Le pic de l’iceberg

L'Europe institutionnelle est secouée par ce scandale de corruption. Mais ce scandale ne se limite pas à la vice-président du Parlement Européen Eva Kaili. L'Union Européenne s'enlise...

Aujourd'hui, on voit le pic de l'iceberg. Mais ce qui se trouve sous l'eau, est encore plus intéressant. Foto: Christopher Michel / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(KL) – Donc, le Qatar. Des sacs remplis de billets de banque. Des eurodéputés, des collaborateurs parlementaires et d’autres acteurs de la scène politique. Pendant que le public tente de comprendre ce qu’il se passe à Bruxelles, d’autres révélations sont attendus, si on croit les déclarations d’autres eurodéputés. Le tout pour améliorer l’image du Qatar et pour influencer la politique européenne pour faciliter la vie aux Qataris riches qui eux, n’ont plus envie de devoir demander des visas. Bien sûr, le Qatar nie avoir corrompu tout ce beau monde, mais il nie aussi d’avoir corrompu la FIFA… Et des socialistes qui se laissent corrompre. Du coup, on comprend pourquoi autant de personnes se disant « de gauche » fassent l’apologie du Qatar, de cette Coupe du Monde honteuse et qui traitent ceux qui insistent sur les Droits de l’Homme « d’arabophobes » et de « racistes ». Les institutions européennes, mais aussi les partis socialistes et le groupe S&D auront du mal à s’en remettre.

Une vice-présidente du Parlement Européen en détention provisoire, avec son compagnon et collaborateur parlementaire et d’autres personnes, des descentes policières dans les appartements d’autres eurodéputés, des élus cités devant les instances de leurs partis (qui visiblement, savent déjà plus que les médias), et le tout pour le compte du Qatar qui a grand besoin de redorer son image. Après ce scandale, on peut au moins nourrir l’espoir que les supporteurs de football « de gauche » se taisent pendant la dernière semaine de cette Coupe du Monde scandaleuse. Qu’ils regardent les matchs, mais qu’ils se taisent et cessent de nous rabâcher à quel point cette Coupe du Monde serait politiquement correcte. Et surtout, qu’ils nous parlent jamais plus des « Droits de l’Homme »…

Après les scandales à la Commission Européenne où la famille Von der Leyen montre que l’on peut mettre la main sur des millions, sans que cela prête à trop de conséquences, maintenant le Parlement Européen. Penser qu’il s’agit d’un mauvais comportement de deux, trois eurodéputés, c’est osé. Car le Qatar a l’habitude de tout acheter, à commencer par cette Coupe du Monde, et visiblement, ça ne fonctionne pas qu’avec la FIFA, mais aussi avec les instances politiques européennes.

Partons toutefois du principe que la corruption ne concerne qu’une minorité des eurodéputés. Cela signifie que l’institution en elle-même doit immédiatement prendre des mesures pour mettre un terme aux pratiques des lobbys bruxellois (environ 30.000 lobbyistes accrédités auprès du Parlement…) et que la transparence doit être instaurée autant au Parlement qu’à la Commission. Quand on pense que la Commission Européenne refuse de montrer les contrats conclus avec les laboratoires pharmaceutiques même aux eurodéputés, on comprend que la corruption dépasse largement le cadre d’un mauvais comportement isolé.

Les conséquences de ce scandale seront graves. Comment expliquer au citoyen lambda qu’il faut respecter des règles, lorsque ceux qui les édictent, les violent si souvent ? Comment avoir confiance dans un monde politique qui ne vise pas le bien commun, mais l’enrichissement personnel ?

Toutefois, les scandales à répétition ne semblent pas motiver la politique européenne à changer son orientation. Les réformes des institutions, dont tout le monde comprend l’urgence, ne seront pas faites, car ceux qui peuvent les mettre en œuvre, sont aussi ceux chez qui la police belge trouve des « sacs d’argent ».

Aux eurodéputés « corrects » de faire le ménage et d’isoler et d’exclure les « moutons noirs ». A la politique européenne d’attaquer enfin ces réformes qui seront le seul moyen de réinstaurer un minimum de confiance en ces institutions qui ne font pas grande chose pour les citoyens européens, mais qui donnent des sommes pharaoniques aux spéculateurs dans les banques, aux laboratoire pharmaceutiques, aux grandes industries – pendant que certains élus se servent au passage.

Ce scandale est sérieux et il est étrange qu’il concerne en premier lieu des élus socialistes. Mais cette apologie du Qatar, présentée par Eva Kaili et d’autres au Parlement, a visiblement influencé même des militants socialistes qui eux, défendent l’indéfendable et agressent ceux pour qui les Droits de l’Homme sont encore plus importants que des matchs de foot organisés dans un cadre des plus écœurants.

La seule bonne nouvelle est que cette Coupe du Monde de la honte se termine dans quelques jours, il ne reste plus que trois matchs. Après, une analyse approfondie de la corruption au sein des institutions européennes s’impose. Autant au Parlement qu’à la Commission. Autrement, la décomposition de l’Union risque de s’accélérer…

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