Les Açores, base de lancement de la PSA

Santa Maria, île la plus au sud-est de l’archipel, bondit dans le XXIeme siècle en devenant un site clef de l’Agence Spatiale Portugaise. Foto: TUBS / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Jean-Marc Claus) – Lorsqu’en 2019 Piero Messina, directeur des vols habités à l’Agence Spatiale Européenne (ESA), évoquait la construction du Spaceport voulu par la toute nouvelle Agence Spatiale Portugaise (PSA) sur l’île de Santa Maria aux Açores, il disait que les Portugais ont une vision à 360°. Seraient-ils alors aussi légers que les libellules et aussi furtifs que les caméléons ? Il n’en demeure pas moins que les Portugais ont pris de vitesse leurs voisins espagnols, le gouvernement de Pedro Sánchez n’ayant pas encore créé d’agence spatiale, alors que le projet existe depuis des années.

La vision à 360° dont parlait Piero Messina, concernait le développement de recherches maritimes, depuis le centre de l’Océan Atlantique. Ceci grâce à une constellation de petits satellites de surveillance, pouvant notamment détecter la survenue de pollutions. En cela, l’Archipel des Açores constitue une position géostratégique particulièrement intéressante. Une mission en profondeur, des ambitions en surface. Le Portugal, sans chercher à concurrencer Kourou ou Cap Canaveral, compte obtenir des fonds européens, pour développer son industrie spatiale dont la base de lancement de petits satellites sur l’île de Santa Maria, pourra constituer une alternative crédible et moins onéreuse.

Le Portugal assurant la présidence du Conseil de l’Union Européenne au premier semestre de l’année, le Premier Ministre António Costa n’était visiblement pas parti skier à La Mongie, lors des discussions concernant l’attribution de 15 milliards d’Euros, destinés au renforcement du tissu spatial du Vieux Continent. Pourtant, lors de sa prise de fonctions en novembre 2015, le Portugal ne se projetait pas dans l’espace. Comme pour beaucoup de grandes aventures, il y a dans celle-ci une rencontre déterminante : celle avec Manuel Heitor.

Ingénieur diplômé de l’Imperial College of London et de l’University of California, ce sexagénaire, antérieurement Secrétaire d’État aux Sciences, à la Technologie et à l’Enseignement Supérieur au sein du Gouvernement de Jósé Socrates de 2005 à 2011, est professeur à l’Instituto Superior Técnico de Lisbonne, où il a fondé en 1998, un centre d’étude dédié aux politiques d’innovation, de technologie et de développement. En l’intégrant à son équipe gouvernementale, António Costa a « eu le nez creux », car l’homme est l’exact opposé d’un « rond de cuir ».

Sa vision à la fois européenne et nationale, pour développer une stratégie spatiale à l’horizon 2030, a convaincu le Premier Ministre du Portugal, au point qu’elle soit conceptualisée en 2018 et donne lieu à une loi sur l’espace en 2019. L’Agence Spatiale Portugaise (PSA) créée dans la foulée, associe la Fondation pour la Science et la Technologie, l’Agence Nationale de l’Innovation, le Ministère de la Défense Nationale et la Région Autonome des Açores.

Parallèlement à cela, en avril dernier, l’Agence Spatiale Européenne (ESA) a installé sur l’île de Santa Maria, une nouvelle antenne de communication de 15 mètres de diamètre. Un investissement en parfaite coordination avec l’Agence Spatiale Portugaise (PSA), démontrant une fois de plus, l’utilité de l’Union Européenne. L’investissement du Portugal dans le secteur de l’espace, génère 40 millions d’Euros de chiffre d’affaires annuel, et assure les emplois à plus de 1.500 personnes.

L’Espagne comptant plus de 4.200 salariés dans ce domaine, avec un chiffre d’affaires annuel de 863 millions d’Euros, est devant le Portugal, mais ne dispose pas de centre spatial, alors que le projet est dans les cartons depuis de nombreuses années. Or, les deux pays n’étant pas seulement voisins mais frères, il n’est pas exclu de penser que l’initiative portugaise provoque dans le domaine spatial, une saine émulation sur la Péninsule Ibérique et dans ses territoires insulaires.