Le Préfet Zoreille et Vinci…

… de St Denis de la Réunion à Kolbsheim du Kochersberg. Franck Dautel retrace une belle amitié entre ceux qui bradent l’environnement aux intérêts de toujours les mêmes…

Le chantier de la route la plus chère du monde. Maître d'ouvrage - VINCI. Autorisations - Préfet Jean-Luc Marx. Eh ben. Foto: Chaoborus / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par Franck Dautel) Quel rapport entre un viaduc gigantesque et à scandale construit dans l’océan indien à La Réunion et ce qui se passe actuellement sur le parcours du projet du GCO ? Vinci tout d’abord, un Président de région proactif ensuite et pour le bouquet, un seul et même Préfet !!!

La route côtière actuelle entre St. Denis de la Réunion et La Possession a été construite en 1976. On comptait 10 000 véhicules par jour à l’époque, pour 60 000 aujourd’hui. Elle est régulièrement menacée par des chutes de pierre tombant des falaises qui la surplombent et totalement saturée aux heures de pointe ou au moindre accident. La solution (comme avec le GCO) pour régler le problème (bouchon, pollution, danger…) – on construit une nouvelle route, ici sur l’océan indien, qu’importe ! Mais bon sang que c’est logique !

Les bouchons perdurent, avec toujours plus de voitures, forcément, le « coma circulatoire » menace l’île depuis des décennies et la seule solution que l’on trouve au 21ème siècle est de rajouter des voies de circulation sur l’océan, pourquoi pas ?!

Reposant alternativement sur pilotis ou sur digues, cette Nouvelle Route du Littoral (NRL) de 12,5 kilomètres de longueur qui doit longer à terme la côte sur l’océan, dépasse l’imagination !

Projet pharaonique s’il en est, Vinci, encore Vinci, oui, Bouygues, un Préfet bien connu en Alsace (Jean-Luc Marx) et un Président de Région, Didier Robert (de droite) se sont entendu comme larrons en foire pour construire la route la plus chère du monde ! 133 millions d’euros le kilomètre (1 million le mètre !) contre en moyenne 6,2 millions d’euros le km pour une route normale, c’est juste 21 fois plus cher.

Pour un budget initial de 1,66 milliards d’euros, ce projet toujours en cours, traine derrière lui tous les stigmates des grands projets inutiles et imposés : Non respect des normes environnementales, avis défavorables de commissions officielles, montages bâclés des dossiers, coûts à rallonges, plaintes en justice en série. Ici c’est carrément le « Parquet National Financier » qui enquête actuellement sur de sombres histoires de favoritisme et de corruption. Mi-septembre 2018, la procureure Éliane Houlette était à La Réunion pour travailler avec le personnel des services en charge des investigations sur les gros dossiers financiers, notamment celui du dossier de la NRL… Le 21 septembre dernier, 11 députés européens arrivaient sur l’île dont un grand nombre d’entre eux faisaient partie de la commission européenne de contrôle budgétaire.

Autre point commun avec le GCO, des alternatives réalistes connues bien avant le lancement des travaux ! Sur l’île, avec notamment la mise en place d’un tram-train et la sécurisation de la route côtière. Le projet de tram-train a été écarté en 2010 par Didier Robert, président du Conseil Régional de La Réunion. Les fonds publics destinés à sa mise en œuvre ont été transférés, via un protocole signé à Matignon, vers la Nouvelle Route du Littoral…

Deux solutions simples et bien moins voraces en espaces naturels et en argent public, au profit de la NRL, projet dont les experts estiment que la facture finale atteindra 2,5 milliards d’euros !

On se croirait vraiment dans les environs de Strasbourg avec son Contournement Ouest mais non, on est bien dans l’océan indien, sur l’île de la Réunion ! Mais toujours avec le Préfet Marx (qui représente l’Etat à la Réunion de 2012 à 2014), Vinci et un président de Région de droite, le trio fumeux où qu’il se trouve, du Kochersberg à l’île Bourbon.

