Le professeur avait prévu l’éruption du Cumbre Vieja

L’éruption du Cumbre Vieja n’est pas une surprise pour tout le monde, notamment pour le vulcanologue Juan Carlos Carracedo.

Le professeur Juan Carlos Carracedo a un site internet, mais il publie plus sur papier que sur le web. Foto: Copie d’écran du site web de Juan Carlos Carracedo

(Jean-Marc Claus) – Sur l’île de La Palma, après un demi-siècle d’inactivité volcanique, l’éruption du Cumbre Vieja annoncée par un essaim de séismes durant la semaine précédant le 19 septembre 2021, n’est pas une grande surprise pour les vulcanologues, dont l’espagnol Juan Carlos Carracedo qui l’avait annoncée au moins huit ans plus tôt.

Très pointu dans la géologie des Îles Canaries, il a publié 200 articles et 20 livres ou contributions à des ouvrages sur ce sujet. Titulaire d’une licence obtenue à l’Université de Madrid en 1968 et d’un doctorat décroché en 1976, Juan Carlos Carracedo fut en poste de 1981 à 2011 à la « Estación Volcanológica de Canarias » (EVC-CSIC) à La Laguna sur l’Île de Tenerife. Il a notamment fait autorité en 2011, lors de l’éruption du Tagaro, un volcan sous-marin à 2 km au large d’El Hierro, l’île la plus à occidentale de l’archipel dont elle est aussi la plus jeune.

Très engagé dans la vulgarisation, le professeur Carracedo souhaite sensibiliser ses contemporains à l’importance de la science dans le quotidien. En témoigne notamment l’ouvrage « Volcanoes for begginers », consacré au Teide culminant à Tenerife, qu’il prépare actuellement avec Paola Carracedo, l’une de ses filles, ainsi que Valentin R. Troll et Christina E. Karsten.

Autre cheval de bataille, la gestion des risques dans les territoires à volcanisme actif ou potentiellement actif, lui tient particulièrement à cœur. On peut d’ailleurs, concernant l’actuelle éruption du Cumbre Vieja, s’inscrire en faux face aux gesticulations de la droite espagnole revancharde soutenue par une extrême-droite calculatrice. Les gouvernements, tant au niveau insulaire (cabildo) que régional et national, n’ont pas été pris au dépourvu et ils agissent en conséquence.

Dès 2013, le professeur Juan Carlos Carracedo, lors de la présentation de son livre intitulé « Geología de Canarias », avait annoncé que la prochaine éruption volcanique à attendre sur l’archipel serait au Cumbre Vieja sur l’Île de La Palma. Elle était prévue dans le délai d’une quarantaine d’années. Il faut savoir que plus de la moitié des éruptions historiques de l’archipel se sont produites au Cumbre Vieja.

En termes de dangerosité, comme l’expliquait déjà en 2011 Juan Carlos Carracedo, l’Archipel des Canaries présente l’un des scénarii les moins dangereux de la planète pour les îles océaniques, car il se trouve sur une plaque tectonique et non en limite où se concentre l’énergie. Si l’hypothèse de l’effondrement du flanc ouest du volcan, provoquant alors un méga-tsunami ne touchant pas que le continent nord-américain, reste plausible, ce n’est pas pour l’heure scientifiquement envisagé. Par contre, l’écoulement de lave va durer plusieurs jours, voire même plusieurs semaines.

Toujours est-il que depuis l’éruption du Tenegía en 1971 et celle du Tagaro en 2011, de peu à très peu relayées par la presse, le Cumbre Vieja fait, internet aidant, le tour du monde. Elle déchaîne au passage des craintes de raz-de-marée, qui rendraient certains commentateurs infiniment moins fébriles, si une autre partie du monde que la côte ouest du continent nord-américain, était potentiellement menacée.

Pourtant, si cet effondrement, aujourd’hui peu probable, avait lieu, le méga-tsunami qu’il générerait toucherait aussi les Caraïbes, l’est de l’Amérique Centrale, le nord de l’Amérique du Sud, une partie de la côte ouest-africaine, et évidemment l’ouest de l’Europe. Sans compter le reflux vers les Îles Canaries et l’impact sur les archipels des Açores et de Madère. Mais dans les scenarii tournant sur le web, élaborés il y a une vingtaine d’années et faisant la « Une » aujourd’hui, il n’y en a que pour la submersion de New-York ! Il en va de cette éruption volcanique, comme de la pandémie de Covid-19 : seul compte l’hémisphère nord et encore, pas son entièreté !

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