux, ne désiraient pas participer à ce Tribunal européen : la Pologne, par exemple, ou la Hongrie_ on connaît les éléments des affinités entre ces Etats, dirigés par des partis conservateurs-populistes… Le travail va maintenant commencer, et le plus dur reste à faire.

Le Parquet européen sera installé au Luxembourg. Indépendant des Etats membres en tant que tels, il enquêtera sur les infractions contre les finances de l’Union européenne : la corruption, les fraudes dont les fraudes transfrontalières à la TVA comme par exemples celle qu’on a pu constater aux frontières bulgaro-roumaines et d’autres.

Excellent : le PE disposera des prérogatives bien plus étendues que des institutions voisines comme l’OLAF, Eurojust ou bien Europol. Elles lui permettront de faire office de procureur auprès des tribunaux nationaux compétents – ceux des Etats membres. Situation inédite : le statut supranational et indépendant de ce Parquet, s’il fait son travail et le fait bien, aura en ses mains les instruments pour lutter sans complaisance dans les Etats mêmes, et concrètement donc, de faire condamner au moins les manquements les plus graves aux intérêts de l’Union.

Malgré certaines déconvenues liées à des représentations différentes, vire opposées de l’identité européenne, l’UE progresse. Bonne nouvelle. Soyons attentifs maintenant à la manière dont le travail s’effectuera…

 

 

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