Le temps des lettres ouvertes…

Face aux problèmes croissants devant les frontières fermées, beaucoup de gens se mettent à écrire des lettres ouvertes adressées à beaucoup de destinataires qui eux aussi, écrivent des lettres ouvertes...

Beaucoup de lettres sont écrites ces temps-ci... Foto: Petar Milošević / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Ces jours-ci, nous recevons à notre rédaction des copies d’un bon nombre de lettres ouvertes, accompagnées de la demande polie de les publier. Ces lettres ouvertes demandent, à juste titre, que les problèmes occasionnés par la fermeture des frontières cessent, que des améliorations soient apportées à certains de ces problèmes ou que les frontières soient rouvertes. Des postulats que l’on pourrait signer sur le champ. Mais il faut aussi se poser la question de l’efficacité de ces lettres, et aussi, s’il n’y a pas de moyens plus pragmatiques pour porter ces griefs directement là où les mesures sont décidées.

Nous arrivons même au stade où les auteurs de ces lettres s’adressent leur courriers mutuellement. Est-ce que ces lettres ne sont pas plutôt destinées au grand public, histoire de se positionner ? Ce serait de bonne guerre, mais l’objectif ne serait pas le même. Il ne faut pas oublier que nous sommes toujours en phase électorale…

Les élus locaux écrivent aux maires et présidents de collectivités, les maires et présidents de collectivités écrivent aux députés, les députés écrivent aux ministres qui eux, ne répondent généralement pas à ce type de sollicitations ou, le cas échéant, avec des formules passe-partout.

Impuissants face aux décisions prises au plus haut niveau politique, nous ne pouvons que constater les problèmes qui découlent de la fermeture des frontières, les dégâts causés aux relations transfrontalières, la perte de confiance dans les instances nationales et européennes. Il est clair que les responsables sur place, là où les problèmes se concrétisent et ne sont pas théoriques, veulent se faire entendre. Mais n’y a-t-il pas de meilleurs moyens pour ce faire ? Que penser des nombreuses lettres écrites par des députés dont plusieurs font partie de la majorité au pouvoir, autant à l’Assemblée Nationale qu’au Bundestag ? Si eux doivent avoir recours au même exercice de rédaction de lettres ouvertes que les élus locaux, est-ce que cela ne signifie pas que les représentants du peuple ne peuvent pas se faire entendre dans la politique nationale ?

La Présidente du Conseil Départemental du Haut-Rhin, Brigitte Klinkert, a montré un exemple intéressant. Avec son interlocuteur du côté allemand, le ministre de l’Intérieur du Bade-Wurtemberg Thomas Strobl, elle a négocié une amélioration des conditions pour les travailleurs et travailleuses frontaliers qui, depuis lundi, peuvent à nouveau faire leurs courses en Allemagne après le travail. Pour les personnes concernées, il s’agit là d’une amélioration substantielle.

Est-ce que les responsables politiques ne peuvent plus communiquer directement entre eux ? Ou est-ce qu’ils veulent nous faire comprendre à nous, citoyens et citoyennes, qu’ils étaient du « bon côté », une fois la crise consommée ?

Les député.e.s devraient avoir des entrées à Paris et Berlin que les autres auteurs des lettres ouvertes n’ont certainement pas. Alors, utilisez-les ! Allez voir vos secrétaires d’Etat, vos ministres, vos chefs de gouvernement ! Parlez-leur et dites-leur que cette frontière est en train de miner la confiance entre les deux pays qui a été construite pendant des décennies, et qui est en train de se perdre ! Dites-leur que l’Union Européenne risque de se désintégrer si les choses continuent à se passer ainsi. Mettez-les sous pression, introduisez des questions au gouvernement, exprimez-vous dans vos commissions et agissez là où l’on peut changer les choses !

Ces lettres ouvertes, sans aucun doute bien intentionnées, commencent à avoir l’effet contraire de celui souhaité. Elles n’encouragent plus personne ; au contraire, elle sont frustrantes, car elle mettent au grand jour l’impuissance des représentants des peuples face à un groupe de décisionnaires très restreint. Ecrire des lettres ne suffit plus. Agissez et défendez les intérêts des peuples, en personne, par téléphone !

Et une chose jaillit au travers de ces nombreuses lettres ouvertes : le « pouvoir » dans nos pays s’est non seulement éloigné des populations et des instances politiques locales et régionales, mais pire encore, les députés n’ont plus l’oreille des décisionnaires. Il est temps de revoir cette organisation de la politique…

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