Le plurilinguisme n’est pas une attitude, mais un cadeau

Les meilleures bases que l'on puisse offrir à ses enfants, ce sont les langues étrangères. Et on ne peut pas commencer trop tôt, au contraire. Dès l'age de 8 ans, la faculté d'apprentissage des langues baisse.

Les jeunes apprennent les langues étrangères de manière ludique. Même plusieurs langues maternelles. Foto: Helene Souza / www.pixelio.de

(KL) – Le magazine hebdomadaire DER SPIEGEL parle dans son numéro actuel d’un groupe de chercheurs qui se fait fort pour l’apprentissage de langues étrangères avant même l’age de la maternelle. Car dès l’age de 8 ans, la faculté d’apprentissage des langues baisse sensiblement. Si jusqu’à cet age, on peut apprendre plusieurs langues comme «langues maternelles», plus tard, il faut passer par un apprentissage beaucoup plus scolaire, pas naturel et donc beaucoup plus difficile. La décision de deux cantons suisses (Thurgovie et Nidwald) d’arrêter l’apprentissage de la langue française dans le premier cycle, arguant que cela pourrait fatiguer les enfants, montre une nouvelle fois ce qui arrive lorsque des politiques prennent des décisions dans des domaines qu’ils ne connaissent pas.

L’apprentissage de langues étrangères comme «langues maternelles» (et on utilise bien le «s» pluriel, car en bas age, les enfants peuvent apprendre plus de deux langues sans difficultés), passe par plusieurs éléments.

Vient d’abord le «behaviorism». Le langage s’apprend par un système d’imitation et d’amplification – lorsque l’enfant arrive à bien imiter un son, un mot, son entourage le félicite, souvent en répétant le mot correctement prononcé. L’enfant, face à ce retour positif, intensifie ses efforts pour bien écouter, de bien imiter et d’obtenir ainsi, des réactions positives. A ce stade, il ne s’agit pas du sens des mots, mais uniquement du son – l’enfant ne fait donc pas la distinction entre un mot dans une telle ou telle langue. En même temps, le «behaviorisme» renforce les liens entre l’enfant et son entourage qui lui donne la matière à imiter. Cette activité n’a rien de fatiguant pour l’enfant.

Le deuxième élément, «l’interactionisme», décrit l’acquisition de la langue par un interaction, des activités communes, des jeux répétés avec des rituels identiques, permettant à l’enfant d’assumer un rôle de plus en plus actif dans ces jeux, lui permettant de développer non seulement un vocabulaire à utiliser immédiatement, mais aussi de constituer la confiance en lui, son pouvoir d’action, son importance et sa relation avec les autres. Là aussi, les interactions peuvent se dérouler dans n’importe quelle langue.

Le «cognitivisme» représente le rapport que l’enfant développe par rapport aux objets. Déjà à l’age de 18 à 24 mois, les enfants prennent conscience de la présence physique des objets, qui consiste à comprendre qu’un objet reste réel, même lorsque l’enfant ne le voit pas. Dans cette phase, des concepts sont établis qui persistent pendant toute la vie, tout en évoluant. Le concept «ballon» reste dans notre conscience associé à tout objet rond. Puisque des concepts aussi fondamentaux sont établis à cet age, il s’agit aussi de la phase la plus propice pour permettre à l’enfant d’associer plusieurs «noms» (sons) aux concepts. Ainsi, l’enfant peut rapidement associer autant «Ball» en Allemand et «ballon» en français à tout objet de forme ronde, ce qui élargit rapidement son champ de communication, surtout dans un contexte déjà plurilingue.

L’enseignemen de langues étrangères pour les plus jeunes ne constitue donc pas une attitude (parentale), mais un cadeau géant. Car les tout petits apprennent sans apprendre. Ils assimilent autant de langues que leur entourage leur propose. Cet entourage peut faciliter et favoriser cet apprentissage «automatique» sans difficulté. Reporter l’apprentissage des langues étrangères à un age où aucun de ces élément n’agit encore, cela revient à pénaliser les enfants. Surtout dans la mesure où de nombreuses études ont démontré que les enfants qui apprennent plusieurs langues très jeunes, développent de plus grandes facultés d’apprentissage aussi dans d’autres domaines. Priver les jeunes enfants de l’immersion dans des langues étrangères pour ne pas les fatiguer, cela revient à les endormir – et plus tard, ils connaîtront des difficultés croissantes pour apprendre au moins une langue étrangère correctement.

Dommage que des questions comme l’enseignement des langues étrangères dans le cycle primaire soient décidés au niveau politiques et non pas par des gens qui connaissent le domaine. La décision de la Thurgovie et du Nidwald de stopper l’enseignement de la langue de Molière est idéologique et ignore l’état actuel de la recherche. Un vrai gâchis pour les enfants suisses.

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