Montage douteux des dossiers donc, un exemple : L’appel d’offre soulignait l’indisponibilité locale des roches nécessaires à la construction des digues, à savoir quand même 18 millions de tonnes! On se lance pourtant dans les travaux, sans avoir résolu cette question… On commence par les piliers en béton, mais il faut bien commencer à chercher ces 18 millions de tonnes de roches sur l’île elle-même. On force un peu ici, mais la population commence à prendre conscience des dégâts irréparables que provoquera la NRL, s’oppose et tient bon. Qu’à cela ne tienne, on vise une nouvelle carrière, au Bois Blanc, pour extraire ces milliers de tonnes de roches qui vont finir par sérieusement manquer. Une gigantesque carrière située sur l’une des rares portions de littoral encore préservées dans l’ouest de l’île… Plus c’est gros et mieux ça passe. 5 000 personnes manifesteront en juin 2015 contre ce projet d’extraction sous le slogan : « Touch pa nout’ roche ». Ils manifesteront encore le 9 septembre dernier.

Une quinzaine de recours ont été déposés par les opposants au projet, des arrêts ont été annulés, la Cour Administrative saisie, un avis défavorable du Comité National de Protection de la Nature (CNPN) prononcé… Le projet doit désormais passer entre les mains de la Commission Départementale de la Nature, des Sites et des Paysages, qui donnera par la suite son avis au Préfet, Amaury de Saint-Quentin, qui soumettra donc son avis final.

Les pilotis sont presque tous en place. Le projet coince sur la question de la roche encore nécessaire pour terminer la construction des digues… On parle là-bas de « demi-route » ce qui agace les représentants du BTP. Une NRL qui ne dépasserait pas les 6 ou 7 kilomètres et encore dans un an ou deux ? Une demi-pyramide pour revenir au projet pharaonique…

On le voit bien avec cet exemple, tout comme avec celui du GCO, les intérêts financiers empêchent puissamment les solutions alternatives de se mettre en place en imposant des projets forts coûteux (et juteux), inutiles et causant des dégâts irréparables en matière d’environnement. Les derniers événements à Kolbsheim et Vendenheim le montrent bien : on coupe des arbres sans autorisation et sous la protection des forces de l’ordre…

Le stylo d’un Préfet soutenu par quelques élus locaux et une poignée de lobbyistes peut passer outre la loi et causer bien des dégâts ! Le Préfet peut mal interpréter les textes, se baser sur des informations frelatées, se moquer des avis qu’il commande, rien n’y fait. Surtout quand il s’agit de Marx-Vinci & Cie. !

Le pauvre Leonardo Da Vinci auquel la multinationale a piqué le nom en 2000 pour faire oublier un passé, disons, pas toujours très propre (Saint-Gobain, la Générale des Eaux puis Vivendi… que des boites réputées pour leur respect de l’homme et de l’environnement), le pauvre génie doit se gratter la barbe dans sa tombe. Lui qui disait « Scrute la nature, c’est là qu’est ton futur ». Un aspect que la société Vinci n’a pas repris avec le nom, on ne peut pas dire !

Pour Marx, c’est un peu plus délicat, mais qui sait peut-être… un autre Marx, ancêtre lointain du Préfet, le Karl, disait, lui, qu’« Une idée devient une force lorsqu’elle s’empare des masses. » Pour le Marx Préfet, une idée devient une force quand elle s’empare avec Vinci de l’environnement, se fout des lois et envoie les gardes mobiles gazer et renverser les grands-mères du Kochersberg…

1 Kommentar zu Le Préfet Zoreille et Vinci…

  1. Federmann Georges Yoram // 28. September 2018 um 9:14 // Antworten

    L’article alerte sur des postures consuméristes et matérialistes de la part des Pouvoirs publics
    qui ne sont pas illégales mais dramatiques dans leurs effets
    et absurdes.

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