L’économie chinoise face à une crise existentielle

Le coronavirus ne fait pas les choses à moitié – les deux tiers des PME-PMI en Chine sont menacés du dépôt de bilan. Les conséquences pourraient s'avérer catastrophiques.

Hier, à Xingtai. La vie y est toujours paralysée, mais l'économie doit se relancer pour éviter une hécatombe des PME-PMI. Foto: Wcr1993 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Il convient de revoir certains préjugés concernant la Chine. Quand on pense « économie » et « Chine », on s’imagine des géants industriels qui écrasent leurs marchés par leur pure puissance et leur taille. Mais l’économie chinoise, ce sont aussi environ 18 millions de petites et moyennes entreprises qui assurent 60% du PIB chinois et environ 80% des emplois en Chine. Parmi ces millions de PME-PMI, jusqu’à 70% sont menacées dans leur existence par le coronavirus.

Depuis des semaines, la vie publique et économique est paralysée en Chine. Si depuis quelques jours, plusieurs grandes usines ont recommencé à travailler, la situation pour les PME-PMI est différente – beaucoup d’entre elles ne peuvent pas rouvrir, faute d’autorisations ou à cause de l’impossibilité pour les ouvriers de se rendre au travail.

La fédération chinoise des PME-PMI (CASME) vient d’effectuer un sondage ad hoc parmi ses membres ; et l’image est inquiétante. Un tiers des entreprises sondées dispose de réserves qui lui permettront de survivre encore un mois, un autre tiers pourra, dans le meilleur des cas, se maintenir encore deux mois. 70% des entreprises sondées n’ont pas encore pu reprendre le travail, et considérant que la crise du coronavirus est loin d’être maîtrisée en Chine (et ailleurs), la survie des PME-PMI chinoises deviendra une course contre la montre.

Le gouvernement chinois tente de réagir en débloquant, selon un rapport « Bloomberg », des crédits spéciaux à hauteur de 116 milliards de dollars. Mais ces aides sont immédiatement consommées par les plus grandes structures économiques ; et considérant que la dette des PME-PMI en Chine s’élève à environ 5,4 billions de dollars (5400 milliards de dollars), les aides proposées ne pourront pas sauver les PME-PMI.

Mais comment relancer une économie en pleine crise du coronavirus ? Les ventes d’automobiles ont baissé de 90% (!) depuis le début de la crise et certains secteurs, surtout dans le domaine des loisirs, affichent une baisse du chiffre d’affaires de 100%. Même si, par miracle, la crise du coronavirus était maîtrisée du jour au lendemain, il faudrait compter des mois et des mois avant un retour à la normale. La plupart des PME-PMI ne disposent pas des moyens nécessaires pour survivre à une telle phase de relance. Par conséquent, la Chine s’attend à une vague de dépôts de bilan, un tremblement de terre économique qui, lui, affectera non seulement l’économie chinoise, mais aussi celle du reste du monde.

Des Etats axés sur les exportations, comme par exemple l’Allemagne, seront particulièrement affectés ; et là aussi, ce seront les PME-PMI qui souffriront les premières. Le monde n’est pas préparé à une telle paralysie des marchés, et il faudra s’attendre à un ralentissement spectaculaire de la croissance dans de nombreux pays. Et qui dit ralentissement de la croissance dit augmentation du chômage et frein pour la conjoncture.

S’il est vrai qu’actuellement, il convient d’abord de s’occuper d’endiguer la propagation du Covid-19, une sorte de mission impossible lorsque l’on constate à quelle vitesse ce virus se répand dans le monde entier, il faudra également penser aux conséquences économiques qui risquent d’être lourdes. Le secteur bancaire, en crise lui-même, ne sera pas en mesure d’injecter les crédits nécessaires dans le monde des PME-PMI. Hormis le fait que les entreprises de ce secteur ont traditionnellement du mal à obtenir des crédits, il manquera tout simplement l’argent pour parer aussi à cette crise-là.

Les informations qui arrivent de Chine font état d’une « stabilisation » de la situation, mais considérant que la Chine a déjà changé à plusieurs reprises sa façon de comptabiliser les infections et les malades, considérant également que l’OMS estime que les chiffres réels se situent largement au-dessus de ce qui est communiqué, il est fort à craindre que cette crise durera encore un bon moment, y compris en Chine, où on s’efforce maintenant à un retour à la normale qui, dans les conditions actuelles, semble impossible.

Dans les autres régions du monde, que ce soit en Asie ou en Europe, on a l’impression que la crise ne fait que commencer. Il faudra attendre quelques jours ou quelques semaines avant de savoir si le Covid-19 sévira en Europe, en Asie ou ailleurs comme en Chine. Si tel devait être le cas, les conséquences au niveau économique pourraient ressembler à celles qu’on observe en Chine.

Le pire dans tout ça, c’est qu’il n’y a pas de remède à cette évolution. Nous sommes plus ou moins condamnés à attendre, à observer et à faire des constats. Une seule chose est certaine : les conséquences du Covid-19 seront graves à plus d’un niveau. Le monde doit apprendre à faire face à des crises imprévues, et se pose la question : nos systèmes économiques d’aujourd’hui seront-ils en mesure de faire face aux problèmes d’aujourd’hui et de demain ?  A suivre.

